Bâtie sur des bases plutôt inédites (une crèche privée dans un lieu public), une crèche craint de devoir fermer ses portes à la fin de l'année, car il lui manque un rapport positif des pompiers, qui en vérifie la sécurité. La directrice s'en prend à la Ville de Mons, propriétaire. Cette dernière estime avoir fait (et faire) le nécessaire.
L'inquiétude est grandissante pour les parents des 27 enfants qui fréquentent la 'Boite à Malice', une crèche privée (il faut dire 'maison d'enfants') de Ghlin (Mons). La directrice les a prévenus récemment qu'une fermeture de l'établissement était à craindre pour la fin de l'année, via un courrier que l'un des parents nous a transmis.
"La crèche de mon enfant a reçu un avis de fermeture pour le 31 décembre ! Nous sommes le 13 et aucune solution n'est proposée ! L'ONE (l'Office de la Naissance et de l'Enfance, NDLR) pointe quelques manques qui pourraient être réglés rapidement mais pas en 15 jours et surtout à l'approche des fêtes !", nous a expliqué Julien, qui a contacté la rédaction de RTL info via le bouton orange Alertez-nous.
Même son de cloche du côté de Muriel, la maman de Mylo. "Mon fils de bientôt 2 ans y est à temps plein depuis ses 8 mois. C'est beaucoup plus qu'une maison d'enfants, c'est une vraie famille. Les enfants y sont bien, tout est adapté en fonction de leurs âges. Un bonheur pour les p'tits loups d'y aller. Il ne faut pas les déraciner de cette manière-là", ajoute-t-elle.
Le courrier reçu par les parents
A l'origine: une alliance délicate
Dans ce dossier, il est impossible de pointer une responsabilité particulière. C'est plutôt le concept de base qui ne semble pas être la meilleure des idées. En 2012, face au manque de places d'accueil pour les enfants de 0 à 3 ans, la Ville de Mons accepte de louer l'un de ses bâtiments à un groupement d'accueillantes d'enfants.
"Nous voulions ouvrir notre maison d'accueil, mais nous n'avions pas les moyens", nous a expliqué Véronique Deplancke, la directrice. La solution de l'exploitation d'un bâtiment de la commune, inoccupé, semble idéale. Le loyer est gratuit, mais l'ASBL créée alors, "La Boite à Malice", devait réaménager les locaux à ses frais, et les mettre aux normes de l'ONE.
Il est également convenu que la crèche doit prendre en charge une partie des tâches administratives incombant à un tel établissement, notamment sa conformité par rapport aux règles de l'ONE. Une convention était prévue dès le départ, et elle a été signée (en 2015 seulement suite à des amendements) par la directrice de la crèche, qui "en attend toujours une copie en retour".
Depuis le début, vous le voyez venir, la situation est tendue entre Madame Deplancke et la Ville de Mons. Des tensions assez classiques entre un locataire et un propriétaire, essentiellement liées à des mises en conformité des installations électriques, de gaz, et des détails sur les normes d'incendie.
L'ONE met la pression
L'ONE, elle, fait son travail, et après avoir accordé l'autorisation d'exploiter, exige les rapports confirmant que "La Boite à Malice" répond aux exigences les plus strictes en matière de sécurité. 27 enfants fréquentent la crèche, 42 au total y sont inscrits, "on est complet jusqu'en octobre 2017", précise la directrice.
L'ONE, que nous avons contacté, précise qu'elle a envoyé plusieurs courriers pour recevoir ces rapports dans le courant de l'année.
Dernièrement, elle a donc menacé la crèche d'une fermeture si les documents ne lui parvenaient pas. La crèche a alors multiplié les démarches pour obtenir les certifications de conformité. Mais quand les pompiers sont venus remplir leur 'Rapport de contrôle – prévention contre l'incendie et l'explosion', les conclusions ont inquiété la directrice.
Plusieurs éléments sont à corriger pour être en règle. Les délais ne sont pas forcément très courts, car il n'y a pas urgence. On parle par exemple, au niveau de l'électricité, d'un schéma unifilaire à compléter (c’est un schéma avec la position des prises, des interrupteurs et des lampes).
L'ONE, elle, estime qu'elle a assez attendu et veut un rapport des pompiers en règle avant la fin de l'année 2016.
Une partie des travaux entrepris par l'ASBL
Situation compliquée: "Je ne suis pas la propriétaire"
"La situation est compliquée, car pendant trois ans, c'est la Ville qui a pris en charge tous ces contrôles". Mais selon Madame Deplancke, "cette année, elle ne prend pas la peine de le faire".
La directrice nous assure qu'elle a fait tout ce qu'elle pouvait pour faire passer tous les organismes de contrôle, mais qu'elle bloque à un moment.
"Les pompiers doivent repasser, mais je suis la locataire, pas la propriétaire, donc je ne peux rien faire, c'est la Ville qui doit les appeler". Dans le rapport que nous avons pu consulter, on voit en effet que le 'donneur d'ordre de la mission' de contrôle est bien le bourgmestre de la Ville de Mons.
La directrice, depuis lors, multiplie les contacts avec l'administration communale, mais selon elle, "rien ne bouge, ils ne veulent plus collaborer, il y a un manque de volonté, de communication et d'organisation".
Excédée, elle parle "de foutoir à la Ville". La colère est sans doute teintée de stress, car l'ONE maintient sa mise en demeure, et s'il n'y a pas des feux verts sur tous les rapports de sécurité, la 'Boite à Malice' va effectivement devoir fermer ses portes dans quelques jours.
La commune "est en contact avec l'ONE"
La Ville de Mons, que nous avons contacté, n'apprécie pas vraiment le déballage médiatique qui tourne autour de la 'Boite à Malice'. "C'est une crèche privée dans un lieu public", précise d'emblée l'attachée de presse de la Ville, Juliette Picry. Cela caractérise bien la situation délicate dont nous vous parlions en début d'article.
"Un rapport du service d’incendie favorable, permettant le maintien de l’activité (moyennant quelques mise en conformité mineures à charge du locataire) a été envoyé à la Direction de la Crèche il y a plusieurs semaines", nous a-t-elle confirmé.
"Il reste une mise en conformité électrique à charge de la crèche, il y a d'ailleurs un rendez-vous avec la firme fixé le 27 décembre pour obtenir les attestations".
Selon toute évidence, le timing va être assez serré pour que l'ONE ait toutes ses certifications avant la fin de l'année, date du début de la mise en demeure… La Ville "est en contact avec l’ONE pour les rassurer quant à notre suivi attentif", a précisé l'attaché de presse.
D'ailleurs, "les pompiers ont encore été sollicités ce matin (jeudi 15 décembre, NDLR), ils iront constater que les principales remarques ont été levées, mais tant que la visite du 27/12 (je rappelle à charge du locataire) n’a pas eu lieu, le rapport ne pourra pas lever cette remarque", a-t-elle conclu.
Les conclusions du rapport des pompiers
Dans le pire des cas, une solution temporaire
Si l'ONE fait du zèle (mais personne ne le lui reprochera), la Boite à Malice pourrait devoir fermer ses portes à la fin de l'année.
Même si on parle d'une situation temporaire - le temps d'avoir tous les rapports et certificats en ordre – les déménagements seraient délicats pour les enfants et les parents, sans parler du manque à gagner pour le personnel…
Dans pareilles conditions, l'Office de la Naissance et de l'Enfance prendrait les choses en main, nous a-t-elle assuré, en répartissant provisoirement les enfants dans d'autres lieux d'accueil des environs. Une situation que tout le monde souhaiterait éviter. "L'objectif est commun, c'est le maintien de l’activité", nous rappelle Juliette Picry, de la Ville de Mons.
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