Le gouvernement fédéral est parvenu à trouver un accord dans le dossier de la réforme des pensions, a annoncé mardi peu après minuit le Premier ministre, Alexander De Croo.
Ces nouvelles mesures s'inscrivent dans le cadre de la réforme du système des pensions mise en œuvre depuis le début de la législature, aux côtés notamment de la revalorisation de la pension minimum à 1500 euros nets en 2024 (hors index et enveloppe bien-être), de la suppression du coefficient de correction pour la pension des indépendants, de la réforme de l'allocation de transition ou encore du relèvement du plafond de calcul de la pension légale.
L'un des points les plus compliqués des longues négociations qui ont débouché sur cet accord portait sur l'accès à la pension minimum, que le gouvernement fédéral a déjà revalorisée. Pour la première fois en Belgique, celui-ci est soumis à une condition de travail puisqu'il faudra dorénavant 20 ans de carrière effective, à minium 4/5ème temps, pour y accéder.
Seulement pour ceux qui auront 55 ans en 2024
Aucun travailleur qui a 60 ans ou plus aujourd'hui ne devra remplir de condition de travail effectif. Le régime des 20 ans s'appliquera pour les gens qui auront 55 ans en 2024.
Plus de 758.000 personnes touchaient une pension minimum au 1er janvier 2022, dont 20% des salariés pensionnés et 68,5% des indépendants pensionnés. Dans le respect de l'accord de gouvernement, outre une durée minimale de 30 ans de carrière pour l'accès à la pension minimum, une condition de travail effectif de 20x250 jours (critère strict) et de 10x156 (critère souple) sur l'ensemble de la carrière (14040 jours) sera mise en place de manière transitoire et graduelle à partir de 2024. Autrement dit, trente ans de carrière sont toujours requis mais, durant cette période, 20 ans de travail effectif à 4/5e temps, ou plutôt 5.000 jours, devront avoir été prestés. A temps plein, cela représente environ 16 ans.
L'invalidité et les congés de maternité, d'allaitement ou pour soins palliatifs considérés comme du travail
La condition de travail effectif sera aussi allégée pour les travailleurs qui ont connu des périodes d'invalidité. Les jours de congé de maternité, congé d'allaitement et congé pour soins palliatifs ainsi que les périodes pour lesquelles la personne est reconnue comme personnes en situation de handicap, compteront comme jours de travail effectif.
Un bonus pour ceux qui continuent le travail
Afin d'encourager positivement les travailleurs âgés à rester actifs plus longtemps sur le marché du travail, le gouvernement a décidé d'activer un bonus pension d'un montant compris entre 2 et 3 euros par jour presté par les travailleurs au-delà de la date de leur pension anticipée ou de la date légale de la pension. Le montant définitif du bonus sera déterminé après analyse de la neutralité budgétaire. Ce bonus sera accessible durant maximum 3 ans, avec 30 jours d'assimilation par année calendrier (hors crédit-temps et interruptions de carrière).
Revalorisation pour les temps partiels pour les enfants
Le temps partiel concerne dans une grande majorité les travailleuses. Il a un impact direct sur le montant de leurs pensions et peut les exclure du droit à une pension minimum faute d'une carrière assez longue. Pour rappel, la pension des femmes est, aujourd'hui encore, en moyenne 33% moins élevée que celle des hommes. Une injustice que le gouvernement a décidé de corriger partiellement en prévoyant la revalorisation du temps partiel dans le calcul de la pension minimum. L'exigence sera assouplie et le nombre de jours sera ramené à 3.120 jours. La condition de travail effectif sera allégée pour les travailleurs qui ont connu une période d'invalidité selon une formule mathématique. Dans le cas d'une personne qui a subi une période d'invalidité de 20 ans, elle serait réduite à 11 ans ou 3.500 jours.
Tous les partis satisfaits mais le MR veut aller encore plus loin dans le futur
Le Premier ministre a mis en avant la valorisation du travail effectif dans la réforme: "Qui travaille effectivement voit sa carrière valorisée par une meilleure pension", a-t-il dit. Mme Lalieux a, quant à elle, salué un "accord qui soutient l'emploi et les femmes". "Après la hausse de la pension minimum, qui sera de 1.630 euros nets en 2024, la réforme des pensions s'étoffe de deux mesures positives, un bonus avantageux et une revalorisation du temps partiel dans le calcul de la pension minimum, ce qui augmentera le pouvoir d'achat des travailleurs et des femmes", a-t-elle expliqué dans un communiqué. Ecolo, par la voix du vice-Premier ministre Georges Gilkinet, a également insisté sur la situation des femmes. "Pour les écologistes, il était prioritaire de préserver au mieux les femmes et leur ouvrir de nouveaux droits", a-t-il dit, avant de se réjouir que le régime particulier de pension du personnel roulant de la SNCB (un temps évoqué dans les discussions avec celui des militaires avant d'en être retiré, NDLR) soit préservé. S'il salue l'accord, le président du MR, Georges-Louis Bouchez, a toutefois fait entendre une note plus critique. "Cette réforme des retraites ne va certainement pas assez loin si l'on veut garantir le financement de notre modèle mais constitue un pas important dans la bonne direction avec une plus grande valorisation de l'effort", a-t-il déclaré sur Twitter.
En bouclant ces discussions avant le terme annoncé du 21 juillet, le gouvernement résout un dossier qui risquait de miner considérablement les relations entre les partenaires.
Un "non-accord" pour la N-VA
Dans l'opposition au fédéral, la N-VA ne se montre pas impressionnée par ce accord. "Le gouvernement De Croo a décidé de ne pas mener de réforme des pensions mais a conclu un non-accord symbolique", a réagi le chef de groupe N-VA à la Chambre, Peter De Roover. "Ce dont nos générations futures ont besoin, c'est d'un plan solide pour l'avenir. Ce qu'elles obtiennent, c'est un gouvernement qui se chamaille et qui, après des semaines de réunions marathon, prononce le mot 'accord'", a-t-il ajouté. "La facture du vieillissement pèsera lourdement sur notre politique future, mais le gouvernement Vivaldi semble incapable de s'attaquer à ce problème fondamental", a encore regretté Peter De Roover.
"Accord #pensions? Quelques mesures oui. Mais quel est le message du #begov aux pensionnés qui ont travaillé dur avec une pension bien plus basse que dans les autres pays? À ceux qui cumulent différents statuts? À ceux qui ont un métier pénible? Aux jeunes à qui on remballe la patate chaude?", demande ainsi Catherine Fonck, la chef de groupe des Engagés à La Chambre, sur Twitter.
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