L'expert des questions liées au changements environnementaux, François Gemenne, est intervenu en direct dans le RTLINFO 19H au sujet de l'augmentation importante des prix de l'énergie en Belgique, survenue à la suite de la guerre entamée par la Russie en Ukraine. Il a reconnu partager les inquiétudes exprimées par le professeur d'économie Bruno Colmant et l'expert en énergies Damien Ersnt (lisez notre article complet) à ce sujet. "On se rend bien compte que la hausse des prix de l'énergie va créer des situations de précarité énergétique pour énormément de ménages et en particulier pour les plus précaires", avertit l'expert qui rappelle que lorsqu'on se chauffe et que l'on fait le plein d'essence, "contre notre gré nous finançons aussi cette guerre en Ukraine".
Selon François Gemenne, notre pays (comme d'autres pays européens ou occidentaux) s'est mis "dans une situation intenable à la fois vis-à-vis du climat et de notre portefeuille, mais aussi vis-à-vis des questions de sécurité internationale en dépendant à ce point des énergies fossiles".
L'expert a aussi souligné la responsabilité collective des pays européens dans cette situation. "Nous avons été complètement paresseux et complaisants, estime François Gemenne. Ca fait vingt ou trente ans que les scientifiques alertent sur le changement climatique, qu'ils nous disent que nous aurions intérêt à initier cette transition énergétique et pendant vingt ou trente ans nous avons continué à acheter du gaz et du pétrole à la Russie mais également à d'autres régimes autoritaires. Nous avons enrichi les oligarques et nous nous retrouvons aujourd'hui dans une situation de dépendance totale vis-à-vis de la Russie qui nous empêche de prendre des sanctions plus fortes".
"Nous sommes pieds et poings liés face à Poutine"
Ce mardi, les Etats Unis et le Royaume-Uni ont annoncé qu'ils allaient stopper les importations de pétrole et de gaz russes. Alors est-ce que l'Europe va suivre? "Cela met évidemment une pression considérable sur les gouvernements européens pour faire de même, sauf que nous sommes coincés, considère François Gemenne. Nous n'allons pas pouvoir y arriver parce qu'on sait qu'il y aura des ruptures d'approvisionnement et des prix qui vont encore flamber davantage si jamais on arrête les importations de gaz et de pétrole russes, et donc, nous sommes pieds et poings liés face à Poutine. Nous nous sommes mis nous-mêmes dans cette situation".
Dommage qu'il ait fallu une guerre "pour que les gouvernements réagissent"
Selon le spécialiste, la réaction des Belges face à cette situation pourrait être bénéfique pour le climat. "Il est certain que si les gens baissent la température chez eux, prennent moins leur voiture, quelque part ça va réduire aussi nos émissions de gaz à effet de serre mais surtout au-delà de ces gestes individuels, je me rends compte que beaucoup de gouvernements sont en train de changer leur fusil d'épaule en matière de politique énergétique et réalisent la nécessité d investir notamment dans des énergies renouvelables, souligne François Gemenne. S'ils ne le font pas pour le climat, ils doivent au mois le faire pour garantir la paix et la sécurité. Donc ça fait un argument supplémentaire très très fort. Je regrette simplement qu'il ait fallu une guerre pour que nous réalisions cela".
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