Comme prévu, le ministre de l'Intérieur, Jan Jambon, s'est défendu ce mercredi de toute stigmatisation d'une communauté par ses déclarations très controversées du week-end. Pris sous le feu de questions en commission de la Chambre, il s'est toutefois refusé à avancer des chiffres ou produire des procès-verbaux faisant étant de scènes de liesse dans la communauté musulmane après les attentats du 22 mars.
Dans les colonnes du "Standaard", le vice-Premier ministre N-VA a affirmé qu'une "partie significative" de la communauté musulmane avait "dansé" à l'annonce des attentats. L'opposition mais aussi une partie de la majorité attendaient de Jan Jambon qu'il étaye ses dires jugés stigmatisants, en particulier quand il vise une partie "significative" d'une communauté de quelque 800.000 personnes en Belgique. "Pour moi significatif veut dire signifiant", a expliqué M. Jambon.
Faut-il attendre un procès-verbal pour confirmer l'existence de tels faits ?
Selon lui, le phénomène du soutien dont jouissent les terroristes dans une partie de la population est connu: "Tout le monde sait que de tels faits se sont produits. Faut-il attendre un procès-verbal pour confirmer l'existence de tels faits? " Le ministre s'est appuyé sur les témoignages reçus des services de secours et de police, sans en dire plus pour ne pas, à l'en croire, stigmatiser qui que ce soit. "Plusieurs services m'ont confirmé que ce ne sont pas des rumeurs et qu'ils ont vécu cela sur le terrain", a-t-il soutenu, avançant l'idée d'un "chiffre noir" du soutien au terrorisme comme il en existe en matière de racisme, de violence intrafamiliale ou d'homophobie.
Soutien sur les réseaux sociaux: la Belgique à la troisième place mondiale après le Qatar et le Pakistan
M. Jambon a en revanche mis en avant le soutien sur les réseaux sociaux, où la Belgique se situerait à la troisième place mondiale après le Qatar et le Pakistan, ou les pierres jetées à Molenbeek lors de l'arrestation de Salah Abdeslam. Même s'il n'a pas cerné l'ampleur du phénomène devant les parlementaires, le ministre a exprimé sa volonté d'agir, non seulement en réprimant mais aussi en prévenant pour "reconquérir les cœurs".
"Quand on est ministre de la sécurité, on ne peut pas dire n'importe quoi"
Ces explications sont loin d'avoir convaincu l'opposition. A ses yeux, M. Jambon n'a rien dit qui permette d'étayer ses propos. "Quand M. Jambon dit qu'il ne veut pas stigmatiser, personne ne le croit", a lancé Emir Kir (PS) chahuté par la N-VA au cours de ses interventions. "Il faut des faits, des chiffres", a réclamé Gille Vanden Burre (Ecolo). "Quand on est ministre de la sécurité, on ne peut pas dire n'importe quoi", a renchéri Catherine Fonck (cdH) tandis que Marco Van Hees (PTB) accusait le ministre de rentrer dans la stratégie des terroristes en divisant la population. Olivier Maingain (DéFI) s'est montré cinglant: "Votre réponse a confirmé ce que je pensais: l'intégrité intellectuelle n'est pas votre fort".
"Vous devez appeler un chat un chat mais il ne faut pas faire d'un moustique un éléphant"
La majorité n'a pas retiré son soutien au ministre mais l'a appelé, parfois fermement, à plus de modération. "Vous devez appeler un chat un chat mais il ne faut pas faire d'un moustique un éléphant", a résumé Katja Gabriels (Open Vld) avant d'ajouter: "un membre d'un gouvernement ne peut généraliser et affronter toute une partie de la population". Philippe Pivin (MR) a appelé M. Jambon à utiliser "des mots plus adéquats" toute en jugeant qu'il ne fallait pas "être dans le déni"."Avec de tels discours, vous n'allez pas conquérir des cœurs mais en perdre", a averti Nahima Lanjri (CD&V).
La nervosité était palpable sur les bancs de la N-VA, alternant interruptions des orateurs et railleries.
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