Le gouvernement fédéral est parvenu à boucler son budget, réalisant 3 milliards d'économie pour maintenir le déficit budgétaire en 2016 et 2017 à 1,2%. Les dossiers délicats, comme l'impôt des sociétés, la taxation des plus-values et la mobilisation de l'épargne belge ont été retardés. À peine annoncée, les mesures sont déjà sous le feu des critiques de l'ensemble de l'opposition et des syndicats. De quoi faire repartir la contestation sociale de plus belle.
"Après une semaine de négociations difficiles, le gouvernement Michel accouche d'un budget qui fait porter les deux tiers de l'effort budgétaire sur la sécurité sociale et la fonction publique", déplore par voie de communiqué samedi Elio Di Rupo, président du PS. Pour ce dernier, le budget porte "la marque de la N-VA".
PS: "Il détricote encore la sécurité sociale"
Ce budget "fait payer les plus faibles, mais en plus il détricote encore davantage la sécurité sociale, qui garantit la solidarité entre tous les Belges". Le président du parti socialiste regrette que la réponse apportée par le gouvernement aux licenciements collectifs de ces dernières semaines soit de "dissuader fortement les prépensions en les rendant plus chères pour l'employeur".
M. Di Rupo déplore encore la diminution de l'enveloppe bien-être et les économies qui touchent les soins de santé. "Après avoir augmenté le coût de la consultation chez le médecin spécialiste, le gouvernement MR/N-VA veut augmenter le coût des antibiotiques. Il nous dit que c'est pour éviter la surconsommation. Mais ce sont les médecins qui prescrivent les antibiotiques! Les patients, eux, n'auront d'autre choix que de payer plus." "Ce gouvernement reste, comme nous le dénonçons depuis le début, fort avec les faibles, et faible avec les forts".
PTB: "Il ne devra pas s'étonner d'une reprise de la résistance sociale"
"Si le gouvernement a décidé de faire sauter dans les faits la concertation sociale sur les salaires, le marché du travail, les pensions, l'e-commerce, il ne devra pas s'étonner d'une reprise de la résistance sociale", met en garde le porte-parole du PTB Raoul Hedebouw. "Ce gouvernement n'est et ne sera jamais le gouvernement de la justice fiscale, mais bien de l'injustice sociale", juge-t-il.
"Quand il s'agit de faire contribuer les plus riches, on reporte à plus tard. Quand il s'agit de faire payer les travailleurs, on applique la décision immédiatement", dénonce le parti du travail de Belgique. Il n'y a même plus aucune trace dans le budget d'une taxe sur les plus-values sur actions, ce qui constituait prétendument un point de rupture pour le CD&V, observe le PTB, qui réclame de son côté une taxe des millionnaires.
Le parti d'extrême gauche regrette par ailleurs que les personnes malades devront à l'avenir payer davantage. Alors que la ministre de la Santé publique Maggie De Block a évoqué "des économies au scalpel fin" en ce qui concerne la sécurité sociale, le PTB parle lui plutôt d'économies à la hache en raison du montant qui atteint 900 millions d'euros.
Le PTB critique également le fait que le temps de travail par semaine pourra être allongé jusqu'à 45 heures. "Ce n'est pas une modernisation du 21e siècle mais une dérégulation du marché du travail qui nous ramène vers le 19e siècle. Et la nouvelle loi sur le travail sera présentée un dimanche à la Chambre, et c'est là bien plus qu'un symbole", commente encore le porte-parole du PTB.
cdH: "Un exercice comptable minimaliste à nouveau sur le dos des citoyens"
Le groupe cdH à la Chambre qualifie samedi l'accord sur le budget fédéral survenu vendredi soir de "minimaliste, pressé in extremis par les délais européens, et sans ambition". "Les réformes structurelles porteuses d'emploi sont mises au frigo: rien sur l'impôt des sociétés, rien sur la mobilisation de l'épargne, rien sur le plan d'investissements publics de relance", déplore le groupe cdH.
"Depuis deux ans, ce gouvernement fait payer aux citoyens, aux familles et à la classe moyenne les décisions qu'il a lui-même prises. Il ne cesse de les sacrifier et sans le moindre résultat sur les plans sociétal, économique ni même budgétaire", poursuit le communiqué. Le groupe cdH dénonce tout particulièrement les coupes dans les soins de santé, signe d'un "manque total de considération" pour les patients et les familles. De plus, ce gouvernement fait fi des partenaires sociaux et prend seul des décisions lourdes de conséquences.
Ecolo: "Tout ce cinéma pour un tel résultat?"
Pour les Verts, le budget approuvé vendredi soir par le Premier ministre et les vice-Premiers ministres du gouvernement fédéral est une "énorme déception". "Pourquoi un tel cinéma jeudi si c'est pour revenir à ce qui était connu et qui ne répond pas aux défis qui nous font face?", déplore samedi Jean-Marc Nollet, chef de groupe Ecolo à la Chambre.
"De nouvelles économies, de nouvelles factures, ça, c'est décidé, mais en terme de justice sociale, c'est le grand vide qui s'approfondit. Charles Michel relance même la très mauvaise habitude initiée par le gouvernement Di Rupo de réduire l'enveloppe bien-être. (...) Notre pays mérite mieux." Selon Jean-Marc Nollet, Charles Michel et le MR se sont une nouvelle fois "couchés devant la N-VA". "La majeure partie de l'effort est réalisée dans la sécurité sociale. Comme à l'habitude, la majorité aura été dure avec les malades, les retraités, les plus précarisés, et faible face aux multinationales et aux plus nantis." Ecolo veut continuer à mettre la pression sur le gouvernement et invite également la société civile à poursuivre ses efforts. "Le gouvernement ne pourra pas éternellement nager à contresens de l'histoire et des légitimes revendications", conclut Jean-Marc Nollet.
Syndicat libéral: "Le gouvernement penche à nouveau en faveur des grandes fortunes"
"Le gouvernement roule toujours pour les grandes fortunes et les employeurs", estime samedi le syndicat libéral CGSLB, à l'issue de l'accord sur le budget fédéral intervenu vendredi soir. "Les travailleurs et les allocataires sociaux font les frais de l'opération, que ce soit dans les économies, les nouvelles rentrées, les réformes du marché du travail ou de la norme salariale définie par la loi du 26 juillet 1996".
"Je voyais bien les nuages noirs s'amonceler à l'horizon, mais là c'est un ouragan qui s'abat sur nous", réagit Mario Coppens, président national. "La taxation des plus-values nécessite encore une analyse poussée tandis que la réduction de l'impôt sur les sociétés serait exécutée d'un coup de cuillère à pot. Tout cela est tellement révélateur de la manière discriminatoire dont le gouvernement traite deux composantes de la société".
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