C'est le moment des répliques dans le procès du meurtre de Valentin Vermeesch, ce vendredi à la cour d'assises de Liège. La parole a d'abord été donnée aux parties civiles et au ministère public. Après une pause, la défense a pu s'exprimer à son tour.
L'élimination de la victime, déshumanisée, est la seule solution retenue par les accusés
Le ministère public, par l'intermédiaire de l'avocat général Pascale Schils, a répliqué vendredi devant la cour d'assises de Liège de manière virulente aux différents arguments soulevés par les avocats de la défense. Il a rappelé qu'une dynamique de groupe a entraîné les accusés le soir des faits.
"Il ne faut pas oublier que cette dynamique de groupe est l'élément essentiel du dossier. Cette affaire a commencé par des jeux pervers et sadiques. Elle a continué par un carnage et un massacre. Puis, les auteurs ont décidé de jeter la pièce à conviction en poussant Valentin à l'eau. Pas de trace, pas de preuve!", a indiqué Mme Schils.
Selon l'avocat général, tenir compte de la dynamique de groupe est essentiel pour comprendre le processus décisionnel. "L'intention criminelle est l'aboutissement d'un processus, né à un moment dans la nuit. L'élimination de la victime, déshumanisée, est la seule solution retenue par les accusés après avoir envisagé différentes solutions comme la menace ou l'intimidation. Parce que Valentin résistait et qu'il a même essayé de fuir", a requis Pascale Schils.
Le ministère public estime que la seule discussion qui a animé les accusés la nuit des faits reposait sur leur chance d'échapper à la prison. L'avocat général a relevé que tous les accusés ont participé volontairement aux faits. "Belinda Donnay n'était pas sous la contrainte d'Alexandre Hart. Elle a choisi de le suivre jusqu'en enfer. Dorian Daniels n'a accepté qu'une petite participation au carnage mais il a en réalité une énorme participation. Loïck Masson a tenté de se cacher sous son banc mais il a contribué à mettre Valentin hors d'état de résistance. Son rétropédalage est destiné à sauver sa peau. Et Killian Wilmet a dit que le groupe était bien dans le studio lorsqu'ils ont décidé de jeter Valentin à l'eau", a exposé l'avocat général.
Pascale Schils a soutenu que les accusés ont passé en revue différentes solutions la nuit des faits. Certaines ont été estimées insuffisantes et ils ont alors pris la décision de se débarrasser de Valentin. L'avocat général a proposé aux jurés l'argumentation qu'ils pourraient utiliser pour justifier de la culpabilité des accusés et plus particulièrement de Dorian Daniels, de Loïck Masson et de Killian Wilmet. "Ils ont procédé à une analyse de risque pour eux, dans l'unique objectif d'échapper à la prison. L'attitude de tous les accusés au moment du choix de la solution finale a été considérée comme une acceptation. Par leur présence en groupe serré autour de la victime et en raison de leur attitude agressive, ils ont contribué à affaiblir définitivement cette victime. Valentin ne pouvait attendre d'eux aucun secours. Jusqu'au bout, ils n'ont formulé aucune opposition. Leur seule condition était de ne pas faire eux-mêmes le sale boulot et de ne pas être exécuteurs matériels. Mais sans leur vigilance, prêts à intervenir à la moindre tentative de fuite de Valentin, les faits ne se seraient pas passés comme ils se sont produits concrètement", a requis Pascale Schils.
Alexandre Hart tente de diluer sa responsabilité
Lors de son intervention sur la réplique à apporter aux différents arguments soulevés pendant les plaidoiries principales, Me Alexandre Wilmotte a dénoncé la plaidoirie présentée par l'avocat d'Alexandre Hart.
Cet accusé a reconnu sa culpabilité sur l'ensemble des faits. Mais, selon l'avocat de la partie civile, son conseil a adopté une stratégie qui vise à diminuer sa responsabilité. "Alexandre Hart, par l'intermédiaire de son avocat, affirme qu'il sur-culpabilise peut-être pour attirer l'attention sur lui. Il va jusqu'à décrire Belinda Donnay comme une instigatrice des faits, avec Alexandre Hart qui le suivrait par amour. Cet argumentation ne repose sur rien", a soutenu l'avocat.
Selon la partie civile, Alexandre Hart tente de diminuer sa responsabilité en enfonçant les autres accusés. "Il continue, en réalité, d'entraîner les autres avec lui en prétendant qu'il aurait peut-être pris plus sur lui, au mépris de ses propres intérêts ou pour couvrir les autres. Là, il fait l'inverse d'assumer sa responsabilité. Il tente de la diluer et c'est une stratégie de la défense avant les débats sur la peine", a soutenu Me Wilmotte.
Pour la partie civile, la préméditation des faits doit bien être retenue, aussi bien sur les faits de coups que sur le meurtre commis sur Valentin. Me Wilmotte a soutenu que Belinda Donnay, Dorian Daniels, Loïck Masson et Killian Wilmet sont bien coauteur de l'assassinat commis sur Valentin Vermeesch. "Ils ont tous contribué à l'effet de groupe. Ils sont cinq. C'est cela qui fait la force du groupe. Ils y ont tous trouvé leur place et ont fait le choix d'y rester. Dissocier la dernière scène pour tenter d'échapper à l'assassinat n'a aucun sens. Ils étaient tous unis par une même intention. Ils ont tous les cinq directement coopéré à l'exécution du meurtre de Valentin", a soutenu Me Wilmotte.
L'avocat s'est encore adressé aux accusés. "Vous prétendez vouloir assumer mais vous essayez de sauver votre peau. Vous essayez d'arrêter la soirée au moment où il vous convient le mieux. Mais vous avez tous posé les actes et vous avez participé", a terminé Me Wilmotte.
Mort noyé après une nuit de calvaire
Pour rappel, Valentin Vermeesch, un Hutois âgé de 18 ans souffrant de handicap mental, avait été tué la nuit du 26 au 27 mars 2017 à Wanze, lors d'une très longue scène de violences et de tortures avant d'être précipité dans la Meuse, où il s'était noyé. Son cadavre avait été retrouvé le 14 avril, les mains menottées dans le dos et un essuie de vaisselle noué autour du cou. L'enquête avait mené à plusieurs de ses connaissances à Huy. La veille des faits, en soirée, il avait été invité dans un appartement du quartier de Statte, où il avait subi des gages et des moqueries. La scène avait ensuite dégénéré et, dans une dynamique de groupe, les cinq accusés lui avaient porté des coups et infligé des tortures. Le dossier évoque des scènes de sévices sexuels, des traitements inhumains et dégradants et des faits de coups puissants. Valentin Vermeesch avait aussi été menotté dans le dos.
Après plusieurs heures de violences, les bourreaux de Valentin lui avaient fait croire qu'il pouvait s'échapper. Mais ils l'avaient rattrapé avant de l'attacher à une barrière et de lui imposer de nouvelles tortures. Finalement, il avait été jeté vivant à l'eau pour que les jeunes se débarrassent de lui et qu'il ne les dénonce pas.
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