Voilà trois ans que Maud travaillait en tant qu'assistante maternelle dans une école communale de Péruwelz. Mais son contrat est arrivé à échéance et il est impossible de le prolonger. La trentenaire exerçait sous le régime PTP (Programme de Transition professionnelle) qui permet de réinsérer des personnes sans emploi. L'école s'est mobilisée pour lui témoigner son affection dans une vidéo publiée sur Facebook.
"Tout le monde voudrait qu'elle reste tant elle est formidable." "Elle", c’est Maud, une assistante maternelle d’une école communale à Péruwelz dans le Hainaut. Une personne touchée par la situation a souhaité attirer notre attention sur son cas via la page Alertez-nous. Maud, maman de 34 ans originaire de Bernissart était dépitée en cette fin d’année scolaire. Son contrat dans l’école communale de la Roë (Péruwelz) est arrivé à terme après trois années de service.
"Merci aux loulous"
Les enfant lui ont adressé une chanson d'adieu. Une surprise pour l'assistante à qui la collègue avait bandé les yeux et en face de qui les enfants s'étaient placés. L'émotion a submergé la trentenaire qui a fondu en larmes. La scène a été filmée et la vidéo (voir au bas de l'article) déposée sur la page Facebook de l'école. "Merci pour cette magnifique surprise. Merci aux loulous qui sont des champions. Je ne vous oublierai pas. A jamais dans mon cœur!", a écrit Maud.
Au départ, une situation qui ravit tout le monde
La direction de son école est sensible mais impuissante face à la situation. Maud travaille sous le régime PTP (Programmes de Transition professionnelle). Ce programme permet l'engagement dans le secteur non-marchand de chômeurs complets indemnisés ou d’ayants droit à l'intégration sociale ou d’ayants droit à une aide sociale financière. En gros, le but est de réinsérer des personnes dans le monde du travail.
"La personne continue d’être considérée comme chômeuse, car elle perçoit des indemnités par sa caisse d’allocation", indique Isabelle Dubois du SPW (Service public Wallon). Mais la personne reçoit un supplément par l'intermédiaire de son employeur (dans ce cas-ci la commune de Péruwelz) qui reçoit lui-même le subside de la Région wallonne via ce programme PTP. Chacun s'y retrouve. D’une part, le chômeur acquiert de l’expérience durant la durée du contrat (deux, voire trois ans sous une certaine condition (1)). D’autre part, l’employeur perçoit des subsides et ne doit rien sortir de sa poche.
La fin d'une histoire
Retour en arrière. En mars 2012, Maud est au chômage depuis un an. Elle a une expérience de plusieurs années en tant qu’éducatrice avec des personnes handicapées, mais peine à retrouver un emploi. Elle remplit les critères pour l’obtention "d’un passeport PTP" octroyé par le Forem. Et c’est un poste d'assistante maternelle qui va s’offrir à elle au sein de l’école communale de la Roë. La commune de Péruwelz, dont elle dépend, perçoit des subsides du SPW (Service Public Wallon) pour pouvoir engager une personne en programme PTP. De mars 2012 à aujourd’hui, Maud va remplir cette fonction "avec joie" et donner satisfaction à la direction de l'école: "C’est une personne formidable. Quand je pense qu'on va perdre quelqu’un comme elle...". Le 30 juin, le PTP de Maud prend fin. Elle arrive au plafond des trois ans de ce régime. "Je suis perdue. La vidéo me fait plaisir, mais en même temps ça fait mal au cœur. Les enfants sur la vidéo sont de troisième maternelle. Quand je suis arrivée en 2012, ils étaient en première maternelle. Je les ai suivis durant trois ans."
PTP ou APE, quelles différences?
Maud est amer, car, pour elle, sa commune pourrait l’engager par l'intermédiaire d'un autre programme: les points APE. Les Aides à la Promotion de l'Emploi (APE donc) consistent à octroyer sous la forme de points, une aide annuelle visant à subsidier partiellement la rémunération de travailleurs. Elles permettent aussi une réduction importante des cotisations patronales de sécurité sociale(2) et une indexation automatique du montant de la subvention selon l'évolution de l'indice des prix à la consommation pour l'employeur. Cette aide est accordée par le SPW afin de favoriser l'engagement de demandeurs d'emploi.
La personne qui bénéficie des points APE n'est pas considérée comme chômeur à l'inverse du programme PTP. "La personne qui bénéfice d’un contrat APE, est employée. Elle a un contrat de travail classique, elle cotise, ce n’est pas un sous-contrat" explique Pierre Dohet, conseiller sur les dispositifs de l'aide à l'emploi au Forem, alors que "les PTP, ne sont pas des points mais une subvention donnée" précise Laetitia Pifflet du SPW.
Mais la grande différence, au regard de la situation de Maud est que les points APE peuvent être renouvelés de manière indéterminée à l’inverse des PTP qui, eux, rappelons-le, ont une durée de trois ans maximum.
"Impossible pour nous d’engager Maud via les points APE"
Maud pourrait-elle prétendre à ce passeport APE ? La réponse est oui. "Une personne qui a été PTP deux voire trois ans peut obtenir sans aucun souci un passeport APE. Il est établi en fonction d’un tableau à double entrée qui est d’une part le degré d’éloignement(3) du chômage et d’autre part le niveau d’études. En fonction de cela, une matrice est calculée qui vous donne accès à un nombre de points", informe Laetita Pifflet. Exemple, plus vous êtes demandeur d’emploi depuis longtemps, plus vous pouvez éventuellement profité de points. Un jour de chômage suffit pour se porter candidat au passeport APE. Mais malheureusement, les points sont déjà pris par d'autres à Péruwelz. "Impossible pour nous d’engager Maud via les points APE. Nos points APE sont utilisés pour d’autres fonctions au sein de l’administration (NDLR: trois puéricultrices et une psychomotricienne)" nous expose Sophie Deghilage, chargée de communication à l’administration communale qui est au courant de la situation de Maud.
Une remplaçante à Maud sera trouvée
La commune de Péruwelz, au courant de la situation de Maud, invoque un manque de budget. "Le contrat arrivant à échéance, le seul moyen aurait été de l'engager sur fonds propre donc à charge de la commune. Ce n’est vraiment pas possible. Nous n’avons pas de quoi engager Maud sur fonds propre. Même avec les points APE, nous aurions dû utiliser une partie de notre fond propre pour payer ce poste. Avec le programme PTP, rien ne sort de notre poche. C'est le choix qui est posé." Pour la commune, il n'y a pas de quoi s’alarmer pour ce qui est de l’encadrement des maternelles de l'école communale l'an prochain sans Maud. "Ils auront droit à une nouvelle assistante maternelle, sous le régime PTP à nouveau."
Une confusion inutile
La Ville se dit désolée d’une telle situation. "La compétence de cette personne n’est pas remise en cause. Au contraire, c’est quelqu’un qui a donné entière satisfaction. Elle est d’ailleurs réengagée dans le cadre des plaines de vacances pendant le mois de juillet." L’administration communale regrette la confusion créée par la mise en ligne de cette vidéo sur Facebook. De nombreux parents ont pointé du doigt dans leurs commentaires sur Facebook la Ville sans connaitre les tenants et aboutissants des contrats APE et/ou du programme PTP. "La vidéo en elle-même est très mignonne et émouvante. C’est adorable. Ce qui est plus embêtant, c’est la confusion qui peut être faite par des parents derrière. La vidéo donne l’impression que c’est la commune qui a écarté la personne. Ça crée un échauffement des esprits dans les commentaires de la vidéo alors que la Ville n’est pas du tout fermée à l’explication", conclut Sophie Deghilage.
"Je veux profiter à fond des derniers instants avec les enfants"
Prochaine étape du dossier, la Ville souhaite entrer en contact avec les parents qui le souhaitent afin que le contexte global de la situation soit exposé. "S’il y a un souhait des parents d’exprimer leur mécontentement ou leur attente. Il n’y a pas de souci. Nous ne sommes pas dans une tour d’ivoire." En attendant, Maud souhaite profiter un maximum des enfants jusqu’au bout. "Je ne cherche pas de boulot ailleurs pour le moment, car je veux profiter à fond des derniers instants avec les enfants. Après oui, je rechercherai ailleurs..."
(1) Uniquement si la personne habite une zone où le taux de chômage dépasse les 20%
(2) Sauf en secteur marchand
(3) Soit un jour, soit moins de deux ans, soit plus de quatre ans
Vos commentaires