Le Ring, à hauteur de Groenendael, est classiquement embouteillé à l'heure de pointe, mais il l'est un peu plus ces derniers temps, en raison de travaux qui devraient durer jusqu'au mois d'avril 2017. Peut-être vous êtes-vous demandé ce qui se construisait à cet endroit, et pourquoi des arbres avaient été abattus en bord de route? RTL Info vous dévoile l'envers de ce chantier destiné à la construction d'un écoduc. Il permettra aux animaux de passer d'une partie à l'autre de la forêt de Soignes, ce qui devrait éviter beaucoup de collisions...
Si vous empruntez l’est du Ring de Bruxelles, vous avez sûrement remarqué les travaux entamés à Groenendael, comme Maxime de Braine-l’Alleud, qui passe par là tous les jours pour aller travailler. "La route est légèrement modifiée, les bandes de circulation sont rétrécies sur une centaine de mètres et ça coince plus que d’habitude. Les deux bandes de circulation sont belles, donc je me suis demandé pourquoi il y avait des travaux à cet endroit-là", nous confie-t-il. En effet, des travaux sont en cours entre les bornes kilométriques 16.0 et 16.5, dans les deux sens de circulation et ce jusqu’au 28 avril 2017. L’objet de cet ouvrage : la construction d’un écoduc, une voie de passage pour les animaux de la forêt de Soignes au-dessus de la route. Un pont de 60 mètres de large, aménagé avec de la terre, des buissons et des arbres, qui permettra à tous les animaux qui peuplent cet espace vert d’environ 5000 hectares de circuler. Et ils sont nombreux. Et pour l’instant ils sont aussi nombreux à périr sur les routes qui traversent la forêt.
Le garde forestier Dirk Raes s’est consacré, entre 2008 et 2012, à l’étude des animaux morts en bordure de la forêt de Soignes. Il a répertorié plus de 100 collisions chaque année, ne pouvant inventorier que les cadavres d’animaux d’une taille relativement grande, comme les renards, les chevreuils, les sangliers et les martres. L’étude, nommée "Dood doet Leven", "La mort donne la vie", a notamment permis de mettre en lumière les zones les plus meurtrières pour la faune de la forêt de Soignes: "Cela a aidé à localiser l’endroit exact où les animaux passent le Ring, et malheureusement se font tuer…d’où le meilleur endroit pour construire un écoduc", nous explique-t-il.
© Dirk Raes - Dood doet Leven
Sur base de l’étude de ce garde forestier, et d’une autre menée par le gouvernement flamand pour évaluer les infrastructures nécessaires à "défragmenter" la forêt de Soignes, c’est-à-dire créer des points de passage afin de reconnecter ses différentes parties, les travaux ont été lancés. La construction de ce passage pour la faune s'inscrit dans le cadre du projet "Life+Ozon", qui vise à réaliser plus de 10 passages fauniques dans la forêt de Soignes. 6,7 millions d’euros ont été débloqués, pour moitié par l’Union européenne, pour l’autre à des niveaux divers par les trois régions du pays ainsi que les communes avoisinantes (Hoeilaart, Tervuren, Overijse et Rhode-Saint-Genèse).
Du cerf à la chauve-souris... tout le monde va en profiter
Si l’effet devrait être plus visible pour les grands animaux, dont Dirk Raes a étudié les carcasses sur le bord de la route, l’écoduc devrait profiter aux animaux de toutes tailles. "Les chauves-souris évitent la lumière pendant la nuit, donc ne traversent pas les routes où il y a de la lumière. On a observé qu’elles passaient par les écoducs", nous explique Steven Vanonckelen, le directeur du projet. Actuellement, une quinzaine de caméras sont placées dans la forêt de Soignes. D’autres pourraient être mises en place à proximité de l’écoduc pour permettre aux spécialistes d’étudier les déplacements des animaux.
Pour forcer les espèces à l’utilisation de l’écoduc, le long du Ring va être clôturé. L’objectif n’est pas spécialement d’augmenter le nombre d’animaux en forêt de Soignes, mais de tenter de reproduire un habitat normal, celui d’une forêt qui n’est pas morcelée par des routes à grande vitesse: "C'est important que les animaux puissent passer en sécurité. Cela permettra d’avoir plus d’échanges de patrimoine génétique entre les espèces".
Plus de sécurité pour les animaux… et pour les automobilistes
"C'est non seulement une bonne nouvelle pour la biodiversité, mais aussi pour la sécurité routière car l'écoduc diminuera le risque des collisions entre les voitures et les animaux sur le Ring de Bruxelles", estime Steven Vanonckelen, ingénieur en biologie et directeur du projet. Ces dix dernières années en Belgique, il y a eu en moyenne 120 accidents qui ont fait des victimes humaines suite à une collision avec un animal, faisant, toujours en moyenne 140 victimes parmi les conducteurs ou les passagers (122 blessés légers, 17 blessés graves, 2 morts). Il y a également tous les accidents qui n’ont causés que des dégâts matériels, mais ceux-ci ne sont pas comptabilisés par l’IBSR.
Benoît Godart, porte-parole de l’Institut belge pour la Sécurité routière, conseille de rester particulièrement sur ses gardes "en automne, en cas d'hiver rigoureux ou au début du printemps, lorsque les animaux se mettent à rechercher de la nourriture d’une manière plus active ou lorsque des chasses sont organisées". Pour plus de sécurité, "adaptez votre vitesse, en particulier dans les zones avec des signaux de danger spécifiques, scrutez les accotements pour y déceler du gibier éventuel. Si vous êtes accompagné, demandez aux passagers de regarder aussi. La nuit, les yeux des animaux brillent à des distances relativement grandes. Roulez plus lentement lorsqu’il fait noir, pensez au fait que les animaux se comportent de façon imprévue et se déplacent souvent en groupe. Un sanglier peut en cacher un autre".
Pourquoi des arbres ont-ils été abattus?
Comme Maxime l’a constaté, à Groenendael, plusieurs arbres ont été sacrifiés le long de cette portion du Ring: "C’était nécessaire de couper quelques arbres parce que les pentes ne pouvaient pas être trop escarpés, sinon les animaux ne passeraient pas. Mais on a choisi un endroit où on devait couper le moins d’arbres possible", explique le directeur du projet, précisant que des buissons et des arbres vont être plantés sur l’écoduc, et que les arbres en bordures de route repousseront.
Un an de patience
Pour les automobilistes qui empruntent cette portion du Ring fréquemment, il faudra être patient pour voir la fin des travaux. Les deux bandes sont réduites dans les deux sens. C’est une zone habituellement limitée à 90 km/h, mais la vitesse est limitée à 70 km/h en amont du chantier et ensuite à 50 km/h. Cela accentue légèrement les ralentissements, d’après Mélanie Pousseur de RTL Mobilité. Du côté des responsables du projet, on assure que tout a été mis en œuvre pour maintenir un trafic fluide durant toute la durée des travaux.
Le passage devrait être opérationnel pour les animaux en mai 2017. Un second écoduc va également être prochainement construit au-dessus du Ring, à hauteur du bois du Laerbeek à Jette.
Deborah Van Thournout
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