La justice française va se pencher sur les attentats les plus meurtriers commis sur son sol. Les attaques commises au Bataclan, sur des terrasses parisiennes et au stade de France ont coûté la vie à 130 personnes. Dans le cadre de ce procès historique, nos reporters ont rencontré des vigiles du stade de France qui ont été blessés par l'explosion qui a eu lieu.
Ce sont des solides, des costauds, des agents de sécurité. Trois hommes pourtant brisés par le souffle des explosions. Nos reporters Dominique Demoulin, Pierre Haelterman et Véronique Forest ont rencontré des vigiles du stade de France à Saint-Denis, là où tout a commencé le soir des attentats du 13 novembre à Paris. "Mes jambes, c'est fini, décrit Bilal Mokono, victime du stade de France. Je marchais en boitant au début, puis mes jambes ont lâché soudainement comme ça". "Je vois beaucoup de psychologues, de psychiatres, je parle, confie Mohamed A., victime. C'est comme si j'évacuais quelque chose de moi". "Je pense que cette blessure ne cicatrisera jamais, ça restera toujours dans ma mémoire", témoigne Salim Toorabally, vigile au stade de France.
Le soir du 13 novembre, un match amical oppose alors la France à l’Allemagne. Ce soir-là, Mohamed vérifie les billets à la porte H lorsqu’un jeune homme se présente. "Il a essayé de rentrer mais son billet ne fonctionnait pas, décrit Mohamed A. Je lui ai dit 'Monsieur, il faut se mettre sur le côté'. Il n'a pas bronché et est parti sans dire un mot".
Salim se trouve à la porte L. "J'étais obligé de m'interposer avec les bras pour arrêter ce monsieur, raconte-t-il. Je lui dis 'Pourquoi vous rentrez derrière un autre? Montrez-moi votre billet!' Là, il me dit 'Il faut que je rentre! Je dois rentrer!' Je lui ai répondu que non, ça ne se passait pas comme ça ici".
Mais c’est à côté d'un restaurant que se produit la 1ère explosion. Bilal et son fils viennent de s’acheter un sandwich avant d’entrer dans le stade. "Là, il y a un stand juste sur le trottoir qui fait des grillades, décrit Bilal. On arrive et mon fils me dit 'Y a un monsieur qui est bizarre'. Donc je le fixe. Je pensais qu'il me fixait, mais en fait, il avait le regard vide. Je prends la bouteille d'eau, le sandwich, au moment de le mettre en bouche, là, BOUM, explosion".
"Au moment de l'explosion, c'est comme si on m'avait matraqué le flanc gauche, comme si on m'avait tiré dessus 5 fois", dit Mohamed. "J'ouvre la porte de la brasserie je crie 'Mon dieu pas mon fils, pas mon fils!' Et je ne trouve pas mon gamin, dit Bilal, la voix étreinte par les sanglots. Excusez-moi… C'est une scène… chaque fois que je la raconte… Je ne me suis pas encore libéré de ça".
Bilal retrouve son fils sain et sauf mais depuis lors les mêmes questions l’empêchent de dormir. "Est-ce que ce monsieur Dias (un homme décédé à cause de l'explosion), devait perdre la vie? En sachant que moi je fais 1m95, 142 kilos, je suis devant à 3 mètres du kamikaze et lui en meurt et pas moi? C'est une interrogation." "Pourquoi je suis allé travailler ce soir-là alors que c'est un jour de repos?, se questionne sans cesse Mohamed. Pourquoi je ne suis pas resté chez moi pour regarder le match comme tout le monde? Ca revient tout le temps".
Salah Abdeslam qui a déposé les 3 terroristes au stade de France prétend avoir agi au nom de l’islam. Mohamed et Bilal sont eux aussi de culture musulmane. "Comment il peut mettre Allah tel qu'on l'appelle, le créateur, dieu, dans une tuerie de masse pareille? Comme il peut le mettre dedans?", s'interroge Bilal. "Je ne ressens pas de haine envers lui (Salah Abdeslam, ndlr) mais de la pitié car on lui a promis beaucoup de choses alors que tout ça est faux", estime pour sa part Mohamed.
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