Pour des patients incapables d'exercer leurs droits, la décision d'interruption des soins peut être prise par un représentant légal. Ce dernier est déterminé selon un ordre précis, établi par la loi "droits du patient".
Caroline a perdu son ex-mari André (noms d'emprunt afin de garantir l'anonymat) fin 2021, décédé du Covid-19 alors qu’il était âgé d’une cinquantaine d’années. Après plusieurs semaines de coma, les docteurs ont informé la famille que leur proche ne s’en sortirait pas. Caroline rapporte que la décision d’arrêter les soins, donc débrancher l'appareil respiratoire pour laisser mourir André, a été prise par son fils Cédric, encore adolescent. "Un enfant mineur peut-il prendre cette décision ?", interroge-t-elle via le bouton orange Alertez-nous.
Une situation désespérée que rien ne laissait présager
André a été touché par le variant Delta alors qu’il était deux fois vacciné, raconte Caroline. Ne parvenant presque plus à respirer, il a été placé en soins intensifs dans un hôpital de la province de Liège. "Dans le coma, il a été intubé, les reins ont commencé à ne plus fonctionner…", poursuit-elle. Après un mois, les docteurs ont tenté de sortir André du coma. Sans succès.
"Ils ont vu que les cellules du cerveau étaient attaquées et qu’il ne se réveillerait jamais. Sans machine, il ne pouvait plus vivre", explique Caroline. "Personne n'a compris. C’était une personne tout à fait sérieuse qui ne fumait pas, qui ne buvait pas. Rien ne présageait qu’il allait avoir le Covid et que ça allait si mal se passer", confie-t-elle.
Son fils Cédric aurait décidé d’"euthanasier" son père, dit Caroline. "André est parti en paix, entouré des siens", note-t-elle. Mais Caroline s’étonne qu’une décision aussi lourde ait pu être prise par une personne mineure. Et elle s’interroge sur la loi encadrant cette pratique.
Un enfant mineur ne peut pas représenter un patient incapable d'exercer ses droits
D’un point de vue légal, il ne s’agissait pas à proprement parler d’une euthanasie : "Ne constitue une euthanasie qu'un arrêt actif de vie demandé par la personne elle-même (via une demande actuelle d’euthanasie ou via une déclaration anticipée)", explique Vinciane Charlier, porte-parole du SPF Santé. Les décisions médicales de fin de vie ne rentrent donc pas dans la définition de l’euthanasie.
Le cas d'André relève de la loi concernant le droit du patient, article 14, qui précise qui peut représenter un patient incapable d’exercer lui-même ses droits de patient. Les personnes susceptibles de représenter un patient incapable d’exercer ses droits de patient lui-même sont déterminées dans un ordre de priorité précis. "Si le patient n’a désigné aucun mandataire ou si le mandataire désigné par le patient n’intervient pas, et si aucun administrateur n’est habilité à représenter le patient, les droits du patient sont exercés en ordre subsidiaire, par l’époux cohabitant ou le partenaire cohabitant, l’enfant majeur, un parent, une soeur ou un frère majeurs", peut-on lire dans cette loi.
André n’avait pas de frères et sœurs. Ses parents étaient décédés. En revanche, il avait un fils mineur et une fille majeure. "Étant donné que la personne était inconsciente, c’est sa fille majeure qui pouvait exercer ses droits (et donc prendre la décision de débrancher). Si celle-ci n’était pas dans la capacité/possibilité, le droit revient au médecin", conclut Vinciane Charlier. Et la porte-parole du SPF Santé de souligner que les membres mineurs de la famille ne peuvent pas exercer ce droit. "Mais rien n’empêche que l’on puisse leur demander un avis, les informer", précise-t-elle.
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