L'onde de choc causée par les accusations de viols sur mineurs contre le politologue Olivier Duhamel a causé mercredi de nouveaux remous, alors que l'ex-patron de Renault Louis Schweitzer a été élu provisoirement à sa place à la tête de la Fondation nationale des sciences politiques (FNSP).
En début de journée, le préfet d'Ile-de-France Marc Guillaume a annoncé qu'il quittait la FNSP en se disant "trahi" après avoir fréquenté Olivier Duhamel "depuis des années". Il a dit aussi "condamner absolument ces actes".
Quelques heures plus tard, c'était au tour de l'ancienne garde des Sceaux Elisabeth Guigou d'informer l'AFP qu'elle renonçait à présider la commission indépendante sur l'inceste. Depuis quelques jours, l'ex-ministre socialiste était citée parmi les proches de M. Duhamel, accusé d'avoir violé son beau-fils.
"Le climat actuel ne me permet pas de conduire cette mission avec la sérénité nécessaire", a indiqué Mme Guigou dans une déclaration écrite.
"J'ai donc pris la décision de passer le relais et de renoncer à présider cette commission", a-t-elle ajouté, en affirmant avoir "ignoré toutes ces années les faits gravissimes dénoncés par Camille Kouchner dans son livre".
L'affaire a éclaté début janvier avec les révélations de Camille Kouchner dans son livre "La Familia grande", qui dénonce les agressions incestueuses qu'aurait imposées son beau-père, Olivier Duhamel, aujourd'hui âgé de 70 ans, à son frère jumeau quand il était adolescent à la fin des années 1980.
- Intérim -
Depuis lors, le débat fait rage sur le silence qui a longtemps entouré les actes reprochés à Olivier Duhamel, homme de réseaux et d'influence.
En parallèle à ces rebondissements, le conseil d'administration de la FNSP, qui a la responsabilité des grandes orientations stratégiques et de la gestion administrative et financière de Sciences Po, a élu Louis Schweitzer, 78 ans, au poste de président par intérim.
M. Schweitzer a été élu "avec 22 voix pour et un vote blanc", en même temps que l'économiste Jean-Paul Fitoussi "aux fonctions de vice-président du conseil", a annoncé Sciences Po dans un communiqué.
Louis Schweitzer a en revanche précisé à l'AFP qu'il "n'envisage pas d'être candidat à la présidence permanente".
L'institution a mis en avant son objectif de "poursuivre et de porter une ambition renouvelée de lutte contre les violences sexistes et sexuelles, en lien avec Frédéric Mion, directeur de Sciences Po et administrateur de la FNSP".
Sciences Po affiche ainsi son appui au directeur, qui a admis avoir été alerté dès 2019 et visé par de nombreux appels à la démission.
Dans une lettre ouverte publiée mercredi soir sur le site de Libération, plus de 500 étudiants, professeurs et salariés de Sciences Po ont redemandé son départ "suite à sa gestion des accusations d'agressions sexuelles et de viols incestueux contre Olivier Duhamel" et appellent à des rassemblements "les 18 et 25 janvier" devant Sciences Po.
- Débat sur le silence -
Selon Le Monde, Frédéric Mion avait initialement confié son intention d'avertir le préfet d'Ile-de-France et ancien secrétaire général du gouvernement Marc Guillaume. Interrogé par le quotidien, M. Mion a toutefois démenti l'avoir fait.
"J'ignorais totalement l'existence de tels crimes avant la parution de ce livre et des articles l'annonçant", a assuré Marc Guillaume dans son communiqué.
Lundi, Laurence Parisot, l'ancienne présidente du Medef et membre du conseil d'administration de la FNSP a penché pour la mise en place d'une charte éthique ou un code de déontologie "qui limitent le plus possible les risques".
Elle a en revanche refusé de demander la démission de Frédéric Mion. "Il ne faut pas confondre l'histoire d’Olivier Duhamel et l'histoire de Frédéric Mion, nous ne sommes pas dans la même catégorie de fautes", a-t-elle dit à Mediapart.
Autre conséquence de cette affaire, le philosophe Alain Finkielkraut a été congédié mardi de LCI, où il intervenait comme chroniqueur.
Lors d'une émission lundi, il avait dénoncé un "lynchage généralisé" d'Olivier Duhamel. "Y a-t-il eu consentement ? A quel âge cela a-t-il commencé ? Y a-t-il eu ou non une forme de réciprocité ?", a-t-il demandé. "On parle d'un adolescent", pas d'un enfant, avait ajouté le philosophe.
M. Finkielkraut a promis mercredi "d'attaquer" LCI, accusée d'avoir "trafiquer" ses propos sur l'affaire Duhamel.
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