Une mère de famille a contacté la rédaction de RTL info car elle n'a pratiquement pas pu se rendre dans le célèbre parc d'attractions. Fermeture covid, fermeture inondation, et désormais covid safe ticket: 2021 ne fut pas très rentable pour son investissement de 340€. Elle réclame un remboursement: Walibi a-t-il le droit de le refuser ? D'autres secteurs ont-ils fait d'autres choix ? Nous avons mené l'enquête.
Le covid safety ticket (CST), plus compréhensible sous l'appellation pass sanitaire, continue de faire couler beaucoup d'encre. Les régions (Bruxelles, Wallonie, Flandre) peuvent décider d'en imposer l'utilisation dans certains lieux publics, ou dans certaines circonstances. Et elles l'ont fait.
Résultat: certaines personnes, non vaccinées, se retrouvent dans l'embarras. Nous avons déjà parlé de celles et ceux qui ne peuvent pas, pour des raisons médicales, se faire vacciner ; des solutions plus ou moins pratiques leur sont proposées: voir notre dossier.
Mais si les raisons sont différentes (un choix de ne pas se faire vacciner), le même problème se pose, et c'est le cas pour plusieurs personnes qui ont contacté la rédaction de RTL info. "J'ai acheté trois billets il y a plus d'un an pour le Air Games Charleroi 2021. Montant total: 120€ !", nous a écrit Didier, non vacciné, et qui a tenté de se faire rembourser. "Et la seule réponse reçue des organisateurs, c'est d'essayer de revendre ces tickets par moi-même". Il "trouve cela honteux car ils auraient pu reporter une fois de plus l'événement, je ne suis pas responsable de leur choix et ils doivent donc l'assumer", estime-t-il.
Un autre témoin nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous. "J'ai des abonnements pour toute la famille, pour le parc de Walibi. Et après les fermetures d'avril et les inondations de juillet, on apprend qu'à partir du 16 octobre il faut le pass sanitaire", nous a écrit Khadija.
Où en est-on avec le 'pass sanitaire' ?
Des choix ont été faits par les autorités politiques, et on peut les résumer de la sorte: les Wallons et les Bruxellois âgés d'au moins 16 ans devront montrer leur code QR dans les restaurants et cafés, dans les salles de sport, les salles de fêtes et de congrès, ainsi que dans les lieux culturels ou encore les boîtes de nuit. Cette règle est déjà entrée en vigueur, ou va l'être incessamment (15 octobre à Bruxelles, 1er novembre en Wallonie). C'est également valable pour les parcs d'attractions, dont Walibi.
Rappelons que le code QR de votre pass sanitaire (uniquement via l'application désormais) sera 'vert' si vous êtes complètement vacciné, si vous avez un test PCR négatif datant de 72h maximum, ou si vous êtes en 'rétablissement' (vous avez eu le covid, confirmé par un test, dans les 6 mois précédents).
5 pass saisonniers, 340€
Khadija, qui habite non loin d'Enghien, est une habituée de Walibi. "J'ai acheté 5 abonnements en février 2021", nous explique cette mère de famille. "C'est la 4e année qu'on le fait, et mes quatre enfants, qui ont 16, 14, 10 et bientôt 8 ans, adorent". En moyenne, "on s'y rend une quinzaine de fois par saison". Notre témoin a pris "les pass à 85€. A partir du 4e et du 5e, c'est moitié prix. Donc j'en ai eu pour 340€" pour une année, à savoir de début avril à début novembre.
Mais 2021 a été particulier à plus d'un titre. "Il y a eu la fermeture du mois d'avril suite aux mesures sanitaires du gouvernement. Ensuite, on a profité de la réouverture pour y aller en mai et en juin, uniquement quelques week-ends. Et puis, on a appris malheureusement la catastrophe naturelle du 14 et 15 juillet…".
Bref, jusqu'à présent, la famille de Khadija "n'en a pas profité beaucoup, en tout et pour tout, on a été 4 ou 5 fois", même si c'est "la faute à pas de chance". Mais concernant la suite, elle ne voit pas les choses du même œil.
"Même si je décide de me faire vacciner"…
La suite, c'est une histoire en deux temps. "On était très heureux d'apprendre par email que le parc allait rouvrir le 3 octobre", après avoir réparé ce qui devait l'être, Walibi ayant été complètement sous eaux pendant quelques jours. Mais la joie fut de courte durée: "Juste après, on a reçu un deuxième email, nous annonçant qu'à partir du 16 octobre, pour accéder au parc, il faut être en possession du covid safe ticket".
Et c'est un problème pour Khadija car "moi et toute ma famille, nous ne sommes pas vaccinés… Je ne suis pas contre, mais j'attends". Un choix personnel dont elle ne doit pas se justifier, mais qui commence à avoir des conséquences. De toutes façons, pour notre témoin, c'est déjà trop tard. "Même si on décidait de se faire vacciner (cela ne concernera que Khadija et son aîné qui a 16 ans, pas les plus jeunes), ce serait impossible de profiter du parc jusqu'au 6 novembre", soit la fin de la période d'Halloween, qui marque la fermeture 'hivernale' du parc. Il faut effectivement fixer quatre rendez-vous (deux par personnes…) tout en patientant quelques semaines entre les doses. "C'est frustrant... Pourquoi nous, on ne peut pas y aller ?". Faire des tests PCR pour obtenir un pass sanitaire temporaire ? "Pourquoi faire, franchement ? Ça ne me protégerait même pas si les personnes vaccinées dans le parc sont positives !"
Cette mère de famille a donc essayé de se faire rembourser, même en partie, les pass dont elle n'a pas beaucoup profité cette année. "Le service client refuse de me rembourser car soi-disant les conditions Walibi ne permettent aucun remboursement". Le parc estime "que je dois me faire vacciner (un peu tard, on vient de le dire) ou tester à mes frais, avant chaque visite du parc".
Comment se justifie Walibi ?
"Il n'y aura pas de remboursement suite à l'annonce de la mise en place du covid safe ticket", nous a confirmé Justine Dewil, porte-parole de Walibi Belgium. "Les décisions ont été annoncées il y a quelques jours, elles viennent du gouvernement wallon, et Walibi doit les appliquer".
L'entreprise belge a prévu le coup dans ses conditions générales, qu'on accepte en souscrivant à un pass ou même en achetant un ticket. "Il y a dans le règlement du parc, une clause qui indique que la direction s'octroie le droit d'appliquer toutes les règles nécessaires pour garantir la sécurité des visiteurs".
Ce n'est pas une question de choix de santé, de choix de se faire vacciner ou pas. "Le CST, ce n'est pas la vaccination. Ce sont trois preuves, donc il y a aussi le test négatif et le rétablissement. Tout le monde est le bienvenu à condition de pouvoir démontrer une de ces trois preuves".
Le contrôle du CST n'est pas forcément une bonne nouvelle pour Walibi. "Il va engendrer une installation en plus à nos entrées. Mais d'un autre côté, ça va permettre de pouvoir garantir la sécurité de tous nos visiteurs dans le parc. Et de retrouver un parc un peu comme avant, sans masque et sans jauge: tout le monde sera le bienvenu…"
Qu'en pense une avocate spécialisée ?
Vanessa Peharpré est avocate au barreau de Bruxelles. Elle analysé le cas de Khadija, et elle confirme qu'il y a "très peu de possibilité pour elle de se faire rembourser". Les raisons sont assez évidentes: "Walibi a prévu dans ses conditions générales que, quel que soit leur mode d'acquisition, les tickets et les pass ne sont ni échangés, ni remboursés"; y compris "si le ticket ou le pass ne peut pas être utilisé par son acquéreur". En d'autres termes, "si la personne ne peut plus se rendre au parc", peu importe la raison, "elle ne peut pas être remboursé, même en partie".
N'oublions pas que "le CST est une mesure gouvernementale qui est imposée, c'est une obligation sanitaire", et non un choix de Walibi, rappelle l'avocate.
"De plus, on ne peut pas considérer (l’absence de vaccination) comme un cas de force majeure, car le consommateur a le choix de de se faire vacciner ou de faire un test PCR".
"Dès lors", selon cette avocate, "Walibi remplit ses obligations légales". Cependant, "beaucoup de gens estiment que c'est discriminatoire, et moi aussi je me pose des questions sur la légalité du CST – mais il ne faut pas faire retomber ça sur les entreprises elles-mêmes".
Dans les centres sportifs de l'Adeps, "on prolonge"
Même si cette avocate vient de nous prouver que Walibi a raison (d'un point de vue juridique), d'autres responsables ont d'autres visions du problème. C'est le cas du directeur du service général des centres sportifs de l'Adeps. "Pour certains sports, certaines activités hebdomadaires, nous fonctionnons avec des cycles", c'est-à-dire avec un genre d'abonnement annuel, un peu comme Walibi.
Avec l'imposition du pass sanitaire, Yves Polomé voit déjà arriver les problèmes. "Si les abonnés ne sont pas vaccinés, ils devront faire des tests PCR avant chaque cours. Ce n'est pas possible. Il y a déjà des tensions, et une agressivité qu'on commence à vivre". De plus, le contrôle du pass sanitaire aura un coût, "même si les conditions et les procédures ne sont pas encore claires, un agent de sécurité, c'est 9.000€ par mois".
Dès lors, les centres sportifs ont pris la décision d'envoyer un email à ceux qui sont concernés, leur annonçant la 'bonne nouvelle': leurs séances peuvent être reportées à l'année prochaine. "L'absence de remboursement étant malheureusement confirmée, nous avons obtenu, pour les adultes (+16 ans) empêchés de participer à leur cycle, de reporter les séances perdues au trimestre suivant grâce à une carte de sport".
Pour Yves Polomé, cette décision se justifie par "l'importance de pouvoir continuer la pratique du sport", plus que nécessaire dans cette période parfois compliquée que nous traversons.
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