La conférence climat de l'ONU se poursuivait au bout de la nuit, engluée dans des négociations qui dans tous les cas ne seront pas à la hauteur des actions urgentes nécessaires pour éviter la catastrophe climatique.
La conférence qui a commencé le 2 décembre devait se terminer vendredi soir. Mais comme souvent pour ces réunions, les négociations ont débordé et se poursuivaient dans la nuit de vendredi à samedi. De nouveaux textes étaient attendus samedi matin.
Les positions semblaient figées sur les principaux sujets de discussion: ambition en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, financement pour les pays du Sud ou encore règles de fonctionnement des marchés carbone internationaux.
"Nous sommes très inquiets, l'ambition est menacée. La plupart des textes sur la table ne sont pas compatibles avec l'esprit de l'Accord de Paris" qui vise à limiter le réchauffement à un maximum de +2°C par rapport à l'ère pré-industrielle, a déclaré Carlos Manuel Rodriguez, ministre de l'Environnement du Costa Rica.
Pour espérer respecter l'objectif idéal de l'accord de Paris (+1,5°C seulement), il faudrait réduire les émissions de CO2 de 7,6% par an, dès l'an prochain et jusqu'à 2030, ce qui nécessiterait une transformation inédite de l'économie mondiale.
Au contraire, les émissions continuent à croître.
- 4 ou 5° C en plus d'ici 2100 -
Au rythme actuel, le mercure pourrait gagner jusqu'à 4 ou 5°C d'ici la fin du siècle par rapport à l'ère pré-industrielle. Et même si les quelque 200 signataires de l'Accord de Paris respectent leurs engagements, le réchauffement pourrait dépasser les 3°C.
Pour l'instant, quelque 80 pays se sont engagés à relever leurs engagements climatiques en 2020, mais ils ne représentent qu'environ 10% des émissions mondiales.
Pendant ces deux semaines de réunion, la plupart des grands pays émetteurs de gaz à effet de serre n'ont pas évoqué de relèvement de leur engagements à lutter contre le réchauffement de la planète, qui amplifie partout tempêtes, canicules ou inondations. Ni la Chine, ni l'Inde, ni le Japon, et encore moins les États-Unis qui vont quitter le pacte climatique dans un an.
La seule bonne nouvelle est venue de Bruxelles, avec le sommet européen qui a "endossé" l'objectif de neutralité climatique de l'UE d'ici 2050. Mais sans la Pologne, très dépendante du charbon. Et les Européens ne se prononceront pas avant l'été sur le relèvement de leurs engagements pour 2030.
Alors les appels à se montrer plus ambitieux se sont multipliés.
"La Coalition pour l'ambition ne partira pas sans un appel clair à ce que tous les pays relèvent leur ambition l'an prochain", a déclaré Tina Stege, envoyé climat des Iles Marshall. Elle préside ce groupe de pays incluant de nombreux États vulnérables (petites îles, pays les moins avancés...) mais aussi des Européens.
"Il n'y a aucune chance que nous acceptions un compromis qui mette en danger l'intégrité environnementale (de l'accord de Paris), tout simplement aucune chance!", a martelé le vice-président de la Commission européenne chargé du Climat Frans Timmermans, en référence aux discussions sur les marchés carbone.
Dans ce dossier, le Brésil et l'Australie sont accusés de vouloir introduire des règles qui selon les experts saperaient l'objectif même du pacte climatique.
- "Priorité numéro un" -
L'Arabie saoudite, la Chine ou l'Inde, qui insistent sur la responsabilité première des pays développés, sont également dans le collimateur des défenseurs du climat.
Il y a "deux visions" très claires, a résumé la ministre espagnole de l'Environnement Teresa Ribera. "Ceux qui veulent aller plus vite et ceux qui veulent se retrancher derrière ce qui ne fonctionne pas, afin de ne pas avancer".
Dans ce contexte, les millions de jeunes descendus dans les rues à l'instar de l'adolescente suédoise Greta Thunberg risquent d'être amèrement déçus.
"Les yeux du peuple sont tournés vers nous", a ainsi souligné Andres Landerretche, représentant de la présidence chilienne de la COP25.
Mais pour beaucoup d’États, le vrai rendez-vous de l'ambition a toujours été la COP26 à Glasgow, en novembre 2020.
Après le triomphe électoral du Premier ministre britannique Boris Johnson, qui rend le Brexit pratiquement inéluctable l'an prochain, certains observateurs craignent que les autorités britanniques ne puissent dédier toute l'attention nécessaire à la préparation de cette COP26.
Claire O'Neill, qui présidera cette conférence, s'est voulue rassurante vendredi: "Le Premier ministre a parlé de notre engagement légal à la neutralité carbone (...) ce sera notre priorité mondiale numéro un l'an prochain", a-t-elle déclaré à l'AFP.
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