C'est un reportage exclusif RTL INFO: une formation très particulière est en train d'être donnée dans plusieurs de nos prisons. Il s'agit de l'"Enneagram project", le projet ennéagramme en français. Il permet aux détenus, mais aussi aux gardiens, de mieux se connaître pour s'encadrer et savoir réagir face aux difficultés. Aux Etats-Unis, le taux de récidive des prisonniers formés est en forte diminution.
Nous avons tout recueilli les témoignages de Moïse, prisonnier depuis 19 ans, Nick depuis 30 ans, et Gabriel depuis 6 ans. Ils ont tous les trois suivi la formation "Enneagram project". Le résultat semble dépasser toutes les attentes.
"Si peut-être j'avais fait cette formation avant mes faits, peut-être que je n'aurais pas commis ces faits. J'aurais peut-être pris conscience de quelque chose. J'aurais peut-être pu agir autrement", confie Gabriel.
"Dans ma vie carcérale et pour ma réinsertion, bien sûr ça m'a aidé. Les décisions, les choix… quand il y a des problèmes et qu'il faut réagir au quart de seconde. Parce qu'un quart de seconde, c'est rapide. Mais ça peut te foutre dans la panade ou t'en sortir. Oui, on peut dire que ça m'a aidé, vraiment", explique Moïse.
Qu'est-ce que l'ennéagramme exactement?
Hervé De Bellefroid, formateur bénévole, nous explique en quoi consiste exactement la formation. "L'ennéagramme, c'est un outil qui permet d'apprendre à se connaître. Et apprendre à se connaître, c'est un travail parfois courageux, qui demande de vouloir le faire", indique-t-il.
Plus précisément, l'Ennéagramme est un modèle de la structure de la personne humaine. Ce modèle aboutit à neuf configurations différentes de la personnalité, neuf manières de se définir", précise l'Institut français de l'ennéagramme.
"Moi je suis un 2. Je suis quelqu'un qui a envie de donner. J'ai besoin de donner aux gens. C'est les années d'incarcération peut-être aussi… mais voilà, j'ai besoin… Maintenant, il y a quelque chose que j'ai appris par rapport à l'ennéagramme, c'est qu'il faut d'abord que je me donne à moi, en premier. Et après je donne aux autres. Avant je donnais et je ne regardais pas à moi. Je me délaissais un peu", indique Nick, détenu depuis 30 ans.
Les gardiens participent aussi à la formation
La formation est donnée aux détenus, mais également aux gardiens. Elle se base sur une meilleure compréhension de soi-même. Le programme met en avant 9 personnalités-types qui présentent des qualités et des défauts.
Cindy est cheffe d'équipe. Après 16 ans de carrière, elle a elle aussi suivi la formation. Avec au final un changement de sa perception et de sa relation avec les détenus. "Je suis quelqu'un qui au départ est très impulsive. Avec cette formation on peut se dire: 'Tiens, avec une personne qui est déjà à la base impulsive, on va essayer de contourner l'affaire et de le prendre autrement'. Je pense que moi en tout cas ça m'a aidé dans une partie de mon boulot, oui", confie Cindy.
Un taux de récidive en chute au sein des détenus formés
La formation est désormais donnée dans les prisons de Marche-en-Famenne, Nivelles, Arlon, Leuze ou Lantin.
Le modèle vient des États-Unis. Là-bas, c'est l'Etat qui finance le projet. Il a montré son efficacité sur la récidive, appelée le "rearrest". "Ce taux de rearrest, dans les cinq ans, est de plus de 80% dans les États-Unis, à plus de 60% dans la Californie. Et il était de moins de 10% dans l'ensemble de la population des détenus qui avaient suivi le programme", détaille Jean-Philippe Koopmansch, directeur du centre de formation du personnel pénitentiaire. "Il y a eu un effet positif pour les Etats et les Comtés, et une volonté de vouloir subsidier ce programme au sein de plusieurs prisons aux Etats-Unis".
En Belgique, le programme géré par une ASBL est à la recherche de subventions.
Quant à Moïse, Gabriel et Nick, ils estiment avoir changés grâce à la formation et avant tout pour eux-mêmes.
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