Dans sa chronique 90 secondes pour comprendre ce matin sur Bel-RTL, Frédéric Moray est revenu sur les demandes de la Turquie par rapport à la crise migratoire. Ce qu’elle a déjà fait avec l’argent reçu et ce qu’elle va faire des prochaines enveloppes budgétaires promises.
La Turquie réclame 3 milliards d’euros supplémentaire d’ici 2018 pour accueillir sur son territoire les candidats réfugiés. Elle déjà obtenu 3 milliards il y a quelques mois. Frédéric Moray, on a 90 secondes pour comprendre ce la Turquie fait et va faire avec tout cet argent.
Oui on a un peu l’impression d’être dans la surenchère. Dans un jeu de dupes dont les ficelles seraient tirées par la Turquie. Une Turquie qui a d’abord réclamé un milliard d’euros, puis obtenu 3 milliards et qui réclame aujourd’hui 6 milliards en 3 ans. Sur place, rien ne semble évoluer. Il y a toujours autant de candidats réfugiés qui tentent d’entrer en Europe en passant le détroit du Bosphore. Les camps à la frontière syrienne sont toujours aussi peu hospitaliers et les ONG semblent toujours galérer autant pour tenter d’offrir un minimum de décence à ces hommes et ces femmes entassés dans ces camps.
Pourtant 6 milliards d’euros, c’est énorme. Pourquoi est-ce que la Turquie en veut toujours plus ?
Il y a d’une part un peu de musculation politique. Ankara est en position de force. La majorité des migrants, dont l’Europe ne veut pas, passe par son territoire. A elle de décider si ses frontières sont poreuses ou pas. Autant en profiter pour mettre sur la table et obtenir de vieilles revendications comme la suppression des visas pour les Turcs voyageant en Europe ou la réouverture des négociations sur l’adhésion de la Turquie en Europe. A côté de cela, il y a aussi la réalité, dramatique. 2 millions et demi de migrants sont déjà réfugiés en Turquie, un pays de 80 millions d’habitants. Et l’Europe veut encore pouvoir y rapatrier tous les migrants économiques arrivés sur son territoire et qui ne peuvent pas prétendre au statut de réfugiés. Rapatriés en Turquie, puisque c’est par là qu’ils sont entrés en Europe.
Et quelles garanties a l’Europe que cet argent arrivera bien à destination ?
Les mandataires européens ne sont pas dupes, évidemment. Ils ne signent pas non plus un chèque en blanc à la Turquie. Tout l’argent promis sera géré directement par des ONG. La Turquie ne disposera pas librement de cet argent. Il s’agit d’organiser l’enseignement, trouver des logements, des vêtements de la nourriture. J’ai fait un petit calcul simpliste parce qu’il ne tient pas compte de l’échelonnement dans le temps : 6 milliards divisé par 2,5 millions de réfugiés. Cela fait à peine un peu plus de 2200 euros par personne. Et jusqu’à présent, selon Charles Demarsilly, responsable du bureau de Bruxelles de la Fondation Robert Schuman, seuls 95 millions d’euros ont été versés par l’Europe.
Vos commentaires