Mes Mayence et Bauwens, avocats de Bernard Wesphael, ont livré leurs répliques jeudi matin devant la cour d'assises du Hainaut, après celles des parties civiles et de l'avocat général.
Ils soutiennent qu'aucune des parties n'a pu affirmer que la victime n'a pas pu mourir d'une intoxication alcoolo-médicamenteuse.
L'avocat général a conclu jeudi matin qu'une synergie entre les différents médicaments était impossible dans ce cas-ci. Me Bauwens a lu, lors de sa réplique, un passage du répertoire général des médicaments, tenu à jour par le SPF Santé publique, au sujet des benzodiazépines. "Une issue fatale n'est généralement pas à craindre, sauf en cas d'absorption simultanée d'alcool ou de médicaments ou d'une pathologie sous-jacente. Tous les documents officiels disent la même chose: on ne peut pas mélanger les deux parce que c'est mortel, surtout si des benzodiazépines sont en dose toxique. POINT."
"Oublions toutes les expertises toxicologiques, lisez et rappelez-vous la déclaration de Victor. Maman, alcool, médicaments: ça ne va pas. Même un gamin de 14 ans dit qu'elle ne gère pas. Il n'est pas pharmacien, il a vécu ça. Le 1er novembre, c'est lui qui parle le premier de la thèse de la combinaison alcool-médicaments et de la synergie entre les médicaments."
De plus, poursuit Me Mayence, on a retrouvé du Baclofène dans la trousse de toilette de la victime. Cette substance entraîne de graves problèmes respiratoires et peut être létale avec de l'alcool. "A-t-on recherché ça dans son sang ? Non." "J'ai entendu tout le monde, et aucun de mes trois contradicteurs ici n'a pu me dire exactement que la victime n'a pas pu mourir d'une intoxication alcoolo-médicamenteuse. Mais c'est fini mesdames et messieurs ! La possibilité existe, retenez ça comme élément majeur."
"On ne trouve pas de traces de Bernard Wesphael sur ce sachet"
La défense a encore rappelé le fait que seules des traces de mascara et de salive de la victime ont été trouvées sur le sachet en plastique, ce qui, selon les conseils de l'accusé, ne colle pas aux scénarios des parties civiles et de la défense. "On ne trouve pas de traces de Bernard Wesphael sur ce sachet et là, je n'entends rien comme explication", souligne Me Bauwens.
Dans les deux scénarios présentés mardi, la victime est morte étouffée. "Dans son rapport, l'INCC indique qu'on n'explique pas l'étouffement avec le coussin parce qu'on n'a pas la preuve !, poursuit-il. "On ne retrouve pas assez de fibres dans la bouche et dans les voies respiratoire. J'aurais voulu qu'on m'explique ce matin comment on arrive à ce scénario, et on ne l'a pas fait."Me Mayence est encore revenu sur la blessure à la main gauche de l'accusé le soir des faits, qui saignait selon le réceptionniste. "
Le réceptionniste avait aussi été interrogé à 23h45, quand monsieur Wesphael n'est pas encore arrêté. Et qu'est ce qu'il dit ? 'J'ai remarqué une égratignure à sa main gauche'. C'est tout!""Je vous remets la vie de Bernard Wesphael", a-t-il indiqué aux jurés. "Je vous demande de répondre non à la question qui vous est posée."Le dernier mot a ensuite été laissé à l'accusé.
"On vous dit qu'on ne plaide plus le suicide"
Les avocats des parties civiles, Me Philippe Moureau et Me Diego Smessaert, ont entamé les répliques, jeudi matin devant la cour d'assises du Hainaut dans le cadre du procès de Bernard Wesphael. Ils ont été suivis par l'avocat général, Alain Lescrenier. Les conseils des parties civiles et l'accusation restent convaincus de la culpabilité de Bernard Wesphael, accusé du meurtre de son épouse, Véronique Pirotton.
Juste avant l'entame des répliques, Me Tom Bauwens, avocat de la défense, a déposé des documents à la cour "afin d'aider l'avocat général a être le plus complet possible", dit-il. Mercredi, Alain Lescrenier avait déposé, en plein milieu de la plaidoirie de Me Mayence, des documents relatifs aux effets secondaires des médicaments retrouvés chez Véronique Pirotton et dans la chambre 602 de l'hôtel Mondo à Ostende.
Me Moureau, qui préfère en rire, prétend admirer le travail colossal réalisé par ses confrères de la défense et dit regretter que la victime de ce procès soit finalement Bernard Wesphael, victime d'un mauvais juge d'instruction et d'enquêteurs flamands soucieux de déplumer un parlementaire wallon. "Dans le catalogue, on vous dit qu'on ne plaide plus le suicide. Toutefois, Me Bauwens cite un livre dans lequel un homme s'est suicidé avec un sac et est revenu sur les précédentes tentatives de suicide de Véronique Pirotton".
Huit dents qui sont imprimées sur les joues de la victime
L'avocat liégeois estime que son confrère, Me Bauwens, est un "mauvais mathématicien" quand il s'agit de calculer le nombre de verres bus par la victime le jour des faits. "Il est aussi fâché avec l'anatomie car il y a huit dents qui sont imprimées sur les joues de la victime."
Il poursuit: "on vous dit que les saignements ont eu lieu après la mort, notamment celle du foie. Je ne sais pas si la défense a lu l'autopsie virtuelle qui a confirmé que l'aorte était plate, ce qui veut dire que les saignements ont eu lieu avant l'arrêt du coeur."
Me Moureau estime qu'il est logique de ne pas sortir le même scénario que l'accusation sur les faits qui se sont produits dans la chambre 602, le 31 octobre 2013. "Nous sommes d'accord sur l'essentiel, il y a bien eu un homicide volontaire avec intention de donner la mort. Le seul qui connait le scénario, c'est l'accusé."
"Monsieur Wesphael ferait mieux d'accorder la vérité à Victor"
L'avocat estime que Me Mayence n'aurait pas dû isoler un élément du dossier, la possibilité d'une intoxication alcoolo-médicamenteuse, "mais il y a le reste". "Au lieu de faire le cadeau de la maison de Véronique Pirotton dont il est usufruitier, Monsieur Wesphael ferait mieux d'accorder la vérité à Victor", a conclu l'avocat des parties civiles. Me Smessaert est revenu sur les treize éléments qu'il avait développés mercredi et il a demandé au jury de relire les différents rapports d'expertise et de les comparer. "Il faut mettre tous ces éléments ensemble et relire les contre-expertises beaucoup plus nuancées que ce que l'on veut vous faire croire." L'avocat général estime que la défense est revenue sur des éléments "dans le seul but de faire de Bernard Wesphael une victime".
Des erreurs dans les plaidoiries de la défense
Le magistrat relève des erreurs dans les plaidoiries de la défense. "C'est le bras droit qui était sous le corps de la victime et non le bras gauche. Ensuite, la photo n'a pas été faite par les Anglais mais bien par les néerlandophones qui se trouvaient dans la chambre du dessous. Enfin, il est normal que le ministère public ait changé plusieurs fois de version. Dire que M. Wesphael n'a pas varié dans ses déclarations, c'est faux. Il a toujours soutenu qu'elle s'était suicidée lors de l'instruction et on insiste ici pour dire qu'il s'agit d'une intoxication aiguë alcoolo-médicamenteuse."
Par contre, l'avocat général remarque que l'accusé n'a jamais varié sur sa version des faits, "qu'il a quand même légèrement modifiée en fonction des constatations des enquêteurs lors de ses auditions". Il remarque que la défense est passée d'une chute à trois dans la chambre de l'hôtel.
Enfin, il ajoute que l'hôtel Mondo est parfaitement insonorisé, "quant aux données sur les clés, elles sont exactes quand cela arrange la défense et inexactes quand cela ne les arrange pas". Il ajoute que personne n'occupait de chambre au septième étage, sauf la 704. Le magistrat a retrouvé plusieurs erreurs dans le rapport des conseillers techniques engagés par la défense. Ce qui a été contesté par la défense qui a pu répliquer dans la foulée.
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