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Résoudre sa dépendance au téléphone : "Ça part toujours d’une prise de conscience"

Résoudre sa dépendance au téléphone : "Ça part toujours d’une prise de conscience"
 
 

Combien de temps passez-vous, par jour, sur votre téléphone ? Et seriez-vous capable de l’abandonner durant toute une journée ? Cette semaine en tout cas aura lieu la journée mondiale sans téléphone portable. Comment sommes-nous tous devenus accros au point de devoir se sevrer durant une journée ?". Nous avons invité le professeur Axel Cleeremans, directeur de recherches au FNRS et professeur de sciences cognitives à l'ULB.

A partir de quand, peut-on considérer que l’on est dépendant de son GSM ? Comment on peut s'autoévaluer ?

C’est un objet qui, effectivement, nous rend un petit peu dépendant. Il n’y a pas de critères formels comme on peut les trouver pour d’autres maladies psychiatriques, notamment l’addiction aux jeux de hasard et autres qu’on peut trouver dans le fameux manuel DSM-5 de psychiatrie. Mais plusieurs auteurs se sont intéressés depuis peu à la mise au point de critères diagnostiques qui comportent notamment le fait qu’on ne peut pas s’empêcher de regarder son téléphone, le fait que cela pose problème d’un point de vue social.

Cela peut impacter notre relation avec les autres ?

Exactement, c’est d’ailleurs autrui qui en général nous signale qu’il y a un problème. Le fait qu’on éprouve de l’anxiété ou un malaise, quand on est…

Si on part de chez soi et qu’on a oublié son téléphone…

Exactement, il y a même un mot pour ça, on appelle ça la nomophobie « No mobile phone phobia ». Et donc il y a une série de critères que l’on peut utiliser et une série de chercheurs essayent aujourd’hui d’évaluer et de mettre au point des échelles qui permettent à chacun d’évaluer le degré avec lequel l’utilisation d’un téléphone portable pose problème.

Mais son degré de dépendance n’est pas qu’une question de fréquence d’utilisation ?

Non, il ne s’agit pas uniquement de la quantité de temps que l’on passe à consulter son téléphone, il s’agit aussi des circonstances dans lesquelles on l’utilise. Il y a des situations sociales qui sont problématiques. On a tous en tête l’image d’un couple dans un restaurant où chacun est sur son téléphone. Et puis on pense évidemment à la situation d’utiliser son téléphone dans des circonstances où elle peut être dangereuse, comme par exemple la conduite d’un véhicule. Ce n’est pas pour rien que le législateur a interdit l’utilisation des téléphones au volant, parce qu’ils ont une capacité extraordinaire à capturer l’intégralité de notre attention. J’ai appris récemment, d’ailleurs, qu’aux Pays-Bas, cette interdiction d’utiliser les téléphones portables a été étendue aux cyclistes, pour les mêmes raisons.

Vous l’évoquez, l’utilisation des téléphones portables mène à des troubles de l’attention, clairement ?

Oui, c’est sans doute le trouble principal qu’on observe. En fait il y a deux aspects. D’une part, le téléphone peut entièrement mobiliser notre attention, ce qui est problématique dans des circonstances potentiellement dangereuses comme la conduite d’un véhicule. Ils sont aussi capables de nous distraire alors que nous sommes concentrés sont autre chose. Je pense ici par exemple à la situation où un élève suit un cours à l’école ou à l’université. On est sans arrêt distrait par les notifications qui apparaissent sur l’écran du téléphone et donc, notre capacité cognitive, notre mémoire et notre attention s’en trouvent diminuées.

A cause de cette utilisation intempestive du téléphone, est-ce que notre mémoire en pâtit ? Est-ce que l’on a moins de mémoire ?

C’est très particulier, parce que c’est un outil extraordinaire, évidemment. En un clic, on peut contacter des millions de personnes à travers le monde. On a accès à un vaste répertoire de connaissances qui se trouvent sur internet, mais il y a aussi des effets d’externalisation de la mémoire. C’est-à-dire que de plus en plus de choses que l’on sait se trouvent dans notre téléphone plutôt que dans notre cerveau.

Donc on ne fait plus l’effort de le retenir ?

Exactement, il y a un étude qui a montré que l’on retient moins bien les informations que l’on sait être capable de retrouver sur internet par la suite que les informations que l’on sait être incapable de retrouver sur internet par la suite.
Qu’est-ce qu’on fait pour y remédier ? Qu’est-ce que vous nous conseillez pour nous détacher de nos téléphones ?
Ça part toujours d’une prise de conscience de l’existence d’un problème. Ce n’est pas le cas pour tout le monde, mais certaines personnes éprouvent justement cette difficulté. Ce que l’on peut faire, c’est évidemment utiliser une des nombreuses applications qui ont été mises au point maintenant qui permettent de monitorer, ou en tout cas de prendre conscience de combien de temps on passe devant l’écran de son téléphone. On peut évidemment s’arranger aussi pour paramétrer son téléphone de manière à ce qu’il n’envoie plus autant de notifications. Et puis pour le reste, essayer de s’en détacher, le laisser à la maison et ainsi de suite.

La première étape c’est donc une prise de conscience ?

La première étape c’est la prise de conscience de l’existence d’un problème.


 

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