Les députés britanniques ont retoqué mardi pour la deuxième fois l'accord de Brexit malgré les ultimes modifications obtenues la veille par Theresa May, plongeant le Royaume-Uni dans l'inconnu sur son avenir à 17 jours de la date prévue de la sortie de l'Union européenne.
Le Traité de retrait de l'UE, conçu pour permettre une sortie en douceur du Royaume-Uni de l'Union européenne, a été largement recalé par 391 voix contre 242. La Chambre des Communes l'avait déjà rejeté massivement une première fois le 15 janvier. Ce vote est un cinglant désaveu pour la Première ministre conservatrice qui a âprement négocié ce texte de près de 600 pages pendant de longs mois, et pose la question de sa survie à la tête de l'exécutif.
Et maintenant?
Les députés voteront mercredi sur la possibilité de sortir de l'UE sans accord, un scénario particulièrement redouté par les milieux économiques. Si cette option est exclue, le Parlement votera à nouveau jeudi, cette fois sur une proposition de report "limité" du Brexit. Les 27 devront toutefois donner leur accord à l'unanimité et les dirigeants européens ont prévenu que toute demande en ce sens devrait être dûment justifiée.
Quant à lancer des discussions avec Bruxelles pour obtenir de nouveaux changements, la partie semble loin d'être gagnée. "Il n'y aura pas de troisième chance", a averti lundi le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker. "C'est cet accord ou le Brexit pourrait ne pas se produire du tout", a-t-il insisté.
Ultime appel de Theresa May
Le négociateur en chef de L'UE Michel Barnier a également prévenu mardi qu'il n'y aurait pas de période de transition, destinée à éviter une rupture brutale, après la date officielle du Brexit le 29 mars sans approbation de l'accord de retrait.
Pour tenter d'éviter une nouvelle défaite, Theresa May s'était rendue lundi soir à Strasbourg pour des négociations de dernière minute avec M. Juncker, au terme desquelles elle avait annoncé avoir obtenu des "changements légalement contraignants".
Déterminée à défendre ce texte jusqu'au bout, la dirigeante avait pris la parole dans l'après-midi devant les députés en les mettant en garde contre les conséquences d'un rejet. "Les membres de cette Assemblée sont confrontés à un choix très clair: voter et soutenir cet accord (...) ou prendre le risque de ne pas conclure d'accord", avait-elle déclaré. "Si l'accord n'est pas approuvé ce soir, le Brexit pourrait être perdu", avait-elle insisté, l'air fatigué et la voix enrouée, comme une métaphore des difficultés qu'elle rencontre dans ce processus d'une incroyable complexité, né du vote des Britanniques en faveur du Brexit lors du référendum du 23 juin 2016.
Son appel n'a pas convaincu. La publication de l'avis du conseiller juridique du gouvernement, l'attorney général Geoffrey Cox, n'y a pas aidé. Selon lui, "le risque juridique" présenté par l'accord "reste inchangé" malgré les concessions de Bruxelles revendiquées par Mme May.
Celles-ci concernent le "backstop" ("filet de sécurité"), la disposition la plus controversée de l'accord de divorce. Il s'agit d'un dispositif de dernier recours qui vise à éviter le retour d'une frontière physique entre les deux Irlande afin de préserver les accords de paix de 1998 et l'intégrité du marché unique européen.
Mettre l'accord au 'placard'
Les "Brexiters" craignent en effet de rester indéfiniment "piégés" dans une union avec l'Union européenne car le "filet de sécurité" implique un alignement étroit de tout le Royaume-Uni sur les règles commerciales européennes en attendant la conclusion d'un accord sur les futures relations.
M. Cox a atténué son analyse en estimant que les changements obtenus lundi réduisaient "le risque" que le Royaume-Uni soit "indéfiniment et contre sa volonté" pris dans le "filet de sécurité". Sans que cela ne change fondamentalement le vote des députés. "J'ai bien peur que cet accord soit maintenant arrivé en bout de course (...) J'espère qu'il va être mis au placard"", a déclaré avant le vote le député conservateur Boris Johnson, champion des Brexiters.
Quant au parti unioniste nord-irlandais DUP, dont les 10 élus sont indispensables à Theresa May pour avoir une majorité absolue, il a jugé qu'il n'y avait "pas eu suffisamment de progrès".
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