Météo capricieuse, rendement délicat et relations tendues avec la grande distribution… les raisons ne manquent pas pour inquiéter le petit monde des producteurs de fraises de Wépion. Luc en fait partie, et a décidé d'anticiper une situation périlleuse pour son entreprise familiale (depuis 1947…), notamment en déclinant la fraise et en la livrant.
Les temps sont durs pour les agriculteurs. Météo capricieuse, prix imposés par la grande distribution, coût de la main d'œuvre… il ne faut plus grand-chose pour mettre une exploitation en danger.
Les producteurs de fraises sont logés à la même enseigne. Luc Wazner a contacté la rédaction de RTL info via notre page Alertez-nous pour nous faire part de son initiative originale, basée sur la diversification. Car depuis quelques années, comme la plupart des agriculteurs, Luc doit diversifier ses activités pour survivre.
"On essaie de toucher les gens de plus en plus directement", a expliqué ce producteur des célèbres fraises de Wépion, qui a mis en place une idée très originale: livrer à domicile les fraises (et des repas avec des fraises) dans la région.
Pourquoi la récolte a été mauvaise cette année ?
Avant d'expliquer la démarche audacieuse de Luc, revenons sur les causes de la mauvaise récolte de fraises en 2016.
"C'est un problème de rendement, tout d'abord", poursuit l'un des cinq producteurs de fraises de Wépion. "Les plantes n'ont pas eu assez de dormance, c'est-à-dire qu'il n'a pas fait assez froid durant l'hiver dernier. On dit que les plantes doivent 'dormir' durant 700 heures, et pour cela il faut des températures comprises entre 0 et 4°. Mais il a fait trop chaud". Le résultat, c'est que les fraisiers donnent un moins bon rendement que d'habitude. "C'est comme nous, si on ne dort pas 8h durant la nuit, on n'est pas en forme", plaisante Luc.
A cela s'ajoute une mauvaise météo au début de l'été ("il y a eu beaucoup trop d'eau au mois de juin"), et vous avez ce qu'on appelle "une mauvaise récolte". Ce qui signifie concrètement une baisse de rendement de 30% pour Luc.
Enfin, ce qui n'aide pas non plus, c'est la distribution. "Aujourd'hui, les grandes surfaces ne vendent plus au prix juste. Elles veulent des marges allant jusqu'à 60%, alors qu'en 1992, c'était souvent 30%".
Une entreprise qui existe depuis 1947: c'était mieux avant ?
Dans la famille de Luc Wazner, on produit des fraises de Wépion depuis 1947. Des mauvaises années, ils en ont vu d'autres, même si avec le temps, le métier a changé.
"Avant, on cultivait d'autres variétés, mais ce qui est le plus différent, c'est l'utilisation de produits chimiques. On met environ 75% de produits en moins ! Les fraises sont de plus en plus propres, car on incorpore les insectes et les prédateurs. Il n'y a plus d'insecticides, on met juste des fongicides pour éviter le pourrissement".
Mais être plus 'écolo', cela implique aussi d'avoir "plus de risque dans les rendements". Avec moins de produits chimiques, on l'imagine, les récoltes sont moins stables, même si Luc insiste: "c'est surtout la météo qui joue".
Luc présente ses nouveaux produits à base de fraise, et son idée de livraison de repas
Des initiatives pour survivre
Luc n'est pas du genre à s'apitoyer sur son sort, et a déjà commencé à diversifier ses activités il y a quelques années. L'hiver, il vend des sapins de Noël.
Mais pour faire face aux mauvaises conditions du marché de la fraise, qu'elles soient climatiques, écologiques ou économiques, notre producteur a mis sur pied de belles initiatives.
Tout d'abord, le week-end dernier, il a fait des journées portes-ouvertes. "On a vendu 500 kg de fraises. C'est vraiment beaucoup pour une vente de ce type". Le prix va vous paraitre très raisonnable pour d'authentiques fraises de Wépion: "2,5€ pour le ravier de 500 grammes". C'est nettement moins qu'en grande surface, preuve que les gérants sont en effet assez gourmands au niveau des marges.
Des fraises à domicile et… de la soupe
Autre initiative pour le moins originale: la livraison de fraise à domicile. "On livre de Wavre à Dinant, mais à partir de 4 kilos de fraise".
Luc estime également que le consommateur ne se contente plus de simples fraises. "Avec une voisine qui adore cuisiner, et un employé, on prépare des repas entiers, avec certains mets contenant des fraises. La semaine passée, on a fait du cake aux fraises, des tartelettes, et même de la soupe de fraise, qui a cartonné, tout est parti rapidement".
Si Luc réussit son pari de "toucher les gens plus directement", à travers des ventes directes, des journées portes ouvertes ou des livraisons de repas, il pourra continuer son activité.
Qui ne s'annonce pas spécialement meilleure pour 2017. "L'induction florale ne semble pas très bonne. Il fait trop chaud, et au microscope, si on regarde juste en dessous du collet, on voit qu'il n'y a pas beaucoup de graines. C'est mal parti, en tout cas…".
En attendant "une année normale au niveau de la météo – mais c'est devenu rare", Luc va donc devoir redoubler d'imagination…
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