Tout est parti d'une idée lumineuse: concevoir un pavillon design à partir de bois de récupération. Du haut de leur vingtaine d'année, des étudiants en 2e et 3e architecture ont tout fait: dessiner des plans, séduire la Fondation Mons 2015, trouver des budgets, et construire eux-mêmes ce mobilier urbain. Voici le récit d'un périple qui a permis à ces jeunes de faire triompher leur créativité.
En plein cœur de Mons, un étrange pavillon de bois défie le soleil et la pluie depuis jeudi dernier. "Un petit groupe d'étudiants de 2e et 3e année en architecture a réalisé un projet fou", nous prévient Charlotte via la page Alertez-nous. Elle a vu son beau-frère et ses camarades créer de toute pièce un mobilier urbain, alors qu'ils ont à peine plus de vingt ans.
De la création des plans en 3D, à la récupération de poutres sur des chantiers, jusqu'à la pose du panneau solaire, Kenelm nous raconte l'aventure inédite vécue par cette poignée d'étudiants ambitieux.
"On réutilise les matériaux utilisés dans les chantiers à Mons"
Au fil de leurs années d'étude, Kenelm et ses amis ont vu les chantiers fleurir un peu partout à Mons. Depuis longtemps, la ville se prépare pour l'année de capitale européenne de la Culture. "En voyant les travaux, on s'est demandé ce qu'allaient devenir les matériaux utilisés", explique l'étudiant. "Ça allait engendrer beaucoup de déchets, donc on a décidé de trouver une solution pour réutiliser les matériaux", ajoute-t-il.
En octobre 2014, les dix étudiants de 2e et 3e architecture lancent un groupe de travail pour boucler le projet. "Deux professeurs de la faculté, un architecte et un ingénieur, nous ont soutenus et encadrés. Ensemble, on a choisi de réaliser un pavillon urbain, qui serait installé dans le centre-ville", explique Kenelm. "On a beaucoup travaillé l'esthétique de la structure, elle devait représenter le dynamisme de Mons", précise-t-il.
Convaincre les autorités et trouver l'argent
Muni d'un plan en 3D, d'une vidéo de présentation et d'une maquette à l'échelle 1/10, les étudiants architectes poussent les portes de la Fondation Mons 2015. "Les responsables ont tout de suite accroché au projet", explique Kenelm. "Mais il y avait un tas de choses à régler. Les procédures administratives auprès de la ville, la question des assurances, et bien entendu les sources de financement", ajoute le jeune homme.
Pour prouver leur sérieux, les étudiants n'ont pas hésité à mettre de l'argent de leur poche. "Sans ça, on n'aurait jamais dépassé le stade de projet et de concept. Il fallait montrer que nous étions prêts à aller jusqu'au bout", explique Kenelm. Le groupe a finalement trouvé trois partenaires pour financer leur chantier: la faculté d'architecture de l'UMons, la Fondation Mons 2015, et le Café Europa. "Il fallait environ 4.000 euros pour construire notre pavillon. Plus ou moins 3.000 ont été financés par nos partenaires", confie l'étudiant.
Malgré ces partenariats, le budget du groupe n'était toujours pas bouclé. "On a fait des économies, mais on a eu des dépenses imprévues. Comme l'outillage et le transport des matériaux à payer", explique Kenelm. Une idée de génie a finalement aidé les étudiants à se financer. "On propose aux gens et aux entreprises de graver leur nom et logo sur les planches de la structure", confie Kenelm. "C'est dix euros par planche. On en a déjà gravé vingt, et il nous en manque trente pour couvrir toutes nos dépenses", ajoute le jeune homme.
Mettre la main à la pâte
Après avoir endossé les rôles d'architecte et de comptable, les étudiants se sont aussi mis dans la peau d'entrepreneurs. "On a été beaucoup plus loin que le travail d'architecture, puisqu'on a mis la main à la pâte et réalisé le pavillon nous-mêmes", explique Kenelm. "On a dû tout prévoir: le béton, câbles électriques, les planches... ", explique l'étudiant avec fierté.
Pour trouver les matériaux nécessaires, les étudiants sont restés fidèles à leur idée initiale. "On s'est rendu sur des chantiers et on a demandé si on pouvait récupérer du matériel", confie Kenelm. "Nous avons utilisé du bois de coffrage, employé pour couler du béton, parce que les palettes n'étaient pas assez résistantes pour notre structure", précise-t-il.
Sur le toit du pavillon, un panneau photovoltaïque a été installé. "Il permettra de charger les batteries pour alimenter le système d'éclairage", explique Massimiliano, un autre étudiant qui a participé au projet. "Il n'a pas coûté très cher. Nous nous sommes procuré les cellules photovoltaïques ainsi qu'une vitre, et la structure en métal a été fabriquée par les membres du Café Europa", explique-t-il.
"On a appris autant qu'en une année d'étude"
Jeudi dernier, les dernières planches du pavillon ont été posées. "On n'avait que trente petites minutes de retard sur notre planning", admet Kenelm avec le sourire. Après neuf mois de travail, le bilan est plus que positif. "Ça a été très enrichissant pour nous tous, on a appris autant de choses qu'en une année d'étude", estime l'étudiant. "D'habitude, on ne fait que concevoir des plans et des projets. Là, on a pu aller beaucoup plus loin et se confronter à la réalité du terrain", précise le jeune homme.
"L'Instant", une invitation à la détente au cœur de Mons
Jusqu'au mois d'août, le pavillon des étudiants s'est installé dans la cour du bâtiment occupé par la Fondation Mons 2015. "Ce n'est qu'un début, parce qu'on a conçu une structure démontable", explique Kenelm. "On aimerait la déplacer un peu partout dans Mons, mais alors il nous faut un permis d'urbanisme de la ville, c'est en cours de négociation", confie l'étudiant. "Le but, c'est que le pavillon continue sa vie après Mons 2015", ajoute-t-il.
Baptisé "L'Instant", le pavillon offre aux passants un moment pour s'asseoir, lire, écrire, ou simplement se détendre. En plein cœur de Mons, à l'ombre ou au soleil, ils profitent d'un mobilier urbain inédit. "Les planches de bois ne sont pas alignées. On a joué sur les angles, les obliques et le relief des parois pour donner du dynamisme à la structure", explique Kenelm. "En soirée, le pavillon se pare d'un voile lumineux. C'est magnifique", nous décrit l'étudiant, d'une voix déjà experte.
Photo: David Fourmanois
Photo: David Fourmanois
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