Lors des commémorations 5 ans après les attentats de Bruxelles, le Premier ministre Alexander De Croo a prononcé un discours devant le Roi Philippe, la Reine Mathilde, ainsi que les familles et proches des victimes du double attentat du 22 mars 2016. Il a mis en avant l'amour, les liens qui unissent les êtres humains, ainsi que les déchirures laissées par les évènements qui ont frappé le pays il y a 5 ans.
Sire, Majesté,
Mesdames et Messieurs,
Chères familles, chers amis des victimes,
Il y a cinq ans, l'impensable se produisait, il y a cinq ans, le mal frappait. Trois explosions dévastatrices. Deux dans notre aéroport national. Une dans une rame de métro de la station Maelbeek. En 1 heure et 13 minutes, 32 personnes innocentes furent arrachées à la vie. Plus de 340 furent gravement blessées. Et une multitude d’existences furent bouleversées à jamais. Partenaires, conjoints, frères, soeurs. Pères et mères. Filles et fils. Des personnes sur le chemin du travail. Des voyageurs rêvant aux vacances ou venant de s'enregistrer pour rentrer chez eux.
Cinq ans plus tard, les murs sont reconstruits, les toits réparés. Des dégâts matériels, les traces sont effacées. Mais les survivants, les secours de première ligne, portent toujours les stigmates. Les cicatrices. La peine et le vide. L’absence. Comme l’a écrit Alphonse de Lamartine : "Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé." Nous sommes réunis ici aujourd'hui pour nous souvenir des victimes des attentats terroristes. Pour marquer notre solidarité avec les survivants, leur famille et leurs amis. Pour exprimer notre gratitude envers tous ceux qui ont porté secours. Mais aussi pour surmonter ensemble ce vide et cette absence. Comme nous avons tenté de le faire, tant bien que mal, au cours des cinq dernières années. En nommant leurs noms et en étant unis ensemble en silence.
Si nous sommes ici, c’est aussi pour affirmer que rien n'a plus de valeur qu'une vie humaine. Qu’il n'y a pas plus grand crime, ni plus grande cruauté, que de briser l'avenir d'une personne, que d’abîmer, de détruire une vie humaine.
Les attentats furent non seulement très meurtriers, mais ils assénèrent aussi un sévère coup à notre liberté, notre démocratie, notre tolérance, notre espoir, et nos modes de vie insouciants. L’émotion suscitée par les attaques, à l'époque et aujourd'hui encore, reste intense. Une chose est sûre cependant. La cruauté et l'horreur de la violence ne peuvent jamais avoir prise sur nous. La haine ne peut jamais modifier ce que nous sommes, ni ce qu’est notre pays. Tous nos services de sécurité sont vigilants. Prêts à faire face plus que jamais. C'est important. Mais au fond de nous, nous savons qu'il n’existe qu’une seule réponse face à la cruauté qui déchire les êtres. Cette réponse se trouve dans les liens qui nous unissent. Le fait d’être au plus près les uns des autres. De gagner en humanité ensemble. En aidant l’autre à surmonter sa douleur, à supporter le vide, en devenant résilients ensemble. Même si le coeur est plus lourd, tellement plus lourd.
C'est en étant attentifs les uns aux autres, en se soutenant mutuellement, en restant unis, que nous pouvons cerner le bon et le bien en l’autre et dans notre société. La crise du coronavirus que notre pays, que le monde traverse aujourd'hui, nous rappelle d'autant plus à quel point cette proximité, ces liens humains nous sont chers. Une visite imprévue, un sourire chaleureux, un baiser sur la joue. Souvent, l'autre est ce qu’il y a de plus précieux dans la vie. Chérir cette humanité. C'est la voix de notre pays. C'est notre meilleure réponse à la barbarie, à l'absurdité et à la force destructrice de la haine et de la terreur. Les pouvoirs publics, eux aussi, se doivent de garder cette humanité. D’apporter soutien et proximité. Si cela n’a pas été suffisamment le cas à certains moments, nous devrons faire mieux. Nous ne pouvons laisser personne de côté.
Sire, Majesté,
Mesdames et Messieurs,
Chères familles, chers amis des victimes,
Voilà la tâche qui nous attend. Trouver dans les abysses de l’absence, dans l'injustice de la souffrance infligée à tant de familles, trouver la force de l’amour, de la douceur, de la présence. Si nous parvenons, à répondre à la haine, par la présence, l'empathie et l'amour, alors nous aurons gagné. Et je terminerai sur les mots de l’écrivain américain Irving Washington, qui a dit ceci : "Il y a du sacré dans les larmes. Ce ne sont pas des signes de faiblesse, mais de force. Ce sont les messagers de l'incommensurable chagrin, et de l'indicible amour."
Je crois de toutes mes forces que c’est notre seule réponse.
L’indicible amour.
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