D'après ses propres mots, Ali est "au paradis" depuis qu'il a installé des panneaux solaires sur le toit de sa ferme, située à Wonck (province de Liège), il y a environ un an. Il tient à le faire savoir au plus grand nombre: malgré la fin des certificats verts, l'opération reste rentable. Mais ses calculs sont-ils encore valables ? Vous allez le voir, on est en pleine transition…
Depuis la dérive de subsides trop généreux liés aux panneaux solaires en Wallonie (un très mauvais calcul qui impacte encore le budget régional), les Belges ne savent plus trop sur quel pied danser. Il faut dire que chaque région gère ça à sa manière. On s'est rendu compte récemment qu'à Bruxelles, par exemple, il était possible de faire installer gratuitement des panneaux photovoltaïques sur son toit grâce aux certificats verts garantis pendant 10 ans.
En Wallonie, la donne est devenue simple: il n'y a plus aucune prime de la Région, qui doit cependant continuer d'honorer le remboursement des certificats verts (mais à prix plancher) pour les installations effectuées avant 2018.
On pourrait donc estimer qu'il n'est plus du tout intéressant de placer de tels panneaux sur son toit. Erreur: la hausse constante du prix de l'électricité, associée à la baisse du coût total d'une installation, permet de rentabiliser l'investissement "en 6 ans", d'après Ali, qui a contacté la rédaction de RTL info via le bouton orange Alertez-nous. En réalité, à cause de l'abandon d'une autre prime et de l'arrivée d'un genre de taxe, l'opération n'est pas aussi vite amortie…
Les bons conseils d'un ami…
C'est en juillet 2017 qu'Ali, qui habite dans une jolie ferme à Wonck (Bassenge, province de Liège), a décidé d'installer des panneaux photovoltaïques sur son toit. "J'ai un ami qui travaille pour une entreprise de conseils énergétiques, avec comme client principalement la Région wallonne. Il aide les communes à diminuer leurs impacts négatifs sur l'environnement. Il s'y connait donc très bien. Il m'a conseillé de prendre des panneaux allemands, qui sont plus chers, mais plus épais et plus résistants aux grêlons. Il m'a également conseillé de travailler avec une entreprise qu'il connaissait".
L'installation a été très rapide. "J'ai pris rendez-vous et 15 jours plus tard, ils venaient chez moi. En un jour, tout était installé, et ils ont travaillé très proprement". Il a tout de même dû attendre 15 jours de plus "pour la réception définitive, et la venue de Vinçotte (organisme de certification) qui vérifie que l'installation est conforme".
Le coût total de l'installation (panneaux + montage + certification) est de "environ 11.000 euros", pour 32 panneaux capables, dans des conditions normales, de couvrir une consommation annuelle de 8.000 kW.
Ali estime que son investissement est optimal, et qu'on devrait tous y penser...
Il fait ses comptes: "En 6 ans, c'est rentabilisé"
Avant d'installer ses panneaux, Ali devait payer chaque mois 130€ à son fournisseur d'électricité. "C'était plus ou moins stable, mais le prix avait tendance à monter depuis quelques temps", nous explique-t-il.
Quand il a décidé d'installer ses panneaux, il n'était pas tout à fait sûr de ce qu'il allait économiser. Mais après un an d'utilisation, il est ravi. "Je suis au paradis, je suis très impressionné", nous a-t-il confié.
Au lieu de 130€ par mois, j'ai payé 82€ pour un an
"Au lieu de 130€ par mois, j'ai payé 82€ pour un an", nous a-t-il précisé, preuve à l'appui. En réalité, il ne paie que la redevance annuelle à son fournisseur Eneco (54€ HTVA) et des frais pour son gestionnaire de réseau ALE (15€ HTVA). Ali avait cependant provisionné 30€ par mois auprès d'Eneco, ne sachant pas trop à quel point ses panneaux allaient être efficaces. "J'ai donc retouché 248€ (330€ sur 11 mois, moins 82€)".
Il fait ses calculs avec nous. "C'est facile: des 11.000€ de l'installation, vous retirez 2.500€ de primes RESA (5 x 500 euros de prime annuelle, mais elles datent du plan Qualiwatt, qui a été abandonné entretemps, NDLR), ça fait 8.500€. Je payais 130€ d'électricité par mois, donc 1.560€ par an. Vous retirez 82€ par an de frais. On est à 8.868€, donc ça va être remboursé en 6 ans, c'est incroyable". Et Ali nous le rappelle: "J'ai pris des bons panneaux, qui vont durer normalement 30 ans".
Vu la fin des primes et l'arrivée du tarif "prosumer", voici le vrai calcul de rentabilité
Vu que les primes Qualiwatt octroyées via le gestionnaire de réseau ont disparu (comme toute forme de prime en Wallonie, rappelons-le) il y a quelques mois, et que le tarif "prosumer" arrive en 2020, il s'agit de revoir les chiffres d'Ali.
Rappelons-le, le "tarif prosumer" a été acté et en 2020, les producteurs d'énergie solaire devront s'acquitter de ce qui ressemble bien à une taxe annuelle. Son montant est compris "entre 80 et 120€ par kWc", nous avait expliqué la CWaPE il y a peu.
Le kWc, c'est la mesure de rendement d'une installation de panneaux solaires: 1 kWc est plus ou moins égal à 8 mètres carrés de panneaux. Avec ses 32 panneaux (plus ou moins 32 mètres carrés), Ali devra théoriquement payer pour 4 kWc, donc entre 320 et 480 euros par an.
Reprenons nos calculs: 1560€ (économie d'électricité par an) - 82€ (redevance, raccordement) – 400€ (tarif "prosumer" estimé) = 1.078€ de "bénéfices" annuels.
Ce n'est donc pas en 6 ans que vous pourriez rentabiliser une installation dans des conditions similaires à celles d'Ali, mais (à partir de 2020) en un peu plus de 10 ans.
Il reste néanmoins le principe du compteur électrique qui 'tourne à l'envers'. Explication: quand Ali utilise de l'électricité durant la nuit, il consomme de l'énergie issue du réseau, et non de ses panneaux. Pourtant, il ne paie pas son électricité. "Tous les ans, on fait la moyenne entre l'énergie consommée et l'énergie produite. Si on produit plus, la facture est de 0€, si on produit moins, on paie le surplus comme tout le monde. C'est avantageux car le particulier qui injecte de l'énergie sur le réseau et fait tourner son compteur à l'envers, finalement il la vend au prix où il l'achète, or c'est normalement nettement moins élevé que ça", nous a expliqué la CWaPE.
Une facture d'électricité totale de 81,47€ par an, ça fait plaisir...
Précision importante: durée de vie du matériel
Précision importante pour calculer sur le très long terme: la durée de vie moyenne des panneaux solaires est d'environ 25 ans. Dès 10 ans, certains panneaux solaires perdent 10% de rendement. Au-delà de 25 ans, on estime que les panneaux ne fonctionnent plus qu'à 80% de leur capacité initiale, ce qui reste raisonnable. Attention: la technologie évolue et selon le matériel installé, les chiffres varient fortement.
Pensez aussi au fait que l'onduleur (qui convertit le courant continu issu de vos panneaux en courant alternatif utilisable dans une habitation) est très sollicité en permanence. Sa durée de vie dépend à nouveau de sa qualité, mais on considère qu'après une dizaine d'années, il faut le réparer ou le remplacer (plusieurs centaines d'euros minimum…).
En conclusion: installer des panneaux solaires reste une opération rentable, au final, même si ce n'est pas (plus) dans les proportions avancées par Ali. A priori, c'est également un geste pour la planète, même si la question de la production et du recyclage des panneaux et des onduleurs demeure en suspens…
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