Pour une petite structure qui se lance dans le commerce en ligne, les facilités de paiements sécurisés sont essentielles pour attirer de nombreux clients. Si l'année 2020 leur est favorable, elle est également synonyme de renforcement de la sécurité auprès de certains acteurs. Et chez PayPal, parfois, il y a un bug.
Cette année 2020 très atypique a boosté le développement du commerce en ligne. S'il connaissait une croissance régulière depuis des années, les semaines de confinement et la fermeture de plusieurs types de commerce a poussé une partie de la population – celle qui privilégiait les magasins – à se rabattre sur les boutiques en ligne.
On manque de recul pour avoir des chiffres fiables, mais il suffit de voir les difficultés de Bpost à livrer les 600.000 colis quotidiens (voir les détails) pour se faire une idée de l'explosion du commerce en ligne.
Si c'est une bonne nouvelle pour certains commerçants, il y a des côtés négatifs, à commencer par la dépendance envers des sociétés étrangères. Roxanne a actuellement un problème avec PayPal, entreprise pionnière dans les paiements en ligne. "Paypal a bloqué mon compte depuis mars 2020, je ne peux plus transférer l'argent sur mon compte en banque", nous a-t-elle raconté après avoir contacté la rédaction de RTL info via le bouton orange Alertez-nous.
De la mayonnaise à la vente de vêtements
Notre témoin de la région liégeoise a 58 ans, et s'occupe "depuis 3 ans" d'un site de vente de vêtements féminins. Les vêtements proposés sont "souvent des créations belges, fabriquées en Europe ou alors en Inde, mais dans de bonnes conditions" (si ça vous intéresse, allez jeter un oeil).
"Avant cela, je gérais des usines de mayonnaise", poursuit Roxane, qui a donc effectué un sacré virage professionnel. "Je me suis recyclée sur le tard", avoue-t-elle. Ce site de vente de vêtements est désormais "son activité principale, ça marche assez bien et je peux en vivre", nous a-t-elle confié.
Un bug de PayPal ?
Si tout se passe bien au niveau des ventes, c'est plus compliqué au niveau des paiements. Parmi les différents moyens proposés par Roxane, il y a PayPal, l'un des plus populaires.
"D'après PayPal, une fois qu'on atteint un certain plafond de revenus, ils veulent faire une vérification du compte". La vérification proposée par l'entreprise américaine consiste à "faire un paiement de quelques centimes d'euros sur mon compte en banque, et je dois encoder le montant de ce petit virement sur la plateforme PayPal".
Une procédure assez standard que de nombreux titulaires de compte PayPal (pas uniquement les commerçants) ont du effectuer. Jusqu'ici, rien d'anormal. Cependant, Roxane n'a "jamais reçu le moindre virement", et ne peut donc rien encoder sur PayPal afin de vérifier son compte.
Résultat: "depuis le mois de mars 2020, mon compte PayPal est 'restreint', car ils disent qu'ils n'ont pas la preuve qu'il m'appartient. Donc tout l'argent des clients est sur mon compte PayPal – quelques milliers d'euros désormais - mais je ne peux pas le transférer sur mon compte en banque".
Un des nombreux échanges via la plateforme, où Roxane doit réexpliquer le problème à chaque fois
Un huissier au Luxembourg ?
Roxane a tout essayé pour remédier au problème. "J'ai envoyé une copie de ma carte d'identité, les statuts de la société, le relevé d'identité bancaire… J'ai fait la totale. Tous ces documents sont déposés sur la plateforme", mais ça ne suffit pas, il faut ajouter le petit montant (soi-disant) transféré.
Hélas, il est visiblement très difficile de communiquer avec PayPal. "Tout doit passer par leur plateforme, on ne sait même pas leur envoyer un email. Il n'y a aucun accès au service clientèle".
Dernièrement, notre témoin a réussi à "avoir au téléphone le service clientèle de Dublin, qui après 22 minutes m'a dit qu'il n'était pas compétent et que je devais appeler leur bureau aux Etats-Unis".
Pourtant, "le siège social européen de leur société est basé au Luxembourg", où Roxane a bien envie "de leur envoyer un huissier pour récupérer mes sous !"
Que dit PayPal ?
Il n'est pas vraiment plus simple pour la presse d'entrer en contact avec PayPal. C'est via une agence de communication basée à Amsterdam que nous avons obtenu de légers éclaircissements.
Si PayPal veut vérifier l'identité de ces clients, c'est "pour se conformer aux lois anti-blanchissement d'argent et 'Know-Your-Business' (idée qu'il faut savoir de quoi les gens parlent quand ils utilisent des produits financiers comme PayPal)", nous a-t-on expliqué.
Une procédure qui "concerne typiquement les clients qui ouvrent un compte et y reçoivent de l'argent dessus", donc pas ceux, très nombreux, qui s'en servent uniquement comme intermédiaire de paiement sécurisé entre leurs cartes de crédit et un commerçant.
PayPal ajoute, sans le dire vraiment, qu'ils essaient de soigner leur image, souvent liée à de la fraude (depuis longtemps, des escrocs se font passer pour PayPal afin de tromper leur victime, ou l'utilise pour recevoir de l'argent 'volé'). Pour y parvenir, l'entreprise d'origine américaine, "par prudence et pour respecter la loi", applique des procédures d'authentification renforcée et de vérification des identités. "Notre approche est conçue pour attraper les escrocs, tout en permettant aux business honnêtes de se développer".
Quant au problème précis de Roxane, PayPal, comme tout organisme financier, "ne peut pas commenter un cas particulier", mais nous confirme cependant "que le service clientèle y travaille". Au moment de clôturer cet article, Roxane avait reçu un "signal encourageant" disant que les restrictions allaient être levées.
La grande majorité des commerçants passent désormais par un fournisseur de paiement
De nouvelles alternatives: "Il faut le plus d'options possibles"
Notre témoin de Liège n'a pas attendu que PayPal trouve une solution à son bug pour modifier la manière dont les clients peuvent payer sur son site.
"Mes clients n'emploient quasiment plus PayPal, même si l'option est toujours présente. Depuis le problème, j'ai installé un nouveau système de paiement, un système hollandais qui s'appelle Mollie et qui fonctionne très bien, notamment parce que les jeunes peuvent payer avec Bancontact. C'est également un système très transparent, qui me verse automatiquement tout l'argent du mois sur mon compte".
En réalité, Mollie agit comme un intermédiaire très pratique entre toutes les solutions de paiement (parfois difficiles à mettre en place pour un petit site web) et une boutique en ligne. "C'est ce qu'on appelle un PSP, pour Payment Service Provider", nous a expliqué Sofie Geeroms, directrice générale de l'asbl BeCommerce, qui représente le secteur du commerce en ligne belge.
"La grande majorité des commerçants passent désormais par un PSP. Certes, c'est un coût supplémentaire, mais un PSPS offre des services (comme le rassemblement des paiements tous les mois), de la sécurité, l'assurance du respect des législations belges et européennes, etc". Surtout, ce PSP permet aux commerçants belges de "proposer le plus d'options possibles, ce qui est essentiel: paiement via carte de débit (Bancontact, Payconiq), carte de crédit (Visa, Mastercard), PayPal (très populaire) ou du paiement différé comme Klarna (c'est assez nouveau)".
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