Le parquet général de Bruxelles a fait appel contre le jugement rendu en décembre dernier dans le dossier des hébergeurs de migrants. Il conteste les acquittements des quatre citoyens et résident belges, a indiqué samedi à l'agence Belga la Plateforme citoyenne de soutien aux réfugiés. Celle-ci s'étonne de cette décision alors que les substituts du procureur du Roi avaient eux-mêmes requis à l'audience l'acquittement de deux des "hébergeurs". La justice "se trompe de combat", estime-t-elle.
"Alors qu'il s'agissait d'un jugement d'apaisement, rappelant que la solidarité n'est pas un crime, l'appel du procureur général, derrière lequel il est difficile de ne pas voir de pressions politiques, en revient à jeter de l'huile sur le feu de la mobilisation citoyenne qui n'en sera que d'autant plus forte", a réagi par communiqué Mehdi Kassou, porte-parole de la Plateforme citoyenne.
"C'est incompréhensible parce qu'à partir du moment où le parquet obtient ce qu'il demande, visiblement, ça vient d'en haut, du procureur général Delmulle en personne qui en fait une question de principe, a lancé Alexis Deswaef, avocat de l'une des hébergeuses et ex-président de la Ligue des droits de l'Homme. Il veut obtenir la condamnation de ces quatre citoyens solidaires qui ont été acquittés par le tribunal". Quant aux pressions politiques éventuelles, Alexis Deswaef a estimé qu'il était "difficile de ne pas en voir derrière cette décision d'interjeter appel", considérant que cette décision n'était "pas logique" et semblait être un "acharnement".
"Nous restons plus motivés que jamais et rappelons que cette justice aveugle se trompe de combat en voulant punir la solidarité", a-t-il ajouté.
Selon la Plateforme citoyenne, le parquet général a fait appel contre toutes les dispositions du jugement, donc contre les quatre acquittements ainsi que contre les condamnations.
Rappel des faits
Le 12 décembre dernier, le tribunal correctionnel de Bruxelles avait acquitté trois citoyennes belges et un résident belge qui avaient hébergé chez eux des migrants. Ceux-ci, dont les journalistes Myriam Berghe et Anouk Van Gestel, étaient prévenus pour trafic d'êtres humains et organisation criminelle.
Huit autres personnes, des migrants qui avaient rejoint la Belgique, étaient prévenus des mêmes préventions.
Le parquet de Bruxelles reprochait à ces derniers d'avoir fait passer d'autres migrants vers la Grande-Bretagne, en les faisant monter dans des camions sur des aires d'autoroute, contre rémunération, dans le courant de l'année 2017.
Il reprochait par ailleurs à la journaliste Myriam Berghe et à une autre citoyenne belge d'avoir été complices de ce trafic d'êtres humains pour avoir apporté une aide à certains de ces "passeurs", que ce soit leur avoir prêté leur téléphone, leur ordinateur portable ou pour leur avoir indiqué sur une carte des parkings autoroutiers. Ces "services" avaient été rendus par les deux prévenues à des migrants qu'elles hébergeaient. Selon leurs avocats, elles avaient accueilli ceux-ci uniquement pour des raisons humanitaires.
Le parquet réclamait par contre l'acquittement de la journaliste Anouk Van Gestel et d'un jeune Tunisien, résident en Belgique, prévenus également pour des actes de complicité de trafic d'êtres humains, après avoir hébergé des migrants.
Au terme des débats, le tribunal avait estimé qu'aucun de ces quatre "hébergeurs" n'avait commis d'infraction et avait acquitté chacun d'eux.Il avait par contre condamné les "passeurs" à des peines de 12 à 40 mois de prison, avec sursis pour certains.
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