Kim est encore sous le choc. Cette Youtubeuse originaire de Bruxelles a subi une déferlante de haine sur internet. Les propos visant sa différence, elle qui est une personne de petite taille mais également son compagnon, noir de peau.
"C'est très choquant, je ne savais pas qu'aujourd'hui on pouvait écrire de telles horreurs." Kim a 30 ans. Cette Bruxelloise, atteinte de nanisme, assume pleinement sa différence puisque depuis 4 ans elle est Youtubeuse. Kim montre dans des vidéos postées sur internet son quotidien, son parcours de maman, sa vie de famille, ses difficultés aussi. "Si j'ai décidé d'être sur YouTube, c'est que j'avais envie de changer les mentalités", explique-t-elle.
A l'origine de cette démarche, elle évoque "une envie de partager avec le monde extérieur." Elle développe: "J'ai une facilité pour m'exprimer et pas de difficultés à m'exposer. Un jour, on m'a dit de prendre une caméra et de me filmer."
Une vague de haine
Dernièrement, un incident est venu perturber sa vie. Si elle a contacté notre rédaction via le bouton orange Alertez-nous, c'est pour nous faire part de son indignation à la suite de propos "dramatiques" postés sur internet et la visant. Dans son ultime vidéo, elle décide de présenter son compagnon, d'ascendance africaine. La vidéo postée sur YouTube est ensuite reprise, sans son consentement, sur un site lié à l'extrême droite basé en France où des propos nauséabonds sont régulièrement publiés. Kim reçoit alors une déferlante de haine sans précédent sous sa vidéo YouTube. Elle fait rapidement le lien, via les commentaires, avec le site d'extrême droite.
Premier réflexe: agir
Des propos racistes envers son compagnon et discriminatoires envers elle se multiplient. "Le site s'en prend à tout ce qui est autre que la population française et blanche. J'étais bouche bée, je n'avais plus les mots", raconte-t-elle. Elle explique avoir lu entre autres "qu'une personne de petite taille ne devrait pas être en couple ou mettre au monde un enfant." Kim est abasourdie. "Ma première réaction est de savoir comment je peux me retirer de ce site, de vouloir dénoncer leur propos et la haine attisée."
Un site français
Passée l'étape de l'indignation, la Bruxelloise interpelle sa communauté pour savoir ce qu'elle devrait faire, quelles mesures prendre rapidement ? Des gens lui conseillent de se tourner vers des associations ou les médias. Le site qui a posté la vidéo de Kim et dont sont issus les nombreux commentaires haineux est originaire de France. Mais les auteurs du site passent par un hébergeur situé aux États-Unis. Un micmac qui permet à l'individu derrière le site de réduire un maximum sa traçabilité. "Est-ce que ce site de propagande a le droit de publier du contenu aussi raciste et dégradant sans être puni ? Est-ce que j'ai le droit de faire sauter cet article ?", s'interroge la Youtubeuse.
Il n'y a pas d'impunité sur internet
L'institution de lutte contre les discriminations Unia a pris connaissance de la mésaventure de Kim, et se dit "malheureusement pas étonnée." Patrick Charlier directeur de l'institution publique développe: "C'est ce qu'on appelle des discours de haine. C'est une discrimination sur base de son handicap ou de sa caractéristique physique. Les personnes actives sur les réseaux sociaux et qui ont une caractéristique particulière sont souvent stigmatisées, attaquées, menacées, etc", informe-t-il précisant que les femmes le sont encore davantage que les hommes selon des chiffres basés sur une étude européenne.
"On conseille aux personnes victimes de ces comportements de porter plainte. On peut nous contacter. Il n'y a pas d'impunité sur internet. Nous avons régulièrement des condamnations pour des propos de ce type-là, pour des insultes, de l'incitation à la haine, etc." Unia met toutefois en garde et rappelle que le temps des procédures judiciaires peut parfois être long.
Joindre les opérateurs pour empêcher l'accès
Comme Unia, Carine Doutrelepont, avocate spécialisée dans le droit à l'image recommande à Kim de porter plainte dans un premier temps. "La première chose à faire est d'identifier les auteurs de ces propos qui portent gravement atteinte à sa réputation", explique l'avocate. En fonction de la décision du parquet, il existe de multiples voix judiciaires. Carine Doutrelepont note qu'il est également possible de couper l'accès au nom de domaine et donc au site. "Ici, c'est difficile d'identifier les auteurs car ils ont masqué leur adresse IP par un proxy. Ce qui est efficace est d'empêcher l'accès au nom de domaine (du site). Dans ce cas-là, on s'adresse à des fournisseurs d'accès comme Proximus, Telenet, VOO. On peut obtenir sur base de la loi sur les communications électroniques que ces intermédiaires "blacklistent" (bannissent) le nom de domaine. C'est très efficace."
Résultat, les internautes basés en Belgique, les amis et autres proches de Kim n'auraient plus accès aux propos haineux figurant sur le site. "Le contenu lui ne sera pas supprimé, seul l'accès le sera", précise encore l'avocate spécialisée.
De son côté, Kim ignore encore quelle suite donnée à toute cette histoire. "A l'avenir, je souhaiterai des mesures où l'on puisse davantage gérer notre image. Qu'on puisse avoir accès à nos propres vidéos si on veut la retirer d'un site", conclut-elle.
Vos commentaires