À 36 ans, Aurel Zola a un parcours hors du commun. Le danseur, chorégraphe et directeur artistique est monté sur scène avec des artistes internationaux. Un véritable rêve pour le Belge qui nous détaille son impressionnante carrière.
Il est 14 h lorsque nous poussons les grandes portes du domicile d'Aurel Zola. Il nous accueille chaleureusement chez lui à Bruxelles. Souriant, l'homme de 36 ans nous fait découvrir son univers. Nous nous imprégnons rapidement de l’atmosphère des lieux. Aurel Zola débute alors le récit de sa vie, riche en rebondissements.
Le danseur, chorégraphe et directeur artistique nous confie avoir dansé aux côtés des plus grands artistes internationaux. Pourtant, sa passion pour cet art a débuté "très tard", dit-il. "J'ai grandi à Anderlecht. J'ai commencé la danse à 17 ans, car des potes à moi dansaient en bas des buildings et dans les garages", se souvient l’homme de 36 ans.
"J'aimais me retrouver sur scène"
Aurel Zola fait donc ses premiers pas de danse avec ses amis qui lui apprennent les bases. "C'est là que je suis tombé amoureux du hip-hop et du breakdance." L’adolescent qu’il est alors perfectionne sa technique durant plusieurs années, encouragé par son entourage. Passionné, Aurel Zola prend des cours au New Studio Jam, une école de danse de Berchem-Sainte-Agathe. "On faisait des spectacles de fin d'année et j'aimais bien me retrouver sur scène avec d'autres élèves et danser pour un public."
"Je me suis retrouvé face à moi-même"
Ensuite, le danseur débute un cursus universitaire. Les attentes de ses parents sont très grandes. Son père, médecin, veut qu'il fasse de prestigieuses études. Mais le jeune homme commence à avoir des contrats dans le milieu de la danse et s'absente de plus en plus. Il décide d’arrêter l’université. "À un moment donné, je me suis dit que je devais faire un choix et je l'ai annoncé à mon père." Ce dernier prend très mal la nouvelle. Le père et le fils sont en désaccord, mais Aurel a pris sa décision.
Son choix a de lourdes conséquences. Il doit quitter le foyer familial. Débute alors un véritable combat. "Je me suis retrouvé face à moi-même. Je m'entraînais dans les gares avec mon groupe Final FX, on gagnait pas mal de compétitions et on commençait à avoir un nom dans le milieu de la danse."
Pour se faire connaitre, le Bruxellois poste des vidéos de lui en pleine performance sur YouTube. Les images circulent à travers l'Europe, et le danseur commence à se faire un nom. Cela lui permet de donner des cours à l'étranger.
"Je comprends que le casting est pour Beyoncé"
En 2009, sa compagne de l'époque reçoit un mail pour un casting pour les MTV Awards. "En le lisant, on s'aperçoit qu'il s'agit d'un casting pour hommes qui a lieu à Berlin. Donc j'appelle le promoteur du casting qui me dit que je peux venir mais à mes frais. Et il y a déjà une sélection".
Aurel Zola prend un billet d'avion malgré ses difficultés financières. "Je me suis dit: on ne sait jamais, je vais y aller". Le jeune Bruxellois se retrouve à ce casting avec 300 autres danseurs. Il reconnaît directement un visage... Celui du chorégraphe de Beyoncé. "Là, je comprends que c'est pour elle."
© Isopix - Beyoncé MTV Music Awards 2009
Le chorégraphe de la star explique en quelques mots ce qui va se passer. Un casting de 20 minutes va permettre de choisir 5 danseurs parmi les 300. Ils vont s'ajouter aux autres artistes qui accompagnent la chanteuse. "C'est le stress, car je me retrouve avec des danseurs qui me donnaient cours ou avec qui je suivais des formations. Je me suis dit: ça va être chaud, mais je fais le casting." À sa grande surprise, il est pris.
"C'était incroyable de partager ça"
Aurel Zola rencontre Beyoncé. Cette dernière se présente et échange quelques mots avec les danseurs. Un grand moment pour le Belge. Après les répétitions, le grand jour arrive. Il danse, avec des artistes reconnus dans le milieu, pour l’interprète de Crazy in Love lors des MTV Music Awards. "Pour moi, c'était un rêve. Mon objectif était de danser pour un artiste reconnu", avoue-t-il.
Grâce à sa performance, il est repéré par la patronne d'AMCK, une agence de danseurs basée à Londres. Cette rencontre va être déterminante dans son parcours.
À 24 ans, Aurel Zola enchaine les projets. Il danse pour de nombreux artistes célèbres dont Rihanna, Pharrell Williams, Black Eyed Peas, Akon, Shakira, Stromae, Ariana Grande, Miley Cyrus, LMFAO, Leona Lewis ou encore David Guetta. "Être proche des artistes que tu vois à la télé, ça fait toujours un truc... Quand tu les vois rentrer dans la salle de danse, que tu répètes avec eux, c'est gratifiant. J'étais très honoré d'être là."
© Instagram Aurel Zola
Aurel Zola acquiert de l'expérience. Il apprend le fonctionnement d'une production, mais aussi à travailler avec une équipe. Il fait la connaissance de danseurs venus du monde entier et se nourrit de toutes ces rencontres. "C'était incroyable de partager ça."
Son père, réticent au départ, prend conscience de l'importance de la danse dans la vie de son fils et se rapproche de lui. "J'ai demandé à mon père de venir voir un show que j'avais chorégraphié pour la chanteuse flamande Natalia. Il est venu voir le concert que j'avais entièrement créé pour elle à Forest National. Là, il a validé. Il a dit qu'effectivement, ça avait l'air d'être du sérieux", se souvient-il.
Depuis, son père le soutient dans ses projets et lui apporte son aide et ses précieux conseils lorsqu'il en a besoin. "Aujourd'hui, on s'entend très bien. On est très bons amis", se réjouit-il.
"C'est ma plus belle expérience"
À ce jour, sa plus belle rencontre dans le milieu artistique est le chanteur Akon. Aurel Zola fait la connaissance de l'artiste américain en République démocratique du Congo en 2012. "Akon était à Kinshasa, car il voulait mettre en avant des talents congolais. J'étais là pour être juge et chorégraphe dans son émission de télé. Le concours était centré sur la danse."
Aurel Zola n'a jamais mis les pieds dans le pays d'origine de ses parents. C'est l'occasion. Cette expérience de 6 mois va le transformer…
Le chanteur et le danseur font le tour du Congo pour recruter les danseurs de la compétition. Aurel Zola découvre les conditions difficiles dans lesquelles certains candidats vivent. "Cette expérience m'a vraiment touché. Je me suis dit qu'en Europe, les danseurs ont tout. Mais au Congo, ils n'ont rien et pourtant, le feu, l'énergie qu'ils ont et l'amour qu'ils donnent pour la passion... C'est incroyable."
Faire partie de cette organisation est une chance pour Aurel Zola qui profite de chaque instant et se nourrit de cette énergie. L'expérience est riche et bouleversante. "À travers moi, ils ont eu plus de foi, car je suis d’origine congolaise comme eux, même si je viens d'Europe. Ça leur a montré que tout est possible et qu'à travers l'émission, ils peuvent continuer de croire en leurs rêves."
Les danseurs congolais ont l'opportunité de danser pour Akon lors de la finale du concours, une chorégraphie créée par Aurel Zola. Un moment inoubliable pour le Belge. "C'était grand, car c'est une première ligne sur leur CV. C'est ma plus belle expérience au niveau de la danse. J'ai tourné avec des artistes dans le monde, mais ça, c'était incroyable."
Et cette émission a eu "un effet boule de neige autant pour eux que pour moi". Après le concours, l’artiste a plusieurs opportunités au Congo. Il fait à chaque fois appel aux danseurs du concours pour les différents projets sur place.
Un prix pour sa carrière
Le parcours artistique d’Aurel Zola est récompensé en 2021 lors des Golden Afro Artistic Awards à Bruxelles. Il reçoit un prix lors de cette cérémonie qui met en lumière les artistes afro-descendants. "Cet événement encourage les artistes à aller plus loin et permet au public de découvrir les artistes. Ça valorise le travail qu'on fait et ça nous connecte avec la ville de Bruxelles. J'ai été très honoré de recevoir ce prix."
Quel avenir en Belgique pour les danseurs?
Selon Aurel Zola, les opportunités pour les artistes sont limitées en Belgique, "si on compare à la France ou l'Angleterre". Dans ces deux pays, le système est très structuré avec des agences bien définies, précise-t-il. Mais en Belgique, pour sa discipline, "il n'y a pas vraiment d'agence et les danseurs sont freelances. Ils doivent se rendre visibles".
C'est à eux-mêmes d'appeler les productions et c'est toujours compliqué, affirme le danseur. "Il y a peu d'opportunités, mais je ne peux pas dire qu'il n'y en a pas du tout (…) Dans le secteur culturel, il y a pas mal de choses. Des danseurs font leurs propres créations qui sont subventionnées par l'état et ils vivent de ça." Et les opportunités sont plus nombreuses en Flandre qu'en Wallonie, constate Aurel Zola.
Mais souvent, dit-il, les artistes belges se dirigent vers la France comme Angèle ou Damso. "Quand les danseurs sont là, ce sont souvent des Français et les chorégraphes aussi." Il trouve "dommage" que les artistes belges ne fassent pas appel aux talents du pays alors "qu'il y a des danseurs et chorégraphes très professionnels ici. Il y a d'autres Belges qui ont presque le même parcours que moi".
Ses rêves
Malgré cette carrière hors du commun, le danseur a encore des rêves plein la tête. Il aimerait créer des chorégraphies pour Chris Brown ou Usher. "Très jeune, j'étais fan d'eux. Ils m'ont accompagné dans mon parcours de danseur à travers leurs chansons. J'allais voir leurs concerts, je voyais les danseurs et je me disais: 'Un jour, il faut que je sois là.
Son conseil aux jeunes danseurs
"Il ne faut pas abandonner", conseille-t-il aux jeunes passionnés par la danse. "Le chemin est dur et long, mais il faut croire en soi et en son talent. Il faut aussi être organisé." Il ajoute qu'il est important de connaître le milieu "car beaucoup d'artistes veulent danser, mais ne savent pas qui est à la tête de quoi, qui est le chorégraphe de qui. Il faut savoir ça pour pouvoir se créer des opportunités".
Il faut faire des vidéos pour se rendre visible, de belles photos et un beau CV, "même s'il n'y a pas tant de lignes que ça, mais il faut quelque chose de présentable".
Si cela est possible, "il faut beaucoup bouger aussi, prendre des cours un peu partout, que ce soit en Belgique, en France, en Hollande ou en Angleterre. Il y a pas mal de chorégraphes qui sont très actifs et donnent des cours".
Aurel Zola conseille de frapper aux portes des agences qui se trouvent à l'étranger, surtout à Londres. "Ils ont besoin de danseurs constamment et il y a de la place pour tout le monde", assure-t-il.
Le danseur-chorégraphe veut faire changer les choses dans ce secteur. Il aimerait promouvoir les artistes belges à travers une agence qu'il souhaite créer. "Une structure solide pour aider les danseurs avec les contrats, qu'ils puissent avoir un barème."
Le Belge est désormais cofondateur de la compagnie de danse Revolutionary. Il partage son savoir avec la jeune génération. À travers son parcours, il espère inspirer des danseurs et leur donner le courage de se battre pour leurs rêves. "Je leur souhaite d'aller plus loin que là où j'ai été."
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