Housni s'est rendu à l'hôpital Delta pour y effectuer un test du sommeil. Il est tombé des nues lorsqu'il a reçu la facture. Qu'est ce qui explique un total de près de 2.300€? Pourquoi prendre une chambre privée donne le droit à l'hôpital de faire gonfler la facture?
Depuis plusieurs années, la femme d'Housni subit ses ronflements. Son médecin lui a dès lors conseillé de réaliser un test du sommeil mais il a longtemps repoussé l'idée. Mi-novembre il décide finalement de se lancer. Il se rend à Delta pour passer son test. Le 04 janvier, il reçoit la facture et est outré par le montant, c'est ce qu'il l'a fait cliquer sur le bouton orange "Alertez-nous".
"1.200€ à charge de la mutuelle et 1.090€ à charge du patient. Ca fait presque 2.300€ alors qu'on m'a juste connecté à des fils. Ils n'ont rien fait d'autre!", s'insurge-t-il. Housni a essayé de contacter le service des réclamations de l'hôpital mais il reste injoignable. "J'ai une assurance complémentaire donc je ne devrai pas tout payer. Ce n'est pas pour ça que je suis choqué. Je ne comprends juste pas ce qui justifie ce prix", nous explique-t-il après avoir contacté la rédaction de RTL info via le bouton orange Alertez-nous.
Qu'est-ce-qui justifie ce prix?
Dans la facture d'Housni, une colonne suffit à faire gonfler le total: "supplément". Au total 1.011,97€ ont été ajoutés à sa facture parce qu'il a pris une chambre privée. D'où vient ce surplus ?
Une membre du service estimation de l'hôpital Delta nous a donné quelques explications: "Une chambre privée, c'est considéré comme du luxe, la loi autorise donc une augmentation du tarif. Cette augmentation est fixée par le chirurgien et peut atteindre 300% du prix d'une chambre commune". À Delta vous avez deux types de chambres privées: les chambres privées normales et supérieures. "Dans les chambres privées supérieures vous avez droit à un sèche-cheveux, une machine à café, le mobilier est de meilleure qualité…", nous a expliqué notre interlocutrice.
Pour être placé en chambre privée, le patient doit signer un papier d'admission
Selon le Dr Philippe El Haddad, directeur général médical du Chirec, l'hôpital ne peut légalement pas majorer le prix d'une chambre commune ou à lit double. De plus, l'hôpital ne peut pas placer un patient dans une chambre privée sans son accord : "Pour être placé en chambre privée, le patient doit signer un papier d'admission certifiant qu'il a été mis au courant du prix plus élevé de cette chambre", nous a-t-il expliqué.
"1.200€ à charge de la mutuelle"
Housni a aussi été choqué par le montant qui doit être pris en charge par sa mutuelle : "1.200€ à charge de la mutuelle, je sais que ce n'est pas moi qui paie mais je trouve ça énorme", nous a-t-il expliqué.
Ici la tarification est encore différente, elle n'est pas fixée à l'appréciation du chirurgien mais par l'INAMI (Institut National d'Assurance Maladie-Invalidité). Chaque prestation reprise dans la facture correspond à un code dans la nomenclature de l'INAMI. Ce code donne le prix de la prestation ainsi que ce qui doit être couvert par la mutuelle obligatoire.
Par exemple, parmi les différentes prestations reprises sur la facture d'Housni on retrouve son test du sommeil. Ce dernier est référencé sous le code 477385. Ce qui nous permet de comprendre que depuis le 01 janvier 2022, ce test coûte 253,36€ et est entièrement à la charge de la mutuelle.
Vérifiez votre paperasse
Attention: vous l 'avez sans doute compris, mais si vous n'avez pas d'assurance hospitalisation (c'est le cas de nombreux Belges) ou pire (c'est plus rare) si vous n'êtes pas en règle avec votre mutuelle, ce sera à vous de payer tous ces frais.
C'est ce que nous a expliqué Nathalie Swaeles, collaboratrice de la direction des établissements et services de soins de l'INAMI: "Pour les patients qui ne sont pas en règle avec leur mutualité ou qui ne sont pas inscrits en Belgique auprès d’une mutualité, l’hôpital facture tout au patient". Et si ce patient non affilié a opté pour une chambre simple, ce sera donc 2.300€ pour une nuit de surveillance du sommeil.
!!! Mise à jour du 27-01 !!!
Après publication de notre article, plusieurs personnes bien informées ont contacté la rédaction de RTL info. Une source anonyme nous a contactés pour nous informer que, selon elle, l'hôpital Delta ne respecte pas les règles en ce qui concerne les test du sommeil: "Il est stipulé dans la convention de l'INAMI que le laboratoire du test du sommeil doit être dans une unité fonctionnelle séparée. Elle ne doit donc pas être associée à une unité de jour. Je sais que ce n'est pas respecté à Delta et que les patients sont réveillés à 7-8h du matin par les patients de jour qui arrivent." Dans la convention de l'INAMI, cette mesure est expliquée comme suit: "Ces chambres doivent permettre qu'un patient puisse avoir le ses heures de sommeil normales, stipulées comme étant 8 heures de sommeil, ces chambres ne peuvent pas être utilisées, pendant les heures de travail normales, à d'autres fins (par exemple, pas d'utilisation simultanée comme hôpital de jour)".
Nous avons aussi été contactés par un courtier spécialisé en assurances hospitalisation qui nous a fait part de sa stupeur à la lecture de notre article: "Dans le cas d'un test du sommeil, la pathologie impose une chambre seule pour une raison médicale. En effet, il n'est pas possible d'observer un trouble du sommeil si l'on place deux ronfleurs ensemble, par exemple". Légalement, un hôpital ne peut pas facturer une chambre privée à un prix majoré si ce type de chambre est imposé pour des raisons médicales comme c'est le cas pour un test du sommeil. Cependant, Housni nous a affirmé que le pneumologue qui lui a conseillé de faire un test du sommeil l'a fortement encouragé à prendre une chambre privée: "Il m'a dit: vous comprenez, une chambre privée serait mieux car dans une chambre commune, si vous êtes avec un autre ronfleur on ne pourra pas analyser correctement votre sommeil".
Le courtier nous a donc affirmé que la seule façon pour l'hôpital d'avoir pu faire payer une chambre privée à Housni, c'est de lui avoir proposé deux types de chambre privée. "Ce n'est pas très correct de la part de l'hôpital (qui a surement poussé pour ce type de chambre quand le client a signalé avoir une assurance)", nous a-t-il écrit.
Comme nous l'a expliqué la membre du service estimation de Delta, dans les chambre privées 'de luxe', le patient a droit à une machine à café, un sèche-cheveux et un mobilier de meilleure qualité. Housni nous a cependant affirmé, photo de sa chambre à l'appui, qu'il n'avait aucune machine à café. Pour le sèche-cheveux, comme il n'en a pas l'utilité, il nous a avoué ne pas y avoir fait attention et il est donc incapable de nous affirmer avec certitude s’il y en avait un ou pas dans sa chambre.
Nous avons recontacté la porte-parole du Chirec pour obtenir des explications sur cette situation. Cependant, nous n'avons pas obtenu de réponse.
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