Une vingtaine de personnes ont assisté vendredi à Bruxelles à une cérémonie d'hommage à Yaguine et Fodé, deux adolescents guinéens retrouvés morts dans le train d'atterrissage d'un avion à Zaventem, il y a 20 ans. Le message laissé par ces deux jeunes "est fondamental sur deux plans: notre indifférence envers ces jeunes qui risquent leur vie pour migrer, et notre indifférence envers nos politiques de coopération au développement", a souligné le président du réseau d'ONG Iday-International, Jean-Jacques Schul.
Le 2 août 1999, les corps de jeunes Guinées de 14 et 15 ans étaient retrouvés dans le train d'atterrissage d'un avion de la Sabena. Morts de froid, Yaguine et Fodé portaient sur eux une lettre adressée aux "membres et responsables d'Europe", pour leur crier "au secours" et les implorer de "faire une grande organisation efficace pour l'Afrique pour nous permettre de progresser".
Vingt ans plus tard, le réseau associatif Iday, lancé notamment en réaction à cette tragédie, ainsi qu'Amitiés sans frontières, le Conseil des Communautés Africaines en Europe et en Belgique (CCAEB) et le Fonds Message de Yaguine & Fodé auprès de la Fondation Roi Baudouin, ont tenu à rappeler la souffrance et les espoirs de ces deux adolescents en quête d'une vie meilleure. "Aujourd'hui, rien n'a changé. La situation a même empiré. La Méditerranée est devenue un cimetière pour ceux qui fuient leur pays. Mais nous continuerons à manifester pour dire stop à la forteresse Europe et stop à la criminalisation des migrants et de ceux qui les aident", a clamé Hélène Madinda, la présidente du CCAEB, avant la lecture de la lettre de Yaguine et Fodé.
"Nous n'avons pas d'excuse"
Rassemblé dans une salle paroissiale du centre-ville bruxellois (rue des Pierres), le public a ensuite écouté Joseph Mbéka et sa chorale interpréter "Les ailes brisées", une chanson qu'il a composée en la mémoire de ceux dont l'histoire avait ému partout dans le monde. Riet Dhont d'Amitiés sans frontières a poursuivi avec le récit de son séjour en Guinée il y a quelques jours, auprès de la famille des deux victimes et notamment dans l'école qui porte désormais leurs noms. Enfin, le président honoraire d'Iday-International et co-fondateur du Fonds Message de Yaguine & Fodé s'est ému de l'actualité de la lettre laissée par Yaguine et Fodé. Ce message doit continuer à vivre car il nous interpelle par rapport à deux indifférences, estime Jean-Jacques Schul: "notre indifférence envers ces jeunes qui risquent leur vie pour migrer. La migration est inhérente à l'humanité. En Europe, nous sommes particulièrement responsables car nous n'avons pas l'excuse de ne pas savoir. De plus, nous avons une dette immense envers l'Afrique, nos anciennes colonies. Il y a ensuite notre indifférence par rapport à nos politiques de coopération au développement. Depuis 50 ans, on donne de l'aide et l'écart avec nos pays ne se résorbe pas. Pour être efficace, l'aide doit rapprocher la société civile de ses gouvernements et entreprises. Or la plupart des pays européens continuent à suivre une politique néo-coloniale, en finançant leurs sociétés, leurs ONG", a déploré M. Schul.
Sollicité pour clôturer la commémoration, un responsable de l'ambassade de Guinée a remercié les organisateurs et appelé tant l'Europe que les pays africains à "prendre leurs responsabilités" face à l'histoire dramatique de Yaguine et Fodé.
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