Au mois de juin dernier, Christophe est tombé en panne avec sa voiture, achetée moins d'un an plus tôt. Depuis 2005, tout véhicule acheté d'occasion est couvert pendant un an. Pourtant, Christophe a dû payer l'intégralité des frais liés à la casse subie, le revendeur ayant appliqué la loi à la lettre. Explications.
Depuis le 1er janvier 2005, les consommateurs qui optent pour une voiture d'occasion bénéficient d'une garantie d'au moins un an. Il s'agit d'une réglementation européenne censée protéger le consommateur, et qui ne fonctionne que si la voiture a été vendue par un professionnel.
Mais même dans ce dernier cas, l'application de la garantie peut être sujette à discussion. "Ce sont des fausses garanties d'un an qui accompagnent les véhicules d'occasion. En réalité, elles sont de 6 mois alors que chaque garagiste qui vend une voiture signale toujours que le véhicule est bien couvert par 1 an de garantie. Ce n'est pas vrai et je viens d'en faire la triste expérience", nous a indiqué Christophe via notre bouton orange Alertez-nous.
Pour bien comprendre, il convient de revenir sur la situation de notre témoin. Christophe a acheté un véhicule d'occasion en août 2015. Une voiture de marque française avec un moteur Diesel, 1,6 l. HDI, immatriculée pour la première fois en 2007 et avec 125.000 kilomètres au compteur. Mais 10 mois et 27.000 kilomètres plus tard, la courroie de distribution casse et entraîne une série de frais importants.
"La loi c'est la loi"
Sûr de son coup, Christophe décide naturellement de contacter le vendeur chez qui il a acheté sa voiture pour faire jouer la fameuse garantie d'un an à laquelle il a droit. Mais, surprise, le garagiste refuse de prendre en charge la réparation. Pire, il campe sur ses positions et fait remarquer à notre témoin, désabusé, que "la loi c'est la loi".
Comment comprendre que lorsqu'on achète une voiture chez un professionnel agréé, avec la mention "un an de garantie" sur la facture d'achat, on peut se retrouver ainsi "le bec dans l'eau" ? "La garantie est bien d'un an, c'est exact. Mais lors des six premiers mois, elle couvre l'ensemble des défectuosités. Lors des six mois qui suivent, il appartient à l'acheteur de démontrer que le défaut existait déjà à la livraison du véhicule", nous a expliqué Philippe Pirson, expert indépendant.
Cette nuance est importante. Primordiale même étant donné qu'il n'est pas toujours évident, pour une personne lambda, de démontrer qu'il existait déjà une défectuosité au moment de l'achat, dans ce cas dix mois plus tôt. "Il n'y a pas grand-chose à faire, si ce n'est démontrer que la courroie de distribution devait être changée avant que la voiture n'ait 125.000 km, soit le kilométrage lors de l'achat", ajouté Philippe Pirson.
"Il y a quelque-chose de malhonnête"
Mais pour Christophe, cette solution tombe à l'eau, le carnet de bord de son véhicule indiquant que la courroie de distribution doit normalement être changée après 240.000 kilomètres. Le revendeur n'avait donc pas à la remplacer avant de la mettre en vente. "OK, il est dans ses droits et respecte la loi. Mais je trouve quand-même qu'il y a quelque-chose de malhonnête, parce que pour vendre, avant de signer, les garagistes valorisent cette garantie en précisant qu'on sera tranquille pendant au moins un an. Or ce n'est pas vrai, et ils le savent. Et ça je trouve que ça doit être dénoncé", ajouté Christophe qui a réparé son moteur à ses frais pour un total de près de 1.500 euros.
Philippe Decrock, porte-parole de Federauto, regrette de telles situations qui restent, selon lui, exceptionnelles. "En principe, ça se passe bien. Mais bon, dans l'absolu, tout dépend du vendeur, et parfois de l'acheteur aussi", indique-t-il avant d'ajouter qu'un compromis finit souvent par émerger. "Ce qui arrive souvent lors d'une panne qui survient plus de 6 mois mais moins d'un an après l'achat, c'est qu'au terme de quelques discussions, on coupe la poire en deux. Un cas fréquemment observé est que l'acheteur paie les nouvelles pièces. De son côté, le garagiste 'offre' la main d'oeuvre".
Christophe, lui, n'a pas pu trouver un tel arrangement avec son revendeur. "Ce n'est pas un garagiste, il vend uniquement des voitures. Donc il n'a pas un mécano sous la main pour effectuer le travail. Et puis, de toute façon, il ne voulait rien savoir", regrette-t-il.
Les "arrangements" dépendent aussi du prix d'achat
Par ailleurs, si des "arrangements" peuvent être trouvés malgré la loi, il convient de préciser que dans le cas de Christophe, une casse de la courroie de distribution génère des frais élevés et de nombreuses heures de main d'oeuvre, ce qui n'est pas le cas si elle est changée avant de rompre. La prise en charge des coûts de main d'oeuvre par le revendeur auraient donc été très importants, ce qui explique certainement sa décision d'appliquer la loi "à la lettre".
De telles décisions dépendent de chaque cas. Selon le porte-parole de Federauto, cela se justifie aussi lorsqu'un client achète un véhicule très ancien pour une bouchée de pain. "Les garagistes n'interviennent souvent pas au-delà des six premiers mois avec de très vieilles voitures achetées 500 ou 1.000 euros, sinon ils sont perdants. D'ailleurs, la jurisprudence tient compte de l'état du véhicule à l'achat, et le consommateur doit être conscient qu'il ne peut pas exiger la même chose d'une toute vieille voiture. Il doit s'attendre à ce qu'elle ait une panne et que ce ne soit pas considéré comme un vice. Une pompe à eau qui casse quand la voiture a plus de 200.000 kilomètres, c'est une panne, pas un vice. Il n'y a donc pas lieu d'exiger une réparation, et même si le client va en Justice, en général les juges lui feront remarquer qu'au prix auquel il a acheté son auto, il devait s'attendre à ce que certaines pièces usées doivent être remplacées", prévient Pierre Decrock.
Quoiqu'il en soit, si les consommateurs sont mieux protégés dans le cadre de la vente d'occasion depuis 2005, il est important de rappeler qu'une garantie d'un an sur une voiture ne fonctionne pas comme une "omnium". Et si la réparation devrait facilement être pris en charge par le vendeur dans les 6 mois qui suivent l'achat de la voiture, une panne survenant lors des 6 mois suivants sera fréquemment facturée au client, même si le revendeur sera parfois amené à faire "un geste". Mais rien ne l'y oblige...
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