Un drone a été utilisé mardi à Anvers pour transporter des tissus humains par-dessus les zones urbaines afin de relier plus rapidement deux sites hospitaliers. Une expérience inédite en Europe qui pourrait faire gagner du temps précieux en cours d'opération.
Il s'agissait d'un test entre le Réseau hospitalier anversois ZNA et les GZA Ziekenhuizen, qui doivent fusionner en 2024 pour former un ensemble de 13 sites. Le drone, piloté par la société flamande Helicus, a quitté un bâtiment de ZNA pour atterrir quatre minutes plus tard sur le toit de l'antenne Sint-Augustinus des hôpitaux GZA, à 800 mètres de là. À l'intérieur d'un tube attaché au drone, un flacon contenant un tissu humain potentiellement cancéreux pour analyse au laboratoire de Sint-Augustus.
Pourquoi une première ?
Le transport par drone est plus rapide, fiable, écologique et meilleur marché que le transport par route, ont fait valoir les hôpitaux.
Ce vol test, suivi de trois autres dans la journée, est une première : Helicus est pour l'heure la seule entreprise européenne à avoir reçu, mi-juin, l'autorisation d'organiser des vols de drones à des fins médicales, au-dessus d'une ville et piloté à distance hors du champ de vision de l'opérateur.
Ce test aidera à élaborer la procédure et partager l'expérience avec les instances européennes qui préparent les prochains textes légaux.
Plus rapide et fiable que la voiture
"Plus encore que dans d'autres secteurs, réaliser la livraison à temps est d'une importance vitale pour un hôpital", ajoute Els van Doesberg, présidente de ZNA. "En cas de trafic fluide, une voiture transportant met 21 minutes pour parcourir les 13 km qui séparent le site Jan Palfijn de ZNA du laboratoire central de Middelheim, mais cela peut être bien plus en cas d'embouteillages sur le ring d'Anvers. Avec le drone, c'est 10 minutes, et c'est stable".
Certains échantillons prélevés lors d'une opération sont congelés et doivent être analysés rapidement. Un autre intérêt est de pouvoir soumettre plus facilement les échantillons aux meilleurs spécialistes répartis sur différents sites.
A la veille d’une réglementation européenne
Ces tests, effectués avec un appareil du constructeur belge SABCA, interviennent avant une nouvelle réglementation européenne attendue en 2023, qui permettra la généralisation du transport de tissus humains par drones. Helicus mise sur un développement commercial et des vols réguliers d'ici 2024.
"Face à l'augmentation des coûts des systèmes de santé, des services techniques médicaux onéreux comme des laboratoires peuvent être centralisés au même endroit", permettant aux hôpitaux voisins d'acheminer leurs échantillons, explique à l'AFP Mikael Shamim, PDG de Helicus. Or, "le grand avantage des drones est de combiner la vitesse, en réduisant le temps moyen de transport, et la régularité, qui garantit la fiabilité logistique", fait-il valoir.
Pour quels cas précis ?
Les dirigeantes des groupes hospitaliers ZNA et GZA se préparent déjà à l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation européenne. Les quatre laboratoires des deux réseaux doivent traiter chaque année 1.200 échantillons prélevés lors d'une opération chirurgicale, qui doivent être analysés de façon urgente, notamment pour y détecter des cellules cancéreuses, afin de déterminer la suite de l'opération. Ils sont acheminés par route, parfois en taxi.
"Lors de l'ablation d'une tumeur, le chirurgien essaie d'épargner le plus possible les tissus environnants, mais pour s'assurer que la tumeur a été complètement retirée, des échantillons sont envoyés au laboratoire pendant la procédure" et les résultats "doivent tomber dans les trente minutes", souligne la pathologiste des GZA, Sabine Declercq.
Ne pas s’arrêter là
"Aujourd'hui nous testons le transport de tissus, mais il y a bien d'autres possibilités pour divers types d'échantillons, le sang ou les médicaments", a expliqué Willeke Dijkhoffz, l'administratrice déléguée des GZA Ziekenhuizen. "Et puis les drones enlèvent un peu de trafic routier, ce qui contribue au bien-être dans la ville".
Pour l'instant, seuls les échantillons destinés à l'analyse (tissus humains, urine, prises de sang) sont en effet concernés par le transport par drone, mais Helicus se penche déjà sur la possibilité d'acheminer des poches de sang ou des organes pour une transplantation. "Nous avons entrepris des études, mais cela prendra des années, car le défi est plus compliqué: avec un volume plus important, il faut ajouter des éléments de refroidissement", rappelle M. Shamim.
Seules les fortes rafales de vent et le gel peuvent clouer le drone au sol, mais il est opérationnel 95% du temps.
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