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Sa fille Kyara, 10 ans, est atteinte d’une maladie génétique extrêmement rare: "Je me bats pour améliorer son quotidien"

Sa fille Kyara, 10 ans, est atteinte d’une maladie génétique extrêmement rare: "Je me bats pour améliorer son quotidien"
 
 

Kyara est une fillette très souriante qui aime faire du vélo, nager, s’amuser dans des châteaux gonflables... et toutes sortes d’activités appréciées par les enfants de son âge. Toutefois, Kyara n’est pas tout à fait comme les autres. Elle est la seule en Belgique à être atteinte du syndrome Ring 14, une anomalie du chromosome 14 qui a de graves conséquences sur santé. Sa maman Cindy nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous pour "faire connaitre son combat".


"Je sentais qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas"

Il y a dix ans, Cindy était déjà maman d’un petit Romain, 4 ans à l’époque. À l’âge de 30 ans, elle est tombée enceinte pour la deuxième fois. Une grossesse qui s’est déroulée normalement. "Il n’y avait aucune raison de faire des analyses outre mesure. Je n’étais pas une personne à risque, je n’avais pas plus de 40 ans, l’amniocentèse n’était pas du tout à l’ordre du jour, mon premier enfant n’ayant aucun souci", raconte-t-elle.

Née à terme, Kyara pesait 2,4 Kg pour une taille de 44 centimètres. Nettement moins que la moyenne (3,3 kg pour 50 cm). "Personnellement… je sentais qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas", confie Cindy. Basé sur son instinct maternel, ce mauvais pressentiment s’est vérifié quelques mois plus tard.


Des dizaines de crises d’épilepsie par jour

Les parents ont d’abord constaté que leur bébé ne grandissait pas normalement, ne prenait pas de poids. "On était à la limite du gavage, se souvient Cindy. Elle avait un comportement bizarre. Elle ne correspondait pas au schéma classique des bébés."

À 8 mois, la fillette a montré de premiers symptômes, "des mouvements étranges" qui ont inquiété sa maman. À l’hôpital, on lui a expliqué qu’il s’agissait d’une crise d’épilepsie mais qu’il n’y avait pas de quoi s’alarmer. Puis les crises se sont accumulées. "Elle en faisait des dizaines par jour, je suis retournée plusieurs fois aux urgences", raconte Cindy. Alors la pédiatre a fini par demander une analyse ADN pour Kyara.


Un test ADN révèle la maladie

L’analyse a montré un problème au chromosome 14. Mal structuré, celui-ci a la forme d’un anneau plutôt que d’avoir un aspect rectiligne. "Il y a une partie d’une extrémité qu’on appelle le bras court et une partie d’une extrémité qu’on appelle le bras long qui sont absentes. Et donc toute une série de gènes contenus dans ces deux régions sont absents", explique le professeur Yves Sznajer, chef de Département et Coordinateur du Centre de Génétique Humaine aux Cliniques Universitaires St-Luc, (UCL).

"Votre fille sera handicapée de léger à modéré", leur a annoncé le généticien. "Le couperet tombe : une maladie chromosomique. Pourquoi? Comment? On ne sait pas", raconte Cindy.


À l’origine, "un accident chromosomique"

Le syndrome dont est porteur Kyara est rarissime. Il y a moins de 100 cas rapportés dans le monde actuellement, indique le professeur Sznajer. Cette maladie n’est pas héréditaire. "C’est un accident chromosomique. C’est insupportable à dire ou à écrire mais c’est une anomalie possible du fait de l’appareillement des chromosomes au moment de la conception", explique le professeur Sznajer.

Le diagnostic a été difficile à encaisser pour les parents. "C’est dur…", confie Cindy. "Plein de questions se posent dans votre tête : est-ce qu’elle va vivre longtemps ? Comment elle va évoluer ? Est-ce qu’elle parlera ?", raconte-t-elle.

En général, l’espérance de vie des patients avec un chromosome 14 en anneau n’est pas réduite, si on arrive à contrôler l'épilepsie : "Parce qu’en fait il n’y a pas de problème vital, pas de malformation cardiaque, pas de problème respiratoire particulier", explique le professeur Sznajer.


Épilepsie réfractaire, rétinite pigmentaire, retard moteur...

Les crises d’épilepsie de leur fille ont trouvé leur explication, mais pas vraiment de solution. Il s’agit d’un des symptômes les plus problématiques de ce syndrome. Le professeur Sznajer évoque des épilepsies parfois "très réfractaires", les traitements médicamenteux restant inefficaces. "Les traitements antiépileptiques ont commencé dès le début. Elle avait un premier traitement, puis à deux ans, elle a dû changer. Puis on a encore changé", raconte sa maman. Aujourd’hui, Kyara prend un "cocktail de 4 médicaments", indique-t-elle. La fillette a déjà dû être hospitalisée une trentaine de fois en tout pour son épilepsie. 

Outre ces crises, l’absence de certains gènes du chromosome 14 est à l’origine de plusieurs anomalies, explique le professeur Yves Sznajer : "ll y a un retard de croissance et des difficultés de développement intellectuel et de développement cognitif", égrène le scientifique. "C’est tout un tableau neurologique, comportemental, cognitif et visuel qui apparaît et qui crée des problèmes tout au long de l’existence", résume-t-il.

Une fois le diagnostic posé, différents spécialistes sont intervenus. Un neurologue pour le traitement contre l'épilepsie mais aussi un ophtalmologue, qui s’occupe de son problème de dépigmentation de la rétine. "Dans une des régions impliquées du chromosome 14, il y a un gène important qui est à l’origine d’une maladie de la rétine qu’on appelle une rétinite pigmentaire", explique le professeur. "Ces enfants peuvent aussi avoir des problèmes de malvoyance", indique-t-il.

Une prise en charge chez un gastro-entérologue a également été nécessaire pour des problèmes de reflux.

"Chacun s’occupe de son domaine et essaye en fonction de ses compétences de trouver des meilleures solutions pour Kyara, explique Cindy. Il y a un moment où ils [les médecins spécialistes] sont un peu bloqués parce qu’ils ne connaissent pas la maladie dans sa globalité."


Un quotidien bouleversé

Le diagnostic de Kyara a inévitablement eu de lourdes conséquences dans le quotidien de la famille. Il était difficilement possible de la placer en crèche, mais elle y est allée de temps en temps jusqu’à ses trois ans. "Il fallait la garder, éviter qu’elle soit malade, donc limiter les contacts avec les autres enfants", explique-t-elle.

Enseignante de néerlandais dans une école primaire, Cindy a pris un mi-temps parental pour raisons personnelles. De même pour le père, également enseignant. Plusieurs fois, les parents ont dû interrompre leurs cours pour rejoindre leur fille qui faisait une crise d’épilepsie.


Un enseignement spécialisé qui donne des clefs à Kyara pour communiquer

À 3 ans, Kyara a rejoint le centre les Petites Abeilles à Dilbeek où elle est restée deux ans. L’accueil comprenait "une partie rééducation et une partie école mais médicalisée", décrit Cindy. Depuis 5 ans, la fillette suit un enseignement spécialisé à l’école Saint François : des cours destinés aux enfants avec des déficiences intellectuelles, accompagnés de séances de logopédie, kinésithérapie et ergothérapie.

Aujourd’hui, Kyara émet des sons, parfois des mots. "Elle fait son langage à elle", raconte Cindy. Elle s’exprime aussi grâce au sésame, une méthode de communication inspirée de la langue des signes. "Comme ça elle se fait comprendre par pas mal de monde", note sa maman.

Hyperactive, la fillette a souvent du mal à se concentrer. "Il faut constamment changer d’activité", raconte Cindy, mais tout en veillant à éviter les crises d’épilepsie. "Il faut essayer de trouver le juste milieu pour qu’elle soit reposée, qu’elle n’ait pas trop de stimuli, la lumière, la musique, du monde… Il faut vraiment s’adapter à tout ça".


Une "lutte administrative" pour le remboursement des soins médicaux

"Je me bats pour améliorer son quotidien", raconte Cindy au sujet de sa fille. Le syndrome Ring 14 n’étant pas repris dans les maladies chroniques reconnues, cela passe notamment par une "lutte administrative" avec son assurance santé. "Elle ne rentre pas dans les critères d’acceptation", déplore-t-elle. Si son handicap leur donne droit à des allocations familiales majorées, sa maladie n’est pas reconnue par la sécurité sociale.

Se sentant parfois incomprise, Cindy a souhaité aller à la rencontre d’autres familles avec un enfant atteint du même syndrome.


Une rencontre décisive avec d’autres familles concernées par le Ring 14

Cindy connaissait depuis longtemps l’existence d’une association Ring 14 en Italie, mais n’était pas encline à leur faire appel. "Je ne voulais pas avoir de réponses que je n’avais pas envie d’entendre", confie-t-elle. Finalement, sa rencontre avec d’autres familles concernées par la maladie lui a donné une "énergie phénoménale". "On s’échange des informations entre nous que parfois les médecins ne savent pas nous donner. On se donne des idées, des remèdes contre tel ou tel problème", raconte-t-elle.

En janvier 2017, Cindy a fondé l’Association RING 14 Belgium pour sensibiliser le monde médical, récolter des fonds pour la recherche ou aider Kyara en cas de frais médicaux non remboursés. "On organise des congrès où on invite les familles avec leurs enfants, des meetings pour que les médecins puissent échanger des informations", explique-t-elle. 


Un défi caritatif le 26 août

Cindy nous signale également un événement organisé pour faire parler de son association. Le 26 août prochain, un de ses amis relèvera un "défi caritatif" : il parcourra plus de 95 kilomètres à pieds en une journée. "Nous partirons de Beaumont entre 6h et 6h30 du matin pour rejoindre Jette vers 22h", annonce-t-il sur la page de l’événement.


 

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