Une journée d'actions et de grève a lieu ce jeudi dans le secteur des soins de santé fédéraux. Le front commun syndical veut de cette manière forcer les employeurs à enfin concrétiser les éléments de l'Accord social non-marchand conclu il y a deux ans, le 25 octobre 2017.
Des services fermés, des piquets de grève devant des hôpitaux ou encore des maison médicales et des maisons de repos et de soins, de nombreuses actions sont menées un peu partout dans le pays par le front commun syndical CNE-Setca-CGSLB. Une quarantaine d'hôpitaux du pays sont concernés, notamment les hôpitaux Saint-Luc, Saint-Pierre et Saint-Jean à Bruxelles, l'ensemble des sites du Chirec, les CHU de Namur, Mont-Godinne et de Dinant, le CHC de Liège, l'ensemble des sites du Grand Hôpital de Charleroi, les hôpitaux louviérois de Jolimont et du Tivoli ou encore les CHR de Mouscron et de Mons-Warcquignies.
"On a le sentiment d'être pris pour des machines"
Florence est déléguée syndicale SETCA et travaille à la clinique. Elle explique à notre journaliste qu'elle ressent, dans son quotidien, une cadence devenue infernale: "Je travaille en gériatrie aigüe, et je peux parler au nom de mes collègues, que ce soient les infirmières, les aides-soignantes, mais aussi les brancardiers, les secrétaires, tout le monde a une pression au travail au quotidien. Ca entraîne des burnout, des stress chroniques, du mal-être au travail. Force est de constater qu'on est en Belgique l'un des pays les plus riches au monde, et la qualité des soins se dégrade. On a un turnover de patients qui fait qu'on ne sait plus les accompagner correctement. Nous-mêmes, nous sommes stressés de travailler dans des conditions, où on est dans une ère où on humanise les robots, et on robotise les humains. On a le sentiment d'être pris pour des machines, on n'a plus aucune considération, on ne se sent plus du tout reconnus dans notre travail. On a choisi ce travail pour accompagner les gens, pour faire de l'humain, on ne l'a pas fait au hasard, et ça, ce n'est plus du tout considéré. C'est le management qui dirige les hôpitaux, et l'humain n'est plus du tout au centre des débats. Notre combat, c'est pour les patients, c'est pour avoir une meilleure qualité des soins".
Les actions ont commencé
À 6h30, notre journaliste Guillaume Fraikin se trouvait à la clinique Saint-Anne Saint-Rémi à Anderlecht, en région bruxelloise, où des blouses blanches sont bien décidées à faire valoir leurs revendications. "Nous ne sommes pas des robots", "Cadence infernale", "Aidez-nous", "Manque de bras", voilà ce qu'on peut lire sur quelques-uns des panneaux installés depuis 6h ce matin devant l'entrée de la clinique. Aujourd'hui, le personnel a décidé d'exprimer son ras-le-bol face à des conditions de travail qui se dégradent. Un barrage filtrant ne laisse entrer que les patients et le personnel inscrit pour laisser passer le service minimum. Toutes les consultations du jour sont annulées.
Pour les syndicats, plus les années s'écoulent, plus la situation se dégrade. "Au fur et à mesure de toutes les économies et de toutes les coupes budgétaires, on a de moins en moins de personnel au chevet du patient, donc on n'arrive plus à assurer un encadrement de qualité et à faire en sorte que le patient soit en sécurité", explique Christophe de Wandelaer, technologue en imagerie médicale et délégué CNE.
©RTL INFO - Guillaume Fraikin
À Namur, le CHU tourne aussi au ralenti. Ici, selon les délégués syndicaux, le personnel s'est massivement mis en grève. "Je n'ai jamais vu autant de personnel infirmier, soignant, aide de soins, administratif... qui se sont mis en grève et qui viennent nous soutenir ici", confie Carine Patinet, sage-femme et déléguée CNE.
"Les employeurs veulent saucissonner la négociation"
"Aucune action n'aura lieu devant le cabinet de la ministre (fédérale de la Santé Maggie De Block), car nos actions visent les fédérations d'employeurs", a précisé à Belga Yves Hellendorf, secrétaire national CNE. Les travailleurs du secteur (Commission Paritaire 330) souhaitent obtenir la signature de conventions collectives de travail (CCT) d'exécution de l'accord social non marchand, signé il y a presque deux ans. "Les employeurs veulent saucissonner la négociation et aborder les trois points de l'Accord qui les arrangent, dont celui sur la flexibilité. L'intention est par exemple de supprimer l'obligation de 11 heures de repos entre deux services", détaille le représentant du syndicat chrétien. "Nous craignons, qu'une fois signée la convention qui arrange les employeurs, les autres points restent en rade."
"On signera tout ou on ne signera rien !"
Ceux-ci concernent notamment la stabilité des horaires, le droit d'avoir congé trois week-ends d'affilée pendant les vacances annuelles sans devoir en prester trois d'affilée pour compenser, la stabilité des contrats (l'obligation d'octroyer des contrats à temps plein et/ou à durée indéterminée dans certains cas) ou encore les formations. "Notre message est très clair: nous voulons finaliser l'ensemble des conventions d'ici la fin de cette année civile. On signera tout ou on ne signera rien !", a averti M. Hellendorf.
Revoir le reportage: "Les blouses blanches dénoncent leurs conditions de travail":
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