Alors que les magasins 'Pimkie' ont été déclarés en faillite en mars dernier, voilà qu'une boutique a rouvert récemment dans notre pays, à La Panne. Problème: 136 personnes ex-employés attendent toujours leurs salaire du mois de mars et autres indemnités.
"C’est un véritable scandale", lâche d'emblée Michel. Ce Carolo nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous pour faire part de son indignation. En cause : la réouverture d'un magasin de la chaîne 'Pimkie' sur le sol belge, plus précisément à La Panne au mois de juin.
Problème, en mars dernier, la marque de prêt-à-porter 'Pimkie' fermait toutes ses boutiques en Belgique. Vingt-quatre magasins et 136 employés étaient concernés. Parmi les travailleurs qui ont perdu leur emploi, Karine, l'épouse de Michel. "Ma femme est sidérée. Certains y travaillaient depuis 30 ans." Michel ne comprend pas comment, trois mois après la faillite, la chaîne peut rouvrir un magasin, avec le même nom: Pimkie, alors que les travailleurs licenciés attendent toujours le paiement de leur dernier salaire.
Une fermeture surprise
Pimkie appartient à la puissante famille française Mulliez qui détient notamment des enseignes comme Krëfel, Auchan ou Decathlon. Souci pour notre alerteur Michel, c'est cette même famille Mulliez qui se vante sur les réseaux sociaux de la réouverture de l'enseigne à La Panne. Il en veut pour preuve des captures d'écran du réseau social Linkedin où Frédéric Mulliez se félicite de l'ouverture du magasin à La Panne.
Lors de la faillite, la direction de Pimkie avait justifié cette fermeture massive par une baisse du chiffre d'affaires depuis plusieurs années et par l'impact de la pandémie. L'annonce de la faillite de Pimkie avait fait l'effet d'une bombe car les salariés n'avaient jamais eu d'écho de l'imminence d'une fermeture, selon les syndicats. La santé financière de la chaîne de prêt-à-porter était néanmoins fragile. Trente-cinq magasins avaient déjà mis la clé sous la porte il y a quelques années. L'impact financier de la crise du coronavirus a été le coup de grâce, d'après la direction.
Si au moins, ils avaient rouvert sous un autre nom
Récemment, Michel s'est rendu à La Panne et a pu constater de lui-même qu'un magasin avait ouvert ses portes. "Je suis choqué. C'est aberrant. Si au moins, ils avaient rouvert sous un autre nom", s'étonne le Carolo dont l'épouse travaillait au Pimkie de Ville 2, à Charleroi.
@Alertez-nous - Photo prise par Michel à La Panne
Des investigations en cours
Une situation jugée d'autant plus choquante que sa femme et les 135 autres employés qui ont perdu leur emploi n'ont toujours pas perçu leur dernier salaire du mois de mars. La faillite a également privé les travailleurs d'indemnités (NDLR, plus de 90% des travailleurs concernés sont de femmes).
Quand ils ont annoncé la faillite fin mars, ils ont laissé toute l’ardoise sociale à la collectivité
Frédéric Viseur est secrétaire permanent CNE (Centrale Nationale des Employés, CSC). Il était aux côtés de travailleurs au moment de la fermeture en mars dernier. La CNE a eu vent de cette réouverture sur le sol belge et ne cache pas non plus sa surprise: "On va creuser au niveau juridique par rapport à cette nouvelle structure." Frédéric Viseur détaille: "Quand ils ont annoncé la faillite fin mars, ils ont laissé toute l’ardoise sociale à la collectivité. Les gens ont dû faire appel au fond de fermeture des entreprises qui dépend de l'ONEM". Et de poursuivre: "Énormément de travailleuses avaient beaucoup d’ancienneté et n’ont pas eu leur dû. Elles sont perdantes dans l’histoire. Leurs dossiers ont été faits par les syndicats et rentrés au fonds de fermeture, et celui-ci n’est pas encore intervenu."
Karine tombe sur une offre d'emploi surprenante
Une situation qui a plongé du jour au lendemain les 136 employés dans l'inconfort. "Tous les employés sont en dépression", témoigne Michel. Frédéric Viseur ajoute : "Pour l’instant ces travailleuses, ont soit retrouvé un nouveau boulot, soit elles ont des allocations provisoires de chômage en attendant l’intervention du fonds de fermeture."
Le magasin à La Panne qui a (r)ouvert fin juin ne devrait pas être le seul en Belgique très longtemps. A la recherche d'un nouvel emploi, Karine est tombée sur une offre avec CDD en tant que vendeuse pour un magasin… Pimkie ! Le magasin devrait ouvrir prochainement ses portes à Liège. "Nous ne sommes pas surpris. Nous avons eu aussi vent qu'ils allaient rouvrir à La Louvière. Ils reconstituent petit à petit leur réseau semble-t-il", constate Frédéric Viseur.
Nous avons interpellé le curateur
Belsay est la société belge qui gérait les magasins Pimkie dans notre pays avant la faillite. La société appartient au groupe Mulliez. Olivier Lecomte est secrétaire permanent CGSLB: "Nous n'avons plus d'interlocuteur pour cette entreprise (Belsay). Nous sommes informés de la réouverture du magasin (à La Panne). Suite à cette information, nous avons interpellé le curateur qui gère le dossier afin d'obtenir des informations supplémentaires. Visiblement, ces réouvertures se font sans informations préalables. Juridiquement, c'est Diramode qui est propriétaire de la marque "Pimkie" elle aurait donc la capacité de rouvrir des magasins. Nous avons interpellé notre service juridique sur le sujet."
Silence radio
Ancien travailleurs, syndicats sont dans le flou face à ces réouvertures annoncées ou actées et ne parviennent pas à entrer en contact avec la famille Mulliez pour obtenir des éclaircissements sur ces manœuvres. Ce qui est sûr, c'est que la marque 'Pimkie' appartient toujours à la famille Mulliez malgré la faillite du gestionnaire belge Belsay, lié lui-même au groupe Mulliez. Une nouvelle filiale a été créée du nom de SPRL PIMK.
Nous serions face à un micmac juridique, pas forcément illégal, mais qui indigne d'anciens travailleurs sur le plan moral.
Toutes nos tentatives d'interviews pour obtenir des explications de la familles Mulliez sont restées vaines. Selon les syndicats, la famille Mulliez est actuellement détentrice d’un patrimoine de plus de 24 milliards d’euros.
Taoufik Talbi
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