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Comment éviter que d'autres femmes, comme Aurélie, soient victimes de violences conjugales? "La justice manque de moyens"

Comment éviter que d'autres femmes, comme Aurélie, soient victimes de violences conjugales? "La justice manque de moyens"
© RTL INFO
 
 

Le corps d'Aurélie, mère de famille, a été retrouvé dans le coffre d'une voiture vendredi à Bouffioulx (Châtelet). Son ex-compagnon est considéré comme le principal suspect du meurtre. Arrêté samedi, il est en aveux. Ce midi, Olivier Schoonejans recevait Marie-Aurore Labonté, présidente de la Fondation Les Tamaris, une association d'aide aux victimes de violences conjugales.

Olivier Schoonjeans: En tant que président de la Fondation Les Tamaris, comment réagissez-vous à ce qui s'est passé ce week-end?

Marie-Aurore Labonté: "Avec beaucoup de tristesse, bien entendu, puisque nous sommes confrontés aux décès des victimes de violences conjugales régulièrement. Maintenant, c'est triste que, pour une fois, tout le monde est focalisé sur ce décès qui est un de trop."

Olivier Schoonejeans: Ici, l'auteur des faits ne pouvait pas approcher sa victime... Comment fonctionnent les mesures d'éloignement entre les les gens inculpés et leurs victimes?

Marie-Aurore Labonté: "En principe, il y a une ordonnance qui interdit à l'auteur de violences conjugales de s'approcher de la victime. Le souci, c'est que les mesures qui sont mises en place ne sont pas suffisantes, donc quand l'auteur ne respecte pas les mesures, il n'y a pas de moyens concrets pour l'empêcher de s'approcher de la victime et de la menacer ou de la violenter."

Olivier Schoonejeans: Si les victimes font face à leur agresseur, la personne qui ne peut pas entrer en contact avec elles, ont-elles une ligne rouge ? Un numéro spécial ?

Marie-Aurore Labonté: "Même pas, donc c'est à la victime d'effectuer toutes les démarches toute seule, de se rendre à la police, de redéposer plainte, de redire que l'auteur de violences conjugales ne respecte pas l'ordonnance d'éloignement. Donc, vous comprenez bien qu'au niveau de l'énergie, au niveau des craintes, au niveau de la peur, ça demande énormément de courage pour la victime qui, très souvent, ne déposera pas plainte. Elle viendra nous consulter, nous dire qu'il ne respecte pas et nous prendrons les mesures à ce sujet, mais en règle générale, en tout cas au niveau judiciaire, il n'y a pas de de moyens concrets pour contrôler la mesure d'éloignement."

Olivier Schoonejans: Concrètement, les victimes sont un peu livrées à elles-mêmes? Il y a évidement des associations comme les vôtres... La justice peut-elle faire plus? Peut-elle mieux les encadrer selon vous?

Marie-Aurore Labonté: "Je pense que la justice manque de moyens. C'est ce que nous répétons depuis de nombreuses années. Je pense aussi qu'il y a un manque de formation dans le chef des magistrats qui s'occupent de ces dossiers de violences. Il y a un mois, nous avons travaillé avec la Région Wallonne sur le plan national de lutte contre les violences conjugales et il était précisé que les acteurs du terrain, en tout cas les magistrats, la police et tous ceux qui travaillent avec les victimes, devraient être formés et sensibilisés à cette thématique de violences conjugales."

Olivier Schoonejans: Où en est la tolérance zéro? En 2004, en 2006, le Parquet avait dit qu'il faisait des problèmes de violences conjugales sa priorité. Où en est-on 15 ans plus tard?

Marie-Aurore Labonté: "La tolérance zéro a existé pendant de nombreuses années. Il y a plus ou moins cinq ans, on y est revenu, c'est-à-dire que les violences conjugales ne sont plus considérées comme étant une priorité pour le Parquet et donc, nous avons à faire face à des plaintes qui sont systématiquement classées sans suite."

Olivier Schoonejans: Derrière ça, il y a aussi la question de l'emprise que certains hommes peuvent exercer sur certaines femmes, un certain cycle de la violence progressif où finalement, la victime ne se rend pas compte qu'elle est en train d'être attirée dans un piège qui peut parfois être mortel...

Marie-Aurore Labonté: "Cette emprise fait partie du cycle de la violence et la victime ne réalise pas parce que tout se fait à petits pas. Concrètement, elle est isolée petit à petit de sa famille, de ses amis. On l'empêche parfois d'aller travailler, elle est parfois séquestrée chez elle. L'auteur va profiter de cette emprise pour accentuer peu à peu la violence."

Olivier Schoonejans: Comment faire pour sortir la victime avant qu'il se passe quelque chose de grave?

Marie-Aurore Labonté: "D'abord, il faut que la victime soit consciente qu'elle est victime de violences, ce qui n'est pas facile à reconnaître. Il faut savoir que ce n'est pas une question d'intelligence puisque nous avons des victimes qui sont hautement qualifiées. Il faut pouvoir informer et pour ça, je pense que l' information et la publicité autour de la prévention sont importantes."

Le numéro d'écoute des violences conjugales, à disposition des victimes, c'est le 0800/30.030.


 

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