"Prost !" "A la tienne !". A Sarrebruck, les habitants peuvent depuis mardi boire une bière en terrasse ou retourner au cinéma, profitant de la levée controversée de restrictions dans la région de la Sarre, à contre-courant du reste de l'Allemagne.
Des flocons de neige se sont invités pour cette réouverture, mais peu importe, Frank et Jonas, des amis de 35 et 27 ans, savourent ce "premier jour de liberté", selon Jonas.
"Nous étions ce matin les tout premiers au centre de tests, afin que tout soit sûr, car nous voulons naturellement que, malgré tout, la pandémie continue de reculer", ajoute Frank, dont le collier de fleurs en plastique autour du cou, mis pour l'occasion, contraste avec la neige qui s'accumule sur la table devant lui.
Dans une Allemagne fatiguée par des mois de mesures sanitaires, le petit Land de Sarre, dans l'ouest, a décidé de rouvrir, sur réservation, terrasses, cinémas, théâtres et salles de sport en échange de la présentation d'un test Covid négatif du jour.
Cette région à la frontière de la Moselle française et du Luxembourg devient ainsi le premier Etat régional allemand à desserrer l'étau des dispositifs de lutte contre le Covid, à l'image de ce que fait depuis quelques jours la commune de Tübingen, dans le sud de l'Allemagne.
- Trop tôt -
Timo Schmidt, le propriétaire du bistrot où sont attablés Frank et Jonas, sur une place piétonne du centre de Sarrebruck, a donc réinstallé sa terrasse pour la première fois depuis environ cinq mois.
"Je suis tout seul, est-ce que je peux ?", lui demande un passant. "Je vous en prie, asseyez-vous", lui répond Timo Schmidt, ajoutant qu'il va bientôt avoir besoin d'ajouter des tables dehors.
Pour goûter à ce semblant de "vie d'avant", un sésame est nécessaire : un test Covid négatif du jour même. Mais dans les faits, les règles sont un peu plus compliquées, en fonction du nombre des personnes à la même table et du fait qu'elles habitent ensemble ou pas. En revanche, chacun, y compris s'il est seul, doit remplir une feuille avec ses coordonnées.
Cette réouverture "n'est pas seulement bien, ni seulement mal, c'est un peu des deux", juge Timo Schmidt.
"Il est, je crois, trop tôt pour vraiment rouvrir pour de bon et je pense que nous allons devoir refermer de nouveau à un moment, mais l'idée de base de rouvrir des lieux sur présentation de tests est bonne", poursuit-il.
Cet assouplissement au moment où une troisième vague de contaminations touche l'Allemagne est loin de faire l'unanimité.
Plusieurs personnalités politiques réclament un confinement plus strict tandis que certaines régions, notamment celle de Berlin, ont ajouté de nouvelles mesures contraignantes à celles déjà en place.
Sur la grande terrasse du restaurant "Die Kartoffel", les chaises restent empilées.
Son patron, Mirsad Puzic, a décidé de continuer la vente à emporter, mais de ne pas redonner accès à sa terrasse "pour deux raisons" : "le froid" et la difficulté de vérifier la situation virale de ses clients.
"Comment dois-je vérifier que chaque client a fait ou non un test récent ?", s'interroge-t-il. En outre, avec l'absence des Français arrivant de l'autre côté de la frontière, son établissement "n'a pas suffisamment de clientèle" pour couvrir ses frais.
Au vu de la quantité des meubles de terrasse encore rangés, nombre de restaurateurs de Sarrebruck ont manifestement fait le même choix que Mirsad Puzic.
- Taux d'incidence -
Dana, quant à elle, s'est pressée dès mardi à la salle de sport, où, avant le confinement, elle allait quatre à cinq fois par semaine.
"J'étais vraiment très heureuse" à l'idée de pouvoir y retourner, raconte, souriante, cette professeure de sport et d'anglais de 28 ans, entre deux exercices.
Derrière elle, quelques personnes enchaînent les tractions ou les séances d'abdominaux au "Day Night Sports". Chacune a présenté un test Covid négatif.
"Le danger est là", de devoir de nouveau fermer, mais "beaucoup de clients se réjouissent de pouvoir de nouveau s'entraîner", explique Aron Wilke, le gérant de la salle.
Le sort de ces quelques espaces de liberté dépendra de l'évolution du taux d'incidence en Sarre qui doit rester inférieur à 100. Il est passé en deux semaines de 66 à 91,3 pour 100.000 habitants mardi.
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