Le Roi poursuit ses consultations pour essayer de dénouer la crise politique au fédéral. Les préformateurs Rudy Demotte (PS) et Geert Bourgeois (N-VA) ont demandé hier à être déchargés de leurs mission. Le Roi n'a pas encore décidé s'il accepte ou non. Décryptage de la situation avec l'invité du RTL INFO Bienvenue, le journaliste politique Antonio Solimando.
Ce qu'on comprend depuis hier et depuis ce matin, on l'a entendu sur Bel RTL c'est que PS et N-VA ensemble ce n'est plus possible ?
Plus possible... pour l'instant temps en tout cas. Dans cette séquence de la formation du gouvernement, Paul Magnette l'a dit très clairement à notre micro hier soir à dix-neuf heures : le dialogue est enterré parce que la N-VA a des revendications communautaires imbuvables pour le PS, des revendications sur le plan socio-économique qui ne correspondent pas aux attentes du Parti socialiste et de ses électeurs. Donc pour Paul Magnette, c'était très clair. Ça a été un peu plus flottant pour la N-VA mais on a une réponse finalement assez tranchée aussi ce matin sur Bel RTL avec la vice-présidente de la N-VA. Cieltje Van Achter a dit qu'elle actait que ce dialogue n'était pas possible pour le moment. C'est ce qu'elle a précisé. Et finalement la N-VA se résout à ce que l'on tente une autre solution. Elle en parlait comme d'une conséquence logique finalement de la rupture de dialogue avec le PS.
Hier, Paul Magnette pour le PS a été assez clair, il n'a pas cherché de faux-fuyants. Pour lui, on ne peut pas discuter il ferme la porte complètement ?
Oui, il a joué d'une certaine façon un va-tout. Presque comme un coup de poker puisque Paul Magnette en débranchant une prise qui n'était pas encore tout à fait branchée, a pris un certain risque. Le risque c'est que les autres formules ou en tout cas l'autre formule de gouvernement possible ne réussisse pas et qu'on doive malgré tout négocié entre PS et N-VA, avec à ce moment-là un peu le couteau sous la gorge.
Actuellement le PS et la N-VA négociait avec la possibilité de faire autre chose. Si l'autre formule capote, par définition le PS et la N-VA ne pourront plus faire que s'entendre ensemble. La N-VA sera peut-être un peu plus forte à ce moment-là pour réclamer notamment cette réforme de l'État qu'elle attend. Et puis si cette formule-là ne fonctionne pas, alors on pourrait imaginer des élections. Et qui en portera la responsabilité ? Peut-être Paul Magnette qui a été le premier à être aussi franc, je dirais, dans l'échec entre PS et N-VA.
L'autre formule dont vous parlez, il n'y en a pas beaucoup. Si PS et N-VA ne vont pas ensemble, quels sont les autres possibles scénarios pour former un gouvernement ?
Imaginons qu'on veuille se passer du PS. C'est très difficile parce que sur le plan francophone il représente beaucoup et aussi compte tenu des désirs des autres partis. La N-VA ne veut pas négocier avec les écologistes et vice versa. Le cdH ne veut pas monter dans un gouvernement. Ce qui fait finalement que le PS est quasi-incontournable dans le camp francophone de ce gouvernement fédéral. Se passer de la N-VA, c'est problématique aussi, même si c'est possible et c'est peut-être cette solution que le Roi va tenter dans les prochaines heures.
Ce serait avec quels partis alors ?
Ce serait avec les familles socialistes, les familles libérales donc à chaque fois le Nord et le Sud du pays, les familles écologistes et y rajouter le CD&V pour former une coalition relativement majoritaire du côté de la chambre, qui serait légèrement minoritaire côté néerlandophone. Mais au moins cette coalition-là, même si elle comporte beaucoup de partis, elle pourrait tenir la corde. Si ce n'est que c'est un risque politique très important à la fois pour le CD&V et pour l'Open VLD.
Le CD&V et l'Open VLD tiennent comme souvent un peu la clé. C'est-à-dire que ils ont toujours dit depuis qu'on a voté le 26 mai "nous, on ira pas au fédéral sans la N-VA". Est-ce qu'ils pourraient changer d'avis à un moment donné ?
C'est difficile pour eux politiquement parce que reléguer la N-VA, ça veut dire avoir dans l'opposition côté flamand les deux gros partis nationalistes, les deux plus grands partis flamands finalement que sont la N-VA et le Vlaams Belang et d'avoir avec eux les communistes du PVDA, l'équivalent du PTB. Ce qui ferait finalement se mouiller tous les partis traditionnels, ceux qui portent la responsabilité de l'État de la Belgique et d'avoir tous les partis contestataires dans l'opposition. Donc c'est un très gros risque à prendre. C'est un risque aussi pour le CD&V et l'Open VLD parce qu'ils sont alliés à la N-VA au gouvernement régional et donc se débarrasser des nationalistes flamands au fédéral ce serait un peu curieux et un peu difficile peut-être pour eux. Cette configuration-là n'est pas évidente, il faut qu'il fasse le premier pas. C'est peut-être chez eux qu'il faudra trouver la clé de la sortie de crise que l'on connaît aujourd'hui.
Un autre plan, ce serait de nouvelles élections. C'est possible ?
C'est toujours possible évidemment. C'est probable dans la mesure où des partis y auraient intérêt. Ce n'est pas le cas pour le moment. Il n'y a aucun parti qui est en mesure de former le gouvernement qui, aujourd'hui, se prononce pour cette solution. Ce qu'il faut rappeler, c'est qu'il faut une majorité de députés à la Chambre pour valider cette option. Donc il faut déjà trouver une majorité pour reconvoquer des élections. On imagine aussi que ce sont les extrêmes - qui n'ont pas participé à la formation de ce gouvernement donc ils n'ont aucune responsabilité dans cette crise qu'on vit aujourd'hui - qui en sortiraient renforcés. Donc, au final ce qui pose problème actuellement c'est-à-dire l'éparpillement des voix, le fait que les extrêmes soient très forts, serait une situation renforcée après les élections et qui empirerait finalement la difficulté à former un gouvernement.
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