Un ex-agent de la section antiterroriste accuse sa hiérarchie de ne pas avoir donné suite à son alerte: elle avait été prévenue en juillet 2014 que les frères Abdeslam projetaient de commettre un attentat. Le Parquet dément, la Police est en colère.
Plusieurs médias ont rapporté cette semaine qu'un informateur avait appelé en sanglots un agent du département antiterrorisme de la police judiciaire fédérale bruxelloise dans la nuit du 10 au 11 juillet 2014, pour l'alerter que les frères Abdeslam étaient "totalement radicalisés", sur le point de se rendre en Syrie, et qu'ils voulaient commettre un attentat.
L'agent contacté, en congé maladie lors de cet appel, avait alors appelé ses supérieurs la nuit même pour relayer cette information, selon la presse. Le dossier avait fini par être classé sans suite.
Les critiques fusent de toutes parts, depuis lors.
"Je peux vous assurer que s'il apparaissait des manquements dans le cher de la police, je serais alors de votre côté pour mettre les choses au point", a répondu Jan Jambon, Ministre de l'Intérieur, à ceux qui l'ont interpellé à la Chambre jeudi après-midi.
Les enquêteurs donnent "le meilleur d'eux-mêmes"
Le directeur général de la police judiciaire fédérale, Claude Fontaine, indique pour sa part, par voie de communiqué, qu'il est de son devoir de défendre son équipe "contre certains éléments mensongers qui se basent sur des informations de source douteuse ayant parfois uniquement pour but de discréditer notre organisation".
"Ce qui me dérange, en tant que directeur général de la police judiciaire, c'est le fait que ces enquêteurs qui donnent en permanence le meilleur d'eux-mêmes sont ensuite confrontés à certains articles de presse négatifs reposant sur des récits fallacieux", réagit le patron de la police judiciaire.
"Les enquêtes menées dans la lutte contre les organisations terroristes sont complexes. Elles requièrent une attention soutenue et beaucoup de professionnalisme de la part des enquêteurs. Ils reçoivent des informations par centaines et un très grand nombre d'individus sont susceptibles de faire l'objet d'un suivi particulier dans les dossiers en question", explique Claude Fontaine.
"Fixer des priorités n'est pas chose aisée. C'est pourquoi une concertation est organisée en permanence avec les magistrats concernés qui décident en fin de compte du degré d'attention qu'il faut accorder à telle ou telle information", ajoute-t-il.
Secret professionnel
Le directeur général de la police judiciaire souligne par ailleurs l'importance de récolter dans les dossiers liés au terrorisme des informations fiables et des preuves concrètes. Claude Fontaine indique qu'il est tenu au secret professionnel et qu'il n'est donc pas autorisé à révéler des détails sur l'enquête pour réfuter les "contrevérités".
Le parquet fédéral a répété jeudi que "la réaction aux informations reçues par la police et la justice au sujet des frères Abdeslam en juillet 2014 avait été appropriée". Il a confirmé que des appels téléphoniques avaient été donnés par un informateur à l'agent et de ce dernier à ses supérieurs. La police judiciaire fédérale affirme qu'elle n'est pas hostile à l'enquête menée actuellement par le Comité P, dont les conclusions représenteront une opportunité pour améliorer le fonctionnement de ses services.
"Il va de soi que nous analyserons attentivement les résultats de cette enquête (...) et que nous appliquerons les améliorations éventuellement proposées en toute loyauté", déclare Claude Fontaine.
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