Marc Verillotte a participé à l'assaut contre le terroriste de l'Hyper Cacher à Paris, il a reçu une balle de Mohamed Merah, il a sauté en parachute au-dessus de la Colombie, il a été au contact des talibans en Afghanistan. L’ancien policier d'élite nous propose une plongée au cœur de la colonne d'assaut de cette unité spécial des forces de l’ordre françaises, dans un livre "Au cœur du RAID" publié aux éditions "Les Arènes."
L’ancien membre du RAID, a expliqué dans le RTL INFO avec vous, pourquoi il a voulu coucher sur papier son expérience hors-du-commun : "Je voulais montrer ce qui se passait dans la colonne d’assaut et aussi les ressorts mentaux qui poussent les opérateurs de terrain. La parole n’est pas souvent donnée aux opérateurs de terrain".
Est-ce qu’on arrive à se préparer? A se dire, un jour je vais me faire tirer dessus?
"C’est un métier où il faut avoir les pieds sur terre, il faut être objectif avec la vraie vie parce que la difficulté, c’est de discerner dans les situations les éléments cohérents qui vont nous aider à résoudre le problème. Dès qu’on saisit une arme, qui est dans un métier comme le nôtre, l’ultime recours, on doit savoir qu’on va être obligé de tirer des balles et que forcément on va peut-être en recevoir et au cours de ma carrière, j’ai vu des camarades qui ont été blessés à côté de moi, j’ai vu des balles qui ont sifflé et j’ai été touché deux fois lors de l’opération contre Mohamed Merah."
Cette vie dans l'ombre, sans forcément de reconnaissance de la part du grand public qui ignore ce que vous faites, est-ce que cela pèse sur les hommes?
"On est concentré sur la tâche à effectuer, on s’intéresse assez peu à la politique. Si on pense aux tenants et aux aboutissants, une partie de notre cerveau quitte le centre de l’action : c’est-à-dire se concentrer sur le présent et la tâche technique à effectuer, donc on ne pense pas à tout ça. Mais après coup, quand on est dans son fauteuil et qu’on n’est plus au cœur de l’intervention et qu’on voit que ce qu’on a fait est un peu déformé par l’aspect ego de certains ou par l’aspect politique, ça nous met un peu en colère, parce que je suis attaché à la vérité. Je pense que si les générations futures veulent progresser, elles doivent prendre des leçons des anciens mais si on leur donne des informations altérées, comment voulez-vous que la société évolue positivement, donc la vérité doit être dite."
Au-delà du récit de vos aventures professionnelles, il y a des règles de vie, certaines valeurs que vous avez envie de transmettre?
"J’ai toujours été intéressé par les ressorts qui amènent à la performance. J’ai été athlète en judo, en équipe de France pendant cinq ans. Savoir travailler sur son mental, savoir travailler sur son physique, sa technique, pour être le plus performant possible, ce sont des valeurs qui m’ont poursuivi au RAID, parce qu’au RAID, j’ai eu les mêmes motivations d’essayer d’être le meilleur un peu comme si c’était un sport. Au RAID, on dépasse ce niveau, parce qu’après on rentre dans une dimension où on croise les victimes. Donc aux valeurs sportives, s’ajoutent des valeurs de lutte contre l’injustice, de lutte contre la violence. Je voulais montrer que ce qui pousse un opérateur dans une colonne d’assaut, ce n’est pas uniquement le salaire, c’est bien d’autres valeurs et je voulais montrer tout ça."
Vous écrivez que durant votre carrière, vous avez livré un "exercice de funambule avec la mort", comment est-ce qu’on vit avec ça au quotidien, d’être toujours sur la corde raide?
"Il faut savoir bien cloisonner. Le sport, c’était une bonne école parce que celui qui pense à la blessure, risque de se blesser. Si on ralentit pour ne pas se blesser, l’autre en face lui ne ralentit pas. Au RAID, c’est la même chose mais en puissance dix, parce que si en judo la mort est symbolique, avec la défaite. Au RAID, la menace de mort est réelle. C’est un jeu de cloisonnement, il faut savoir se concentrer à 100% sur le présent, pour ne pas être impacté par des pensées axées vers le passé ou le futur, la blessure, par exemple. Il faut se décharger de ça au briefing, au débriefing, c’est important, pour être réellement à 100 % dans la technicité, au moment du cœur de l’action."
A chaque intervention, ces opérateurs savent qu’ils peuvent tuer. "Si on tire, nous, c’est pour sauver des vies, ce n’est pas pour donner la mort. Ce ne sont pas que des mots. On a une pensée très technique. On ne tire pas sur un homme, une femme, un enfant, on tire sur une menace qu’il faut absolument faire cesser, et donc ça enlève un petit peu de la violence à donner... On fait le bien".
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