Marie-Noëlle et son fils Cédric, gérants d'un restaurant à Blaugies (en province de Hainaut) sont très inquiets. La possibilité de reporter le crédit de leur entreprise avait permis jusqu'à présent de tenir le coup financièrement, mais cette mesure ne pourra pas été reconduite au-delà du 31 janvier. Ils se demandent quelles solutions s'offrent à eux pour maintenir le commerce à flot.
La deuxième vague de l’épidémie de Covid-19 a entraîné la fermeture des portes des établissements horeca dans notre pays depuis le 19 octobre dernier. La mesure a un impact important sur la situation financière du restaurant Le Fourquet fondé en 2000 à Blaugies (Dour).
Depuis le début de l'année, l'inquiétude grandit un peu plus chez Marie-Noëlle et son fils Cédric, les gérants de l'entreprise, car la possibilité de reporter le remboursement de leur crédit n'est plus possible.
"Je ne peux plus prolonger le report de crédit professionnel à plus de 9 mois. Mon banquier me signale que fin janvier les prélèvements recommencent. Si la loi ne change pas, il va y avoir encore plus de drames car nos charges fixes vont exploser. Ce moratoire de 9 mois s’applique-t-il à toutes les banques?", s'interroge-t-il.
Nous sommes désespérés, nous aimerions avoir des perspectives
Les tenanciers de cet établissement qui propose de la cuisine française (avec comme spécialité les grillades), se demandent "à quelle sauce ils vont être mangés" car les perspectives financières sont floues.
"Depuis le Covid, nous avons été fermés du 14 mars jusqu’au 8 juin 2020 et puis de mi-octobre jusqu’à maintenant. Et on n’est pas prêt de rouvrir", regrette Marie-Noëlle. "Nous avons notamment reçu l'aide wallonne aux entreprises, mais ce n’est pas ça qui couvre les charges sociales, le coût de l’électricité, les assurances, etc. Jusqu’à présent, les banques nous aidaient. Nous n’avons payé que les intérêts... Mais à partir du 31 janvier, nous allons devoir payer la totalité des emprunts. Il ne sera plus question de postposer les remboursements en capital."
Marie-Noëlle aimerait savoir si d’autres dispositions pour aider l’Horeca vont intervenir dans les prochaines semaines. "Je ne sais pas comment on va faire pour s'en sortir. Nous sommes en difficulté. Nous espérons un nouveau report de crédit et pouvoir aller au-delà des 9 mois. Nous sommes désespérés, nous aimerions avoir des perspectives. C’est une catastrophe de chez catastrophe. Je ne suis pas la seule dans le cas évidemment. On essaye de rester positif car sinon je crois qu’on ferait une dépression nerveuse carabinée."
Vers la possibilité d'un nouveau report de remboursement ? On se dirige vers un "non".
Le 31 mars 2020, les ministre des Finances de l'époque Alexander De Croo (désormais Premier ministre) avait annoncé la possibilité pour les familles, les indépendants, les entreprises et les organisations du secteur non marchand, de demander un report du remboursement de leurs crédits hypothécaires et crédits professionnels de 6 mois pour faire face aux conséquences économiques du coronavirus en Belgique.
Cette possibilité de report, initialement valable jusqu'au 31 octobre, avaient ensuite été prolongée jusqu'à la fin de l'année 2020. Mais vu la demande de la population belge, le gouvernement fédéral avait finalement encore prolongé la mesure de 3 mois supplémentaires, soit jusqu'au 31 mars 2021. Depuis rien n'a changé.
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Marie-Noëlle et son fils Cédric ont fait appel à cette aide, mais la demande de report ne peut porter que pour une durée de 9 mois maximum (attention, cette durée comprend la période de report dont on aurait déjà profiter en 2020).
Alors pourquoi les banques ne peuvent-elles pas aller au-delà des 9 mois? Rodolphe De Pierpont, le porte-parole de la fédération belge du secteur financier (Febelfin) répond:
"C’est limité à 9 mois car l’autorité bancaire européenne impose ce cap maximum. En Belgique, les banques, dans le cadre du report automatique octroyé, ne peuvent pas aller au-delà", précise-t-il. "Au niveau de l’Europe, il n’y a pas de discussions pour prolonger. D’autant que la nouvelle prolongation court jusque fin mars. D’ici là, il n’y aura sans doute plus de discussions en Europe.
Et d'ajouter: "Déjà en décembre, l’autorité bancaire européenne a beaucoup discuté avant de permettre 3 mois en plus. Il y a déjà eu pas mal de mois reportés pour les particuliers et les entreprises. Si on continue, cela risque de rajouter des difficultés plus tard quand il faudra payer ces mensualités. On déclare ces mensualités, mais le problème est qu'on ne connaît pas la santé financière des entreprises. L’autorité bancaire doit donc veiller à l’équilibre et ne pas provoquer une crise, si à un moment donné, toute une série d’entreprises ne sont pas capables de reprendre leur crédit."
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Le porte-parole de Febelfin conseille à Marie-Noëlle et à Cédric, tout comme aux particuliers et aux entreprises confrontés à des problèmes financiers, de contacter leur banquier. Une solution adaptée à leur situation pourrait être trouvée.
"Une banque peut décider un report partiel ou un étalonnement dans le temps du crédit. Par exemple, un crédit prévu sur 3 ans peut être allongé à 5 ans pour diminuer la mensualité", indique-t-il. "On peut chercher des solutions dans le cadre du crédit ou d’autres formules de financement, voire l’adaptation de l’activité… pour voir si on peut maintenir l’entreprise à flots et redémarrer dans de bonnes conditions."
Rodolphe De Pierpont rappelle qu'il existe par ailleurs également des mécanismes de soutien régionaux notamment, en Wallonie, via la Sowalfin (l’outil public dédié au financement des PME). "Cet outil propose notamment des mécanismes de prêts subordonnés (en savoir plus en cliquant sur ce lien) qui permettent de garder un financement et d’envisager la reprise des activités sans avoir un trou de pousser à la faillite). Le banquier est bien entendu en mesure d’orienter vers ses solutions-à", conclut-il.
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