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Le nombre de GSM en prison a explosé, générant des trafics en tout genre: "Les autorités ne veulent rien entendre"

Le nombre de GSM en prison a explosé, générant des trafics en tout genre: "Les autorités ne veulent rien entendre"
 
 

L'utilisation de portables en prison est une réalité. De nombreux témoignages abondent en ce sens, même si le règlement des prisons l'interdit pour d'évidentes raisons de sécurité. Mais comment se fait-il que personne n'arrive à endiguer ce phénomène ?

Un internaute nous a récemment contactés après avoir aperçu une nouvelle vidéo publiée par un détenu sur un réseau social. "Voici encore une vidéo d'un homme en prison. Cela fait plusieurs fois que je vois des détenus poster des images depuis la prison", s'est-il inquiété via notre bouton orange Alertez-nous.

Et en effet, depuis les prisons, la frontière avec le monde extérieur ne semble pas du tout étanche.

Il y a un peu plus de trois ans, l’une de nos équipes avait déjà pu facilement se procurer les images d'un détenu de la prison d’Arlon se filmant en cellule avec son téléphone portable. Quelques mois plus tard, un ancien détenu témoignait. Se procurer un GSM était, selon lui, "facile".


Même Farid Bamouhammad avait un GSM au cachot

Pire ! Durant l'été 2013, un de nos journalistes était parvenu à entrer en contact avec Farid Bamouhammad, considéré à cette époque comme un détenu "ingérable". Il était d'ailleurs à l'isolement depuis quatre mois, dans un cachot de 6m² à la prison de Nivelles. Un régime particulièrement strict, réservé à aucun autre détenu en Belgique. Pourtant, Farid Bamouhammad avait résussi à se procurer un portable pour répondre aux questions de notre journaliste. "Ce n'était pas son portable, mais via un autre détenu que je l'avais contacté. Il avait réussi à trouver un deal", a confié notre collègue. "C'est assez simple pour eux. La majorité des détenus ont accès à un GSM s'ils le souhaitent", a-t-il ajouté.


Téléphoner n'est pas interdit

A première vue, savoir que les détenus peuvent être en contact avec l'extérieur peut s'avérer choquant. Et pourtant, téléphoner ne leur est pas interdit. Comme indiqué sur le site internet du SPF Justice, "un détenu peut téléphoner, tous les jours et à ses frais, à des numéros de postes fixes et de gsm. Les téléphones se trouvent dans le couloir des cellules. Chaque détenu reçoit un code personnel qu'il introduit lorsqu'il téléphone ; il paie ses communications téléphoniques via son compte individuel."

Mais à la différence des communications via portable, ces appels sont contrôlés et, dans des cas déterminés, le directeur de la prison ou le juge d'instruction peut décider de les interdire pour un détenu, principalement en cas de mise en danger potentiel de l'ordre ou de la sécurité.

Or, avec les GSM, tout échange échappe à la vigilance des autorités. "On a des communications avec l'extérieur qui ne sont pas contrôlées", a confié Laurent Sempot, porte-parole de l'administration pénitentiaire.


"Cela génère toutes sortes de trafics"

Et au sein même des prisons, le phénomène pose de sérieux soucis de sécurité. "Il y a énormément d'argent qui circule. Et alors les GSM n'en parlons pas, ce qui génère des trafics en tout genre", a déclaré Laurence Clamar, secrétaire permanente CSC au SPF Justice. "C'est l'objet de différents trafics. Et qui dit trafic dit risque de corruption et de violence", enchérit Laurent Sempot.

Mais si la détention de téléphones portables par des prisonniers est si problématique et représente un danger potentiel, comment se fait-il qu'un tel objet soit si présent dans les établissements pénitentiaires ? Laurent Sempot est resté assez évasif sur la question, refusant par ailleurs de délivrer les techniques utilisées. "Il y a plusieurs façons envisageables de faire rentrer un GSM en prison, mais on ne va pas donner des idées à ceux qui en ont déjà. Mais ce n'est pas si compliqué que ça de faire rentrer un GSM", a-t-il indiqué.


Les fouilles corporelles systématiques ont été abandonnées début 2015...

Mais pour Laurence Clamar, si le problème n'est pas récent, il a pris une tout autre ampleur depuis l'interdiction des fouilles corporelles systématiques après une visite non surveillée. Une décision prise par le Conseil d'Etat, début 2015, suite à une plainte d'un détenu à Nivelles. "J'ai reçu il n'y a pas longtemps un relevé de manière officieuse. Depuis un certain temps, les fouilles systématiques ne sont plus réalisées. Du coup, la quantité d'argent, le nombre de GSM et d'objets trouvés dans les cellules a explosé", a-t-elle dénoncé avant de déplorer les risques que cela engendre. "Quand on ne fouille pas les gens, le détenu est beaucoup plus susceptible de regagner sa cellule avec des choses interdites, voire dangereuses. Cela s'est déjà vu alors que la fouille était systématique après une visite. Alors vous imaginez maintenant..."

Pour Laurent Sempot, l'abandon des fouilles systématiques n'explique pas tout. Selon lui, il n'est pas possible de tout contrôler, tout comme hors des prisons d'ailleurs. "C'est un peu comme l'alcool au volant. Ce n'est pas parce que c'est interdit et qu'on fait des contrôles qu'il n'y a plus personne qui roule sous influence", a-t-il conclu.


Pourquoi ne brouille-t-on pas les ondes GSM dans les prisons?

En 2007, deux projets de brouillage complet des ondes avaient pourtant été mis sur pieds dans les prisons d'Andenne et de Bruges. Mais, faute de moyens, ils ont été abandonnés. Et face à la problématique, les agents pénitentiaires s'estiment aussi abandonnés. "Les autorités ne veulent rien entendre. On ne parle que de budgets et d'économies. Il est malheureux de se dire que les choses bougeront peut-être un peu quand il y aura un gros problème. C'est vraiment un dialogue de sourds alors que la sécurité devrait être la priorité dans une prison. La sécurité pour les agents, mais aussi pour les citoyens", regrette Laurence Clamar.

@ArnaudRTLinfo


 

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