Le débat sur le burkini ne fait pas que déchaîner les passions en politique française, il a aussi lieu sereinement lors de discussions entre amis ou entre collègues. Ali, un Bruxellois musulman, a voulu partager son interprétation du phénomène. De quoi relativiser les sorties médiatiques de la N-VA, qui souhaite faire interdire le port de ce maillot de bain à la plage en Belgique.
Ali, un boucher bruxellois de 38 ans, a tenu à nous écrire via notre page Alertez-nous après avoir constaté que le débat à propos du burkini prenait de l'ampleur en France et était répercuté en Belgique par la N-VA (qui souhaite interdire le port de ce maillot de bain, ndlr). "Moi, cela ne me dérange pas qu'il y ait des femmes en burkini, maillot une pièce, bikini ou qui choisissent de faire du monokini, estime-t-il. Et je ne comprends pas qu'on se focalise là-dessus, vraiment".
Ali est d'origine maghrébine et musulman pratiquant. "Et mon épouse aussi", ajoute-t-il. Le couple aime se rendre à la plage y passer du bon temps. Sur le sable, la femme d'Ali préfère porter un petit short au-dessus de son maillot de bain, par pudeur. "Ma femme est plus à l'aise comme cela, c'est son choix", respecte-t-il. Si elle se couvre à la plage, ce n'est pas par religiosité, mais par pudeur. Alors que penser de celles qui affichent leur appartenance religieuse par le biais du port d'un maillot de bain? "Eh bien c'est comme dans la rue, la plage est un espace public, répond le Bruxellois, qui ne voit dans le port du burkini aucun signe d'asservissement de la femme, une interprétation largement répandue par certains élus politiques, en France notamment. Vous savez, ces femmes qui vont à la plage, elles souhaitent une chose: nager. C'est une forme d'intégration. Elles vont à la plage comme tout le monde. Les en empêcher, c'est les enfermer à la maison!"
Ali ne pense pas que le port du burkini soit une provocation
A ceux qui pensent que les femmes en burkini jouent la provocation en ces temps troublés, Ali répond qu'il faudrait d'abord interroger les principales intéressées, avant de tirer des conclusions. "Dans tous les cas, si certaines femmes portent le burkini pour provoquer, je trouve ça malheureux, estime le trentenaire, qui rappelle que lors des attentats de Nice, pour ne citer qu'eux, de nombreux musulmans ont perdu la vie. Les membres de notre communauté ont été indignés et choqués autant que quiconque suite à ces horribles attentats. Nous sommes tristes et peinés".
Pour Ali, l'interdiction du burkini dans huit localités françaises n'aura pour but que d'attiser les peurs. "Et c'est exactement ce que cherchent les extrémistes", prévient-il.
"Vous savez, je pensais que ma différence était un atout"
Ali semble déçu des décisions prises en France et de l'importation du débat en Belgique. "On nous a bassinés pendant des années avec le vivre ensemble, se souvient-il. Moi, pendant des années, j'ai cru que ma différence était un point positif. Et aujourd'hui, quand je lis les médias, je vois qu'on dit "Maintenant, c'est non. Si vous allez à la plage, il faut se conformer à une seule tenue". Un souci de conformité qui inquiète le Bruxellois. "Avec mon épouse, nous aimons marcher à la plage avec nos vêtements en été. Est-ce qu'on pourra encore le faire? Nous sentirons-nous plus en sécurité si ce maillot n'est plus porté? Est-ce qu'on doit vraiment avoir ce débat-là?", interroge-t-il.
Et de conclure avec une confidence personnelle: "Vous savez, en tant qu'homme, tout à fait personnellement, je préfère voir des femmes en bikini ou en maillot de bain, tout simplement parce qu'on est à la plage, c'est vrai. Mais cela ne me dérange pas que certaines femmes, par pudeur ou par religiosité, choisissent de porter un burkini".
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