Rita Henkinet a été interrogée mardi après-midi devant la cour d'assises de Liège et a exposé les différentes étapes de sa vie. Elle a notamment évoqué sa vie isolée sur le plan sentimental et le handicap dont souffraient ses enfants.
Rita Henkinet a réaffirmé mardi lors de son interrogatoire devant la cour d'assises de Liège qu'elle n'avait pas reçu le soutien adéquat des institutions spécialisées dans l'aide à apporter à ses enfants handicapés. Ce défaut d'encadrement serait à l'origine de son désespoir et de sa décision de supprimer ses enfants. Rita Henkinet a également dit qu'elle avait souhaité mourir avec ses enfants.
Elle a précisé qu'elle n'était pas totalement heureuse et épanouie dans ce mariage
Lors de son interrogatoire par la présidente Catherine Urbain, Rita Henkinet a détaillé les différentes étapes de sa vie. Elle a précisé qu'elle a grandi dans une famille traditionnelle, catholique et dans laquelle il y avait de la place pour le dialogue. L'accusée a effectué des études d'infirmière et s'est mariée à celui qui allait devenir le père de ses enfants. Rita Henkinet n'avait pas eu une vie sentimentale très riche. Mais c'est avec cet homme qui la faisait rire et la sortait d'une certaine morosité qu'elle avait décidé de faire sa vie. Rita Henkinet a cependant précisé qu'elle n'était pas totalement heureuse et épanouie dans ce mariage. Dans son couple, les relations sexuelles n'étaient pas très fréquentes. Son premier enfant, Audrey, est né sept ans après le mariage. Arnaud, le second enfant, est né un peu plus d'un an après. Rita Henkinet allait avoir 30 ans.
Les enfants ont été placés très jeunes en institution
L'accusée a connu un premier épisode dépressif en 1988 et a été hospitalisée plusieurs mois. Son couple a ensuite éclaté et le divorce a été prononcé. Sur le plan professionnel, Rita Henkinet était très bien considérée et ne recevait que des éloges de ses collègues. Mais en 1993, elle a été hospitalisée une seconde fois à la suite d'un surmenage et une dépression nerveuse. Les enfants de Rita Henkinet ont été placés très jeunes dans des centres spécialisés, où leur handicap a été décelé. Sa fille, Audrey, a été prise en charge à l'âge de 2 ans tandis qu'Arnaud, le garçon, est entré en centre à l'âge de 2 mois.
L'état de sa fille se serait délabré en 2009
Rita Henkinet voyait régulièrement ses enfants le week-end. Son ex-mari en avait aussi la garde certains week-ends. Rita Henkinet considère que ses enfants, insuffisants moteur cérébraux, étaient lourdement handicapés. Selon elle, sa fille Audrey était anormalement calme et sans tonus. Son état s'était délabré en 2009 et elle était devenue plus agitée. Rita Henkinet souhaitait qu'on lui apporte de l'aide mais l'institution aurait rejeté sa demande. "On l'a laissé dégringoler", a-t-elle affirmé.
"On était mis devant le fait accompli. Les décisions des institutions tombaient comme un couperet"
La présidente Catherine Urbain a tenté d'affiner les propos de l'accusée et d'obtenir des réponses plus précises sur ce qu'elle ressentait et sur les difficultés qu'elle rencontrait avec ses enfants handicapés. Rita Henkinet est alors devenue plus nerveuse et s'est dite fatiguée à ce stade de l'interrogatoire. Pour expliquer la situation de ses enfants qui, selon elle, se détériorait depuis 2009, elle a dit que "tout se bousculait dans leur vie" et parlé de "pressions" ou de "tumultes". Mais Rita Henkinet est restée vague ou a affirmé qu'elle ne pouvait pas tout expliquer. Elle a également évoqué un encadrement inadéquat autour de ses enfants et la nécessité d'installer d'autres dynamiques. Elle a fait part d'une certaine impuissance face aux actions des institutions spécialisées. "On était mis devant le fait accompli. Les décisions des institutions tombaient comme un couperet." Rita Henkinet a critiqué les actions des médecins et psychiatres, affirmant qu'ils n'avaient pas adopté les bonnes attitudes face à ses enfants ou qu'ils n'avaient pas appliqué les soins adéquats.
Les difficultés des enfants nuacées par les médecins
En évoquant ses enfants, elle parle de deux êtres qui étaient en difficulté. Mais ces difficultés ont été nuancées par les médecins qui les considéraient comme des affections bénignes. Un médecin a confirmé que Rita Henkinet avait sollicité en janvier 2013 l'euthanasie de sa fille Audrey. Cette demande lui avait été refusée car considérée par le médecin comme un assassinat. Celui-ci était par contre disposé à mettre d'autres solutions en place pour aider Rita Henkinet.
"Arnaud a tapoté ma tête et j'ai interprété cela comme un geste de remerciement"
L'accusée a ensuite reconnu qu'elle avait pris la décision de supprimer ses enfants. "Je n'étais plus en mesure de gérer la situation, je n'allais pas laisser mes enfants là", a-t-elle précisé. Le 21 février, elle avait remis une forte somme d'argent à son frère Benoît ainsi que des médicaments pour qu'il puisse se suicider lui aussi, s'il ne supportait pas le geste qu'elle allait commettre. Quelques heures avant les faits, elle avait encore contacté son frère pour lui faire part de ses intentions. "Il est possible que nous partions pour le grand voyage", lui avait-elle dit. Rita Henkinet a reconnu qu'elle a mélangé des médicaments écrasés à de la mousse au chocolat pour les faire ingérer à ses enfants. Il s'agissait d'un total de 120 comprimés de Lormetazepam. Les enfants se sont endormis. Puis, elle leur a encore fait absorber d'autres médicaments avec de l'alcool fort. "En voyant qu'ils ne partaient pas assez vite, j'ai pris des couvertures. Je me suis allongée sur leur corps en serrant les couvertures sur leur visage. Audrey a mis sa main dans mes cheveux. Arnaud a tapoté ma tête et j'ai interprété cela comme un geste de remerciement", a exposé l'accusée. Rita Henkinet a ensuite expliqué qu'elle avait tenté de se suicider en absorbant de l'alcool et des médicaments. L'interrogatoire de Benoît Henkinet devait avoir lieu ce mardi soir.
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